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La biathlète française Julia Simon, championne du monde de poursuite, le 12 février à Oberhof (Allemagne). |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Déjà vainqueur du sprint la veille, Johannes Boe a lui offert un récital pour signer le doublé en poursuite : parfait au tir, le Norvégien a relégué à plus d'une minute ses plus proches concurrents, son compatriote Sturla Laegreid (+1:11 malgré un 20/20) et le Suédois Sebastien Samuelsson (+1:54 avec 2 fautes). "J'ai senti dès le premier tir que c'était mon jour. Il n'y avait pas grand-chose qui pouvait m'arrêter", avoue Boe.
C'est au bout d'une admirable remontée que Simon est devenue, à 26 ans, la première Française sacrée championne du monde depuis Marie Dorin en 2016. Partie en dixième position, à plus d'une minute de Denise Herrmann-Wick, victorieuse du sprint vendredi, elle s'est imposée 27 sec devant l'Allemande, grâce à un tir de haut vol.
La Savoyarde n'a manqué qu'une cible sur vingt, au dernier tir debout, quand Herrmann-Wick a tourné à quatre reprises sur l'anneau de pénalité. La Norvégienne Marte Olsbu Roeiseland complète le podium, à 37 secondes (3 fautes).
"Je suis restée concentrée jusqu'au sommet de la grosse bosse, et après, quand Cyril (Burdet, l'entraîneur des Bleues en bord de piste) m'a dit : +C'est bon, tu l'as fait !+, j'ai eu les jambes qui ont commencé à trembler, raconte Simon. C'est incroyable."
Métamorphose au tir couché
Elle qui se dit "pudique des sentiments, imperméable aux émotions" n'a pas pu les retenir au moment de s'offrir sa toute première médaille individuelle internationale. "C'est une conquérante, une battante, quelqu'un qui a toujours eu ce tempérament, même quand je l'ai connue à 16 ans, se souvient Burdet. Elle a eu un parcours avec des très hauts et des très bas. Aujourd'hui, c'est la quintessence de tout ce qu'elle a appris tout au long de ces années."
"C'est un aboutissement dans ma carrière, ça récompense tout le travail que j'ai pu faire, apprécie la biathlète des Saisies, venue au ski par l'alpin enfant. J'ai eu des doutes, des moments difficiles, comme tout le monde. Je suis super contente de partager le podium avec deux grandes championnes, c'est un super moment."
Promesse du biathlon français depuis plusieurs années, Simon, débuts en Coupe du monde à 20 ans (2017) avant de l'investir pour de bon en 2018/2019, a longtemps eu comme marque de fabrique d'être capable du pire comme du meilleur, un jour très bas, le lendemain tout en haut. Une irrégularité qui l'empêchait de jouer les premiers rôles.
Le Norvégien Johannes Boe, sacré champion du monde de poursuite, le 12 février à Oberhof. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Jusqu'à cet hiver. Le facteur X ? Sa métamorphose au tir couché, fruit d'un travail de longue haleine et d'efforts considérables sur son tempérament bouillonnant. "Pourquoi elle est N°1 mondiale ? Elle skie comme l'année dernière, mais en stats de tir, surtout couché, elle a gagné quinze points. Il ne faut pas aller chercher ailleurs", résume l'entraîneur de tir des Bleus Jean-Paul Giachino.
"Très électrique"
"J'avais un tir (couché) trop engagé, avec peu de connaissances du tir. Il fallait tout démolir pour retrouver un tir beaucoup plus calme, plus posé, et pouvoir mieux comprendre les choses", explique Simon.
Au printemps 2020, quand le technicien revient dans l'encadrement français, "je ne lui ai pas vendu du rêve, je lui ai dit que c'était deux ans de travail, raconte-t-il. Là, elle m'a dit qu'elle n'avait pas deux ans. Julia a plein de qualités, mais pas la patience..."
"On l'avait initiée sur un mode ball trap, où l'arme n'est jamais tranquille, décrit Giachino. Mais ce n'est pas comme ça qu'on arrive à avoir de la régularité. Dans son apprentissage, on ne lui a pas parlé des fondamentaux: la respiration, la visée, le lâché", complète-t-il.
"Ça m'a demandé du travail sur ma personnalité : je suis quelqu'un de très électrique, il faut que les choses avancent vite, reconnaît Simon. Beaucoup de travail mental aussi, pour trouver du relâchement derrière la carabine, parce que je suis quelqu'un de très tonique."
Tout a changé cet hiver. Simon affiche 94% de réussite au tir couché depuis le début de la saison. Grâce à sa régularité nouvelle sur le pas de tir, elle porte le dossard jaune de leader de la Coupe du monde depuis décembre, forte de trois victoires et neuf podiums individuels au total.
Et, aux premières récompenses internationales partagées (or mondial du relais mixte simple en 2021 avec Antonin Guigonnat, argent olympique 2022 et bronze mondial 2023 du relais mixte), elle vient d'ajouter une première couronne mondiale.
AFP/VNA/CVN