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Image fournie en 2003 par la NASA montrant les quatre lunes galiléennes de Jupiter : Io, Europe, Ganymède et Callisto. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Ces milieux sont si éloignés du Soleil que les astronomes les ont longtemps exclus de la zone du système solaire considérée comme habitable, "qui jusqu'à encore récemment s'arrêtait à Mars", explique l'astrophysicienne Athéna Coustenis, l'une des responsables scientifiques de la sonde européenne.
Les découvertes par les sondes Galileo (1995) autour de Jupiter, et Cassini (2004) autour de Saturne, ont repoussé les frontières de la recherche. Qui se focalise non sur ces planètes géantes, gazeuses donc non propices à la vie, mais leurs lunes glacées : Europe et Ganymède pour Jupiter ; Encelade et Titan pour Saturne.
Leur atout majeur : abriter sous leur surface de glace des océans d'eau liquide - seule l'eau à l'état liquide rendant la vie possible.
"C'est la première fois qu'on va explorer des habitats au-delà de la ligne de gel, là où l'eau liquide ne peut plus exister en surface", se félicitait Nicolas Altobelli, responsable de Juice pour l'Agence spatiale européenne (ESA), en janvier chez Airbus à Toulouse, où la sonde a été conçue.
La future mission de la NASA Europa Clipper visera Europe. Juice, elle, mise sur Ganymède. En 2034, elle devrait se placer en orbite autour de ce satellite naturel, le plus gros du système solaire. C'est aussi la seule lune à posséder son propre champ magnétique la protégeant des dangereuses radiations.
Océan gigantesque
Autant de caractéristiques suggérant un environnement stabilisé, autre condition à l'émergence du vivant... et à son maintien. Car "le tout n'est pas que la vie apparaisse, mais qu'elle subsiste", souligne Athéna Coustenis, chercheuse CNRS au Laboratoire LESIA de l'Observatoire de Paris-PSL.
Vue d'artiste fournie par la NASA et l'ESA en 2015, représentant Ganymède orbitant autour de Jupiter. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Contrairement aux missions sur Mars, en quête des traces d'une vie ancienne aujourd'hui disparue, l'exploration des lunes glacées cherche des environnements encore habitables. Ce que n'est plus la planète rouge.
L'habitabilité requiert aussi une source d'énergie. Sous les températures glaciales du système jovien, elle ne provient pas du Soleil mais de la gravité que Jupiter exerce sur ses satellites : des "effets de marée" semblables à ce qui se passe sur Terre avec sa lune.
Ce phénomène permet de "dissiper la chaleur à l'intérieur des lunes et de maintenir l'eau à l'état liquide", décrypte Francis Rocard, planétologue au Centre national d'études spatiales (CNES).
L'océan de Ganymède est "gigantesque", décrit Carole Larigauderie, cheffe du projet Juice au CNES. Piégé entre deux épaisses couches de glace, il serait profond de plusieurs dizaines de kilomètres.
"Sur Terre, on arrive à trouver des formes de vie au fond des abysses ", remarque-t-elle. Certains écosystèmes terrestres sont en effet capables de se maintenir sans lumière et grouillent de micro-organismes comme des bactéries ou des archées.
Missions complémentaires
Un tel écosystème a besoin de nutriments pour se maintenir. "Toute la question est donc de savoir si l'océan de Ganymède en contient", selon Athéna Coustenis. Il faudrait par exemple que l'océan puisse absorber des composants déposés à la surface, pour être ensuite dissous dans l'eau, poursuit l'astrophysicienne.
Image du télescope Hubble fournie par la NASA, en décembre 2008, montrant Jupiter et sa lune Ganymède. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Les instruments de Juice inspecteront cet océan sous toutes ses coutures pour évaluer sa profondeur, sa distance de la surface et, espère-t-on, sa composition.
L'engin orbitera environ huit mois autour de Ganymède, dont il pourra s'approcher jusqu'à 200 km d'altitude, à l'abri des radiations.
Dénuée de magnétosphère, sa sœur Europe est moins hospitalière pour un engin spatial. La sonde américaine Europa Clipper, qui atteindra sa destination en même temps que Juice, ne pourra que survoler sa cible. Les données récoltées par les deux missions seront néanmoins complémentaires, soulignent les scientifiques.
S'il s'avère que Ganymède coche toutes les cases pour héberger la vie, la "suite logique" serait d'y envoyer un atterrisseur, avance Cyril Cavel, responsable scientifique Airbus. "Ça fait partie du rêve" bien qu'il n'y ait pas de projet à ce stade.
AFP/VNA/CVN