Yrem Ê Ban, chef adjoint du village de Trâp, indique : "Les Ê-dê Bih, n'autorisent pas les hommes à jouer du gong". Dès leur enfance, ses petites soeurs ont commencé à faire des exercices. Mais comme les autres jeunes hommes, Yrem), la responsabilité de s'occuper des travaux des champs.
La tradition des Ê-dê Bih veut que chaque génération forme une troupe de jeunes joueurs. C'est pourquoi les femmes de Bih sont chargées de transmettre ce métier à la jeune génération. Au début, les jeunes filles apprennent à reconnaître la sonorité de chaque sorte de gong pour savoir lequel se joue en tête ou en queue, selon le son qu'il produit. Bien que chaque personne soit responsable d'un seul gong dans un orchestre qui en comprend 7, elle doit savoir jouer de tous les gongs de l'orchestre.
Trân Viêt Du, responsable des activités culturelles du village de Trâp, fait savoir qu'ici, ce sont les femmes qui tiennent le rôle du chef de famille et les enfants portent le nom de famille de leur mère. "Les femmes fournissent beaucoup de travail et battent le gong pour annoncer une bonne récolte", ajoute-t-il. Hsan Ê Ban, âgée de 70 ans, dit pour sa part qu'elle a appris à jouer du gong dès l'âge de 15 ans. "Aujourd'hui, je perpétue cette tradition en l'enseignant aux enfants", explique-t-elle.
"Lorsque j'étais élève en classe de septième, les mères m'ont demandé de participer au groupe d'instrumentistes du village", dévoile H. Diu, élève de terminale du lycée Krông Ana. Selon Diu, les membres de la jeune équipe sont âgés de 17 ou 18 ans. "Certains d'entre eux ont quitté l'école, mais personne n'abandonne l'équipe. Chaque week-end, les 2 groupes, âgés et jeunes, s'exercent à jouer du gong à la maison commune. C'est une occasion permettant aux femmes âgées de guider les jeunes filles", explique-t-elle. Sa petite soeur, H. Dao, âgée de 15 ans, s'exerce beaucoup. H. Rut, membre du jeune groupe du village, fait quant à elle savoir qu'elle participe tous les week-ends aux séances d'entraînement ainsi qu'aux cérémonies.
Le gong est un objet sacré, inséparable de la vie spirituelle et des croyances de la population du Tây Nguyên, une région qui comprend 5 provinces (Lâm Dông, Gia Lai, Kon Tum, Dak Lak et Dak Nông).
Les Bih, qui vivent dans le village de Trâp, sont une petite ethnie Ê-dê qui vivent au bord de la rivière Krông Ana. Trâp signifie " marécage". Leur village est installé sur des terrains marécageux de la rivière. Il totalise actuellement une dizaine de pièces de gong. L'orchestre Knah des Ê-dê Bih comprend 10 instruments. Les gongs sont baptisés en tant que membres d'une famille. Parmi elle, le grand gong, appelé Cing Ana, symbolise la mère, le gong plat K'nah Di la sœur ainée, celui H'liang la sœur cadette et le gong H'luê H'liang la benjamine. Le tambour H'gor symbolise quant à lui la grand-mère.
Tous les gongs de l'orchestre des femmes ont un bouton en leur centre. Une équipe de gong est composée de 7 membres, dont 6 jouent du gong et un bat le tambour. Les 3 pièces les plus souvent interprétées sont celles de l'accueil des visiteurs, du culte de la nouvelle saison rizicole et de l'annonce d'une bonne récolte.
Selon le vice-président de l'Association de l'art et de la culture de la province de Dak Lak, l'"Artiste du Peuple" Vu Lân, l'orchestre de gong du village de Trâp retentit sobrement pour saluer le retour d'un habitant local, faire des adieux, annoncer une bonne récolte, etc.
Hoàng Phuong/CVN