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Affiches électorales du parti macédonien au pouvoir, la droite nationaliste VMRO-DPMNE, à Skopje, le 10 décembre 2016 |
Affiches électorales du parti macédonien au pouvoir, la droite nationaliste VMRO-DPMNE, à Skopje, le 10 décembre 2016. |
"Tout est en ordre pour ces élection. Les 3.490 bureaux de vote ont ouvert" et fermeront à 19h00 locales (18h00 GMT), a déclaré à l'AFP la commission nationale électorale. Aux affaires depuis dix ans dans cette ex-République yougoslave, la droite nationaliste au pouvoir (VMRO-DPMNE) est donnée par les sondages devant l'opposition social-démocrate (SDSM) de Zoran Zaev.
Mais le nombre important d'indécis rend tout pronostic difficile, en raison notamment de la lassitude des deux millions de Macédoniens. La population, composée d'une majorité de slaves orthodoxes et d'une minorité d'Albanais (20 à 25%), est très préoccupée par le taux de chômage très élevé (25%) et semble usée par des mois d'anathèmes entre les deux partis.
L'opposition dénonce l'autoritarisme et la corruption du pouvoir en place, tandis que le VMRO-DPMNE de Gruevski fait planer la menace de la destruction de cette république du sud des Balkans. Il accuse le SDSM de Zoran Zaev de jouer avec le feu en promettant, pour s'attirer les voix albanaises, une "fédéralisation" du pays encore marqué par la guerre civile de 2001.
Le principal parti albanais, l'Union pour l'intégration démocratique (DUI) de l'ancien rebelle Ali Ahmeti, est un partenaire incontournable pour qui veut gouverner en Macédoine, tour à tour allié des sociaux-démocrates puis des nationalistes. Signe de la crise politique que traverse ce jeune Etat, le scrutin, dont le principe a été entériné depuis un accord l'été 2015 sous l'égide de l'Union européenne (UE), a été reporté deux fois, rejeté par l'opposition qui accusait le pouvoir de truquer les listes ou encore de mettre les médias sous tutelle.
Écraser "toute critique"
S'il a cédé son poste de Premier ministre en janvier 2016 à son numéro deux, Emil Dimitriev, pour ouvrir la voie à ces élections, Nikola Gruevski reste aux commandes du VMRO-DPMNE et entend bien battre une nouvelle fois les sociaux-démocrates, qui collectionnent les défaites depuis dix ans.
Le climat s'était envenimé en janvier 2015, lorsque le SDSM avait accusé Nikola Gruevski (VMRO-DPMNE) d'avoir mis en oeuvre un système d'espionnage téléphonique de quelque 20.000 opposants, journalistes, religieux, représentants de la société civile. M. Zaev avait rendu publics des enregistrements qui semblaient aussi révéler une corruption massive, jusque dans les plus hautes sphères de l'administration.
Au printemps, des milliers d'opposants sont descendus dans la rue, excédés par une amnistie décrétée par le président Gjorge Ivanov, annulée depuis, concernant plus de 50 personnalités susceptibles d'être impliquées dans le scandale des écoutes illégales et de corruption. Ils ont alors maculé de peinture les murs et les statues de Skopje. Mais cette "Révolution de couleurs" ne semble pas suffisante pour permettre à elle seule l'accession au pouvoir du social-démocrate Zoran Zaev.
S'il perd, Gruevski et ses alliés seront "totalement marginalisés", explique Florian Bieber, spécialiste de l'Europe du sud-est à l'Université de Graz en Autriche. L'enquête judiciaire pour corruption, dans laquelle son nom apparaît, pourrait alors s'intensifier. En revanche, s'il gagne, "il écrasera toute critique", pronostique le chercheur.
"Il ne s'agit pas d'une campagne électorale ordinaire", a lancé Zoran Zaev, 42 ans, qui, lors d'un des derniers meetings de campagne, n'a pas hésité à dramatiser l'enjeu : "Les citoyens choisiront entre la vie et la mort". Dans un pays où le revenu moyen est inférieur à 400 euros, le prochain chef du gouvernement devra s'attaquer à une dette publique qui inquiète les instances financières internationales, tout en faisant baisser un chômage qui touche un quart de la population active.
Des préoccupations plus brûlantes aux yeux de beaucoup que les questions communautaires qui restent sensibles.
AFP/VNA/CVN