L'incendie meurtrier d'un studio d'animation suscite l'émoi au Japon et au-delà

Des témoins décrivaient vendredi 19 juillet des scènes d'enfer et disaient leur tristesse devant tant de jeunes vies fauchées, au lendemain d'un terrible incendie qui a tué 33 salariés et visiteurs d'un studio d'animation au Japon.

>>L'incendie criminel d'un studio d'animation au Japon fait 33 morts

Carte de localisation de Kyoto au Japon où 33 personnes ont péri jeudi dans l'incendie qui a ravagé un studio d'animation.

La tragédie, vraisemblablement d'origine criminelle, a suscité l'émoi au Japon et au-delà, des fans du monde entier envoyant des messages de soutien à la société endeuillée, Kyoto Animation, qui produit des dessins animés à succès. Dans le quartier résidentiel de Kyoto, ville de l'ouest de l'archipel où est survenu le drame, l'odeur de brûlé imprégnait les lieux, tandis que des passants venaient déposer des fleurs sous un ciel gris et lourd.

"Que des jeunes gens qui dessinaient en équipe et promouvaient l'animation japonaise à l'étranger se soient fait tuer sans la moindre raison par une seule et même personne, c'est insupportable, cela me met hors de moi", lance Yasuko Tomita. Cette riveraine de 59 ans, les mains jointes, est venue se recueillir "pour aider les victimes à trouver la paix", tant leur mort a été soudaine d'après les premiers éléments de l'enquête.

"Joyaux japonais"

"Ce sont ces personnes qui portent l'industrie de l'animation japonaise sur leurs épaules", a rendu hommage Hideaki Hatta, président de Kyoto Animation, compagnie réputée pour ses graphismes élaborés et ses conditions de travail meilleures qu'ailleurs. "Ça brise le coeur. Des joyaux japonais ont été perdus".

"Les artistes de KyoAni, parmi les plus talentueux et rêveurs, ont répandu la joie dans le monde entier et à travers les générations grâce à leurs chefs d'œuvre", a tweeté Tim Cook, le patron d'Apple. L'incendie, déclenché avec du carburant, s'est apparemment propagé à une vitesse fulgurante, prenant au piège de nombreux employés. Parmi les plus de 70 personnes présentes, 33 ont trouvé la mort, en tentant en vain de fuir la suffocante fumée. On déplore aussi 36 blessés, dont 10 grièvement atteints.

Peu de détails ont émergé à ce stade sur le profil des victimes, mais "la plupart des salariés de la compagnie sont âgés d'une vingtaine d'années", d'après un riverain interrogé par TV Asahi. Dans un petit restaurant du quartier, où plusieurs groupes de jeunes filles avaient l'habitude de venir déjeuner, la patronne faisait part de son incrédulité. "C'était des filles sérieuses et polies qui avait l'air de vraiment aimer leur travail et de s'y donner corps et âme. Je n'arrive toujours pas à croire", soufflait Tomoyo Kamada.

"Voir l'enfer"

De nombreux corps ont été trouvés sur les escaliers menant au toit-terrasse, ont raconté les pompiers qui ont exclu un dysfonctionnement des dispositifs anti-incendie.

Des policiers mènent des investigations dans le studio Kyoto Animation incendié, le 19 juillet.

Le bâtiment était "aux normes", a assuré un porte-parole du service des secours. "Nous avons un registre de données en attestant". "Il y avait des escaliers en colimaçon du rez-de-chaussée au toit, la fumée et les flammes s'y sont engouffrées en l'espace d'un instant", a-t-il expliqué. "Ceux qui travaillaient aux premier et deuxième étages ont donc dû être pris par surprise sans savoir ce qui s'était passé en bas". Les investigations vendredi étaient compliquées par le fait que l'auteur présumé, un homme de 41 ans qui aurait aussi apporté des couteaux et un marteau sur les lieux, n'était pas en mesure d'être entendu par la police du fait de ses blessures.

Le suspect, dont le mobile reste inconnu, est accusé d'avoir répandu de l'essence, ou un liquide similaire, et d'avoir hurlé "vous allez mourir" avant de mettre le feu. Visiblement il n'avait pas de liens avec le studio d'animation visé. "Nous avions reçu des e-mails de menaces de meurtre", avait indiqué le PDG de Kyoto Animation, mais les propos virulents ne sont pas rares dans le monde de l'animation. Les différents témoignages recueillis peignaient une situation apocalyptique.

"Une personne a sauté du deuxième étage, essayant désespérément de s'échapper, mais nous n'avons même pas pu accourir pour l'aider tant le feu était fort", a raconté une voisine à un journal en ligne, affilié au grand quotidien Asahi. Parmi les blessés, certains "criaient violemment", d'autres étaient "hébétés", a-t-elle ajouté. "C'était comme voir l'enfer". Dans cette vague de solidarité, une compagnie américaine du secteur a lancé sur internet un appel aux fonds, qui avait déjà réuni 1,3 million de dollars vendredi vers 08h00 GMT.


AFP/VNA/CVN

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