Ô sin pour familles d’expatriés

Au Vietnam, on les appelle railleusement les ô sin. Pourtant les aide-ménagères sont devenues indispensables pour nombre de familles vietnamiennes et même celles d’expatriés. Si les premières jettent leur dévolu sur des campagnardes, les secondes privilégient les étudiantes.

Ces dernières années, nombre de centres spécialisés dans la formation d’aide-ménagères sont apparus à Hanoi et Hô Chi Minh-Ville.
Ces dernières années, nombre de centres spécialisés dans la formation d’aide-ménagères sont apparus à Hanoi et Hô Chi Minh-Ville.

En feuilletant le carnet d’adresses de Nguyên Bich Thuy, 23 ans, personne ne pourrait s’imaginer qu’il s’agit d’une étudiante. Originaire de la province de Hung Yên (Nord), Bich Thuy étudie depuis trois ans à l’Université des langues étrangères de Hanoi, département d’anglais.

Son emploi du temps est particulièrement chargé : lever à 05h30, départ à 06h00 à vélo pour se rendre 6 km plus loin au «bureau» (selon sa propre expression, c’est-à-dire la maison d’une famille britannique de deux adultes et deux enfants), préparation du petit déjeuner de 06h15 à 07h15, à quoi s’ajoutent la préparation du vase de fleurs (achetées en cours de route), la toilette des enfants, l’accompagnement de ceux-ci (en taxi) à l’école à 07h15, travaux ménagers à 08h00 (vaisselle, nettoyage, linge, repassage…).

Tout en travaillant sérieusement, elle jette de temps en temps un regard sur un livre ouvert déposé sur une table. Des révisions en vue du cours à l’université qui débute à 13h30. Vers 11h30, les travaux ménagers terminés, Bich Thuy remonte sur son vélo et file dare-dare vers la chambrette qu’elle a louée non loin de son université.

Triées sur le volet

«J’ai eu de la chance d’avoir un travail à mi-temps. Les 2,5 millions que je gagne me permettent d’arrondir les fins de mois», confie-t-elle. Ses parents, paysans, ne peuvent assurer que les frais d’études. Elle doit payer elle-même la location du logement et de la nourriture.

Il y a deux ans, Bich Thuy a mis des mois à trouver ce job. Elle s’est rendue à la Sarl P.H (une agence d’intérim) où on l’a informée du travail et de la rémunération. «J’ai été surprise en apprenant qu’il y avait plus d’une candidate, et que la sélection se ferait sur la base du curriculum vitae, du niveau d’anglais (testé sur place) et d’un examen de santé», se souvient Bich Thuy, ajoutant que son statut d’étudiante en anglais l’avait sûrement aidée.

Pour Mai Phuc Hung, directeur de la Sarl P.H, l’aide-ménagère à domicile pour les familles d’expatriés a fait son apparition à Hanoi et Hô Chi Minh-Ville il y a quelques années. «Ce métier nécessite de parler une langue étrangère, d’avoir une bonne santé. Une fois recrutée, l’employée de maison est vue comme un membre de la famille, une personne de confiance. Elle peut travailler à temps complet ou à mi-temps, et a la clé de la maison», précise-t-il. En la matière, la Sarl P.H cible le milieu estudiantin.

Un travail bien rémunéré mais déprécié

«Bien que ce travail soit relativement bien payé, je n’en parle jamais à mes proches. Car dans les yeux des Vietnamiens, ce métier n’a pas la cote», observe Bich Thuy.

Son complexe d’infériorité est partagé par Trân Thanh Hà, qui travaille pour une famille allemande habitant une villa au bord du Lac de l’Ouest. Interrogée sur son travail, Thanh Hà se montre réticente à faire des confidences. Diplômée de l’Université de la culture de Hanoi en 2010, Thanh Hà n’est pas parvenue à trouver un emploi en rapport avec sa formation. Il y a deux ans, elle a accepté de devenir femme de ménage chez des Allemands sans que ses proches ne le sachent.

Avec le temps, elle jouit de l’estime de la famille, car outre un bon anglais, elle est intelligente et joue bien du piano. «Outre les travaux ménagers, je suis aussi prof de piano et de vietnamien pour leurs trois enfants ! Tout ça me permet d’avoir une rémunération convenable», dit-elle avec un sourire. Puis, elle pousse un soupir : «Au Vietnam, le métier d’aide-ménagère à domicile est raillé par les gens qui l’appellent +ô sin+ (du nom d’un personnage -une aide-ménagère- d’un film télévisé japonais qui a eu beaucoup de succès au Vietnam, ndlr). Mes parents pensent que je travaille pour une organisation étrangère. Impensable de leur dire la vérité !».

Les aide-ménagères sont devenues indispensables pour nombre de familles vietnamiennes et même celles d’expatriés.
Les aide-ménagères sont devenues indispensables pour nombre de familles vietnamiennes et même celles d’expatriés.

Ces dernières années, sont apparues à Hanoi et à Hô Chi Minh-Ville nombre de centres spécialisés dans la formation d’aide-ménagères et la fourniture de services ménagers. Néanmoins, l’offre reste toujours inférieure à la demande. «De plus en plus, les employeurs exigent une aide-ménagère de qualité, formée. Hormis la loyauté et l’assiduité, l’employée de maison doit être capable de faire la cuisine, vietnamienne et étrangère, d’utiliser des appareils d’électroménager modernes, de s’occuper des enfants et des personnes âgées…», explique Dô Trân Tuân, directeur d’un centre d’apprentissage à Hanoi.

Et de citer comme exemple le cas de Phan Thanh Huong, 35 ans. Après avoir suivi un cours de formation, cette femme de ménage est devenue l’amie d’une famille néo-zélandaise habitant le quartier de Golden West Lake. «J’ai un travail stable, avec un bon salaire de 5 millions de dôngs par mois. Mes employeurs sont bons et me traitent avec respect», confie Thanh Huong.

Nghia Dàn/CVN

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