Les frères Torres, deux jumeaux pour une troisième étoile

Quand ils n'avaient que 8 ans, Sergio et Javier Torres ont élaboré un plan : devenir cuisiniers et atteindre les sommets. Pari réussi, plus de 40 ans plus tard, pour ces jumeaux barcelonais qui viennent d'obtenir leur troisième étoile au Michelin.

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Les chefs espagnols Sergio et Javier Torres (gauche) dans les cuisines de leur restaurant "Cocina Hermanos Torres", après avoir obtenu une troisième étoile au Michelin, le 1er décembre à Barcelone.
Photo : AFP/VNA/CVN

"C'était le plan parfait", sourit Javier, 51 ans, dans un entretien à l'AFP.

Pour atteindre le Graal, les deux frères, dont le choix de carrière surprend alors leur famille, décident de se former chacun de leur côté afin d'emmagasiner le plus de connaissances. "Quand nous sommes partis de Barcelone, l'idée était que Sergio suive un chemin, moi un autre et de nous retrouver que lorsque nous serions prêts", poursuit-il.

Leurs années de formation les amènent dans différents restaurants étoilés en Espagne, en Suisse ou en France.

Avant de poser ses valises à Paris, où il a travaillé chez Alain Ducasse, Sergio a notamment passé deux ans au Jardin des Sens à Montpellier (Sud de la France) auprès de deux autres jumeaux triplement étoilés, Jacques et Laurent Pourcel.

"Nous étions séparés mais tous les mois, nous nous retrouvions dans un restaurant, nous mangions bien, nous dépensions le peu que nous avions gagné et nous mettions au point les prochaines étapes de notre stratégie: toi les viandes, les légumes et le gibier, moi les poissons, le pain et les mets froids", poursuit Sergio, assis à côté de son frère dans leur restaurant "Cocina Hermanos Torres" (la cuisine des frères Torres) à Barcelone.

Initiés par leur grand-mère

Ouvert en 2018, ce restaurant est l'aboutissement du rêve de ces deux enfants d'un quartier populaire de Barcelone, initiés à la cuisine par leur grand-mère, venue, comme tant d'autres, du Sud de l'Espagne chercher un avenir meilleur en Catalogne (Nord-Est).

Dans les cuisines du restaurant "Cocina Hermanos Torres", le 1er décembre à Barcelone.
Photo : AFP/VNA/CVN

"Notre grand-mère nous gardait et comme elle passait la journée dans la cuisine, nous avons grandi dans une cuisine. Au sens propre du terme", explique Sergio.

Une ambiance chaleureuse qu'ils ont voulu reproduire lorsqu'ils ont fait le pas, il y a quatre ans, d'ouvrir leur lieu après avoir déjà décroché deux étoiles dans un premier projet au sein d'un grand hôtel barcelonais ("Dos cielos").

Ils visitèrent alors plus de 200 lieux avant de porter leur choix sur cet ancien entrepôt industriel où 50 clients mangent à chaque service sur des tables disposées autour de trois îlots centraux où les cuisiniers travaillent devant eux.

Une expérience dont le prix atteint 255 euros pour le menu dégustation, auxquels il faut rajouter 160 euros de plus pour un accord mets et vins.

Une somme très élevée pour beaucoup d'Espagnols alors que le salaire minimum est d'environ 1.000 euros dans le pays. Mais la haute gastronomie, et ses coûts élevés, n'est pas si lucrative qu'on voudrait le penser, assurent les frères Torres.

Afin de pouvoir financer ce projet, "nous avons fait beaucoup de choses en parallèle" comme des programmes de télévision ou des livres de recettes car "c'est un investissement de près de trois millions d'euros de Sergio et de moi, sans autre investisseur", souligne Javier.

Il est midi et les 50 personnes en cuisine et en salle peaufinent les derniers détails avant l'arrivée des clients. Beaucoup sont jeunes et désireux de réussir dans une profession dont on oublie parfois le côté ingrat.

"On a l'impression que la figure du chef est aujourd'hui celle d'une super star" qui passe à la télévision, reconnaît Sergio, alors que "c'est une voie très difficile, aux horaires à rallonge, dans laquelle il est très dur de réussir. Il faut avoir une constance incroyable." Mais "il faut prendre des risques, tout donner car sinon, on ne vit pas", conclut-il, dans un sourire.

AFP/VNA/CVN

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