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Pour les Cham, les jeux populaires ne sont pas seulement un moyen de se divertir. C’est aussi et peut-être surtout un moyen de se ressourcer et de se solidariser. Avec quelques cailloux, un bâton, un fruit ou… une fourmilière, les enfants peuvent s’amuser pendant des heures. Ces jeux, qui se transmettent oralement et manuellement, se prêtent aussi à la représentation et à la compétition, comme nous l’affirme Chau Van Huynh, qui a passé une bonne dizaine d’années de sa vie à étudier la culture Cham. "Tous les jeux reflètent la vie sociale et le quotidien des Cham", nous dit-il. "Aussi nombre d’entre eux se passent-ils au champ. Et comme les enfants ont l’habitude de se baigner dans les cours d’eau, ils ont inventé le jeu de la capture de la loutre avec cinq ou six joueurs".
La fête des Cham à Ninh Thuân. |
Les jeux Cham peuvent se jouer n’importe où et n’importe quand. Si imiter un faucon capturant un poussin ou se disputer un drapeau apprend à être plus rapide et plus solidaire, le tir à la corde renforce les muscles et la marelle rend les mains plus habiles. Mais il y a aussi des jeux qui rappellent l’histoire de ce peuple comme celui qui consiste à libérer des prisonniers, et même des jeux qui puisent leurs origines dans la magie ancienne comme ceux qui consistent à se fouetter les uns les autres ou à marcher sur le feu.
Mais aussi divers soient-ils, les jeux Cham se déclinent en deux catégories, en fonction de l’espace dans lequel ils se produisent. Il y en a donc qui se jouent dans tous les espaces, et d’autres, exclusivement lors de la partie rituelle des fêtes. L’un de ces jeux spirituels consiste à lâcher un cerf-volant censé représenter les ancêtres qui autrefois ont été emportés par un vent violent. Pour exprimer son attachement à ses aïeux, à l’occasion des fêtes, chaque famille lâche un cerf-volant, nous explique Chau Van Huynh. «Le lâcher de cerf-volant fait partie des rituels familiaux des Cham. Chaque famille dépose dans sa maison, à côté de l’autel des ancêtres, un cerf-volant qu’elle lâchera à l’entrée du village à l’occasion des fêtes. C’est à la fois un jeu et un acte spirituel qui vise à s’attirer bonheur et sérénité», nous indique-t-il.
La lutte libre est un autre jeu qui ne se pratique que lors des fêtes communautaires, après la cérémonie rituelle. C’est l’occasion pour les garçons musclés de séduire les filles. Mais attention ! Il est strictement interdit de se prêter au jeu avant l’autorisation officielle du maître de cérémonie. Et ne vous laissez-vous pas tromper par l’appellation «lutte libre», les joueurs ne sont pas libres de choisir l’endroit où se battre. Le jeu doit avoir lieu strictement dans l’espace de la fête.
En dehors de ces jeux rituels, les Cham disposent aussi de jeux qui s’inspirent de métiers traditionnels d’un village, comme la céramique à Bau Truc ou le tissage de brocatelle à My Nghiep. Ces jeux auront contribué à les rendre plus courageux, plus persévérants et plus solidaires.