Les écrans pour les tout-petits : éduquer plutôt qu'interdire ?

Pas d'écran avant trois ans : une injonction que des parents peinent à appliquer. Pendant que le gouvernement réfléchit à une régulation du numérique chez les mineurs, des experts plaident pour éduquer les parents au développement de leur enfant.

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Des enfants occupés sur leurs tablettes dans une école maternelle à Montevideo, en pleine pandémie de COVID-19.
Photo : AFP/VNA/CVN

"Nous partageons l'inquiétude grandissante des parents, des éducateurs, des professionnels de santé", qui se sentent "démunis face à un phénomène de très grande ampleur" et un "enjeu de santé publique", a souligné jeudi 1er février la ministre chargée de la Santé, Catherine Vautrin, en inaugurant une table ronde sur l'exposition des tout-petits aux écrans.

"Le temps d'écran quotidien moyen dépasse 56 minutes chez les enfants de deux ans, 1h20 chez ceux de trois ans et demi", a-t-elle dit, rappelant une étude publiée au printemps 2023 par Santé publique France.

Le président Emmanuel Macron vient de charger un groupe d'experts (professionnels de santé, spécialistes du développement des enfants, acteurs de l'industrie, juristes...) d'évaluer l'impact des écrans sur les jeunes.

Ce Comité doit jauger l'efficacité des dispositifs existants et proposer en avril "des recommandations de régulation" chez les enfants ainsi que des mesures d'accompagnement pour les adultes, selon Mme Vautrin.

En France, la recommandation officielle est de ne pas exposer les enfants aux écrans avant 3 ans.

"Force est de constater qu'aujourd'hui ça ne marche pas. Pour les parents, c'est très complexe à mettre en œuvre", estime Grégoire Borst, membre du groupe d'experts gouvernemental, directeur du laboratoire de Psychologie du développement et de l'éducation de l'enfant.

Parents "dépassés" ?

En Grande-Bretagne, un enfant de trois ou quatre ans sur cinq possède son smartphone et utilise internet, selon OfCom, le régulateur britannique des médias.

En France, 40% des parents d'enfants de moins de six ans se disent "dépassés" par l'usage des outils numériques en famille, selon un sondage Ifop pour la Fondation pour l'Enfance publié avant le Safer Internet Day.

Quelque 83% des sage-femmes et puéricultrices observent lors de leurs visites à domicile des écrans allumés sans personne devant et 62% des parents au téléphone alors qu'ils s'occupent de leur enfant, selon cette enquête réalisée auprès de 300 professionnels de la petite enfance.

Sept parents interrogés sur dix constatent, eux, des effets négatifs des écrans sur leur progéniture: troubles du langage, de l'attention, du sommeil, agressivité...

"Plus il y a d'écrans à la maison, moins il y a de dialogue dans les familles", résume Laurie Catteeuw, experte éducation du groupe de crèches Babilou Family, présente lors de la table ronde jeudi. En insistant sur la nécessité pour les parents de "jouer et passer du temps" avec leurs enfants.

"Pas de réponse simple" 

Pour les experts de la petite enfance réunis au ministère du Travail, il faut aussi donner aux parents des connaissances scientifiques sur le développement du cerveau de l'enfant pendant les mille premiers jours, jusqu'à l'entrée en maternelle.

L'impact réel des écrans sur le développement des enfants fait débat depuis des années et il n'y a pas vraiment de consensus entre les experts : les études sur ce thème sont nombreuses mais leurs conclusions varient et leur qualité est inégale.

Pour M. Borst, "pas d’écran avant trois ans, c’est une injonction irréaliste. Ce n'est pas basé sur des données scientifiques". L'Académie américaine de pédiatrie, fait-il valoir, recommande de ne pas exposer avant deux ans et seulement à des contenus de très bonne qualité après.

"Les premières années, le cerveau de l'enfant est particulièrement sensible à l'environnement, dont les écrans", explique-t-il. "S'il n'y a pas d'écran, mais pas d'interaction avec les parents car ils sont sur leur téléphone portable, on aura les mêmes effets négatifs".

"L'enjeu, c’est éduquer à la parentalité, avoir connaissance du développement socio-émotionnel et cognitif de l’enfant. Il faut trouver des recommandations applicables et acceptables par les parents, adaptées à l'hétérogénéité des situations. Il n'y aura pas de réponse simple", conclut l'expert.

AFP/VNA/CVN


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