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À l'heure où les États, réunis pour la 25e conférence de l'ONU sur le climat, sont sommés d'agir plus fortement et plus rapidement pour réduire le réchauffement climatique, les émissions de CO2 n'en prennent pas le chemin.
Selon le bilan annuel du Global carbon project (GCP), ces émissions devraient progresser de 0,6% en 2019, entraînant "une augmentation des concentrations de CO2 dans l'atmosphère" qui contribuent au dérèglement du climat.
"Les politiques actuelles ne sont clairement pas suffisantes pour renverser les tendances des émissions mondiales", a averti la climatologue Corinne Le Quéré, lors d'un point presse. "L'urgence à agir n'a pas encore baissé."
Au rythme actuel, la température pourrait grimper jusqu'à 4 ou 5°C d'ici à la fin du siècle, quand l'accord de Paris de 2015 prévoit de limiter le réchauffement climatique mondial bien en-dessous de 2°C, voire à 1,5°C.
Pour ne pas dépasser cet ambitieux objectif de +1,5°C, il faudrait réduire les émissions de gaz à effet de serre de 7,6% par an, chaque année dès l'an prochain et jusqu'à 2030, a calculé le Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE).
Pour le seul CO2, un pic des émissions n'est toutefois pas en vue. "Je l'espère dans les cinq prochaines années, mais on ne le voit pas encore", a reconnu Pierre Friedlingstein, de l'Université d'Exeter.
Les émissions mondiales de CO2 d'origine fossile (combustibles fossiles, industrie et ciment) sont près de deux-tiers plus élevées en 2019 que par rapport à 1990. Elles ont vu leur croissance ralentir depuis 2010, après la crise économique de 2008, mais elles sont fortement reparties à la hausse en 2017 (+1,5%) et 2018 (+2,1%).
Le gaz naturel, fausse solution ?
En 2019, "la croissance moindre (des émissions de CO2) est due à différents facteurs, dont un ralentissement de la croissance économique, les conditions météorologiques et une baisse substantielle de l'usage du charbon aux États-Unis et en Europe", a détaillé Corinne Le Quéré.
L'utilisation de charbon par les États-Unis, deuxième émetteur mondial, et dans l'Union européenne a diminué, jusqu'à 10% pour chacun en 2019, selon un communiqué de presse du GCP.
Le charbon reste toutefois une énergie prisée en Chine et le GCP ne voit pas de signaux clairs que ce pays, premier émetteur mondial, soit prêt à s'en passer.
Ailleurs, le recul du charbon a été compensé par une plus grande utilisation de pétrole et surtout de gaz naturel.
"Pour la même quantité d'énergie qu'on peut en retirer, le gaz naturel émet moins de CO2 que le charbon", mais si son usage augmente, "cela fait quand même croître les émissions de CO2", a souligné Philippe Ciais, chercheur au LSCE-Institut Pierre Simon Laplace. "On ne peut pas continuer à brûler du gaz naturel jusqu'à la fin du siècle, sinon on ne respectera pas l'accord de Paris", dit-il.
L'Agence internationale de l'énergie (AIE) défend pourtant le gaz naturel comme une énergie de transition et table sur une progression de sa consommation de 10% jusqu'à la fin des années 2020.
En Inde, la progression des émissions de CO2 semble avoir été freinée par la faible croissance économique.
Une autre source d'émissions de CO2 est le changement d'affectation des sols, c'est-à-dire quand des forêts, puits à carbone, sont rasées pour laisser par exemple la place à des cultures agricoles. Mais ces émissions, plus difficiles à mesurer, sont "très incertaines, sans tendance claire sur la dernière décennie", selon le GCP.
En France, où le nucléaire assure environ 70% de la production d'électricité, les émissions de CO2 ont reculé de 2,5% en 2018 (dernier chiffre disponible) comparé à 2017.