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La voiture à cheval fait partie de la vie des habitants de Bay Nui. |
Photo : CTV/CVN |
Le métier de cocher existe depuis longtemps dans la région de Bay Nui, province d’An Giang, dans le delta du Mékong. Bay Nui est une région où alternent montagnes, forêts et champs et où les villages sont liés les uns aux autres par des petits chemins raboteux. Autrefois, on y faisait route principalement à voiture de cheval ou à cheval même. Les cochers sont pour la plupart des Khmers, une ethnie minoritaire vivant dans le delta du Mékong.
Avec le temps, la vie s’est améliorée. La région compte désormais de nombreux chemins praticables et voit l’apparition de plus en plus répandue de véhicules motorisés. Mais, il semble qu’une partie des habitants locaux, les moins fortunés notamment, restent fidèles à leur moyen de transport traditionnel. Ainsi, la voiture à cheval, ou autrement dit la calèche, continue encore de s’insinuer dans les villages reculés.
Un gagne-pain, une fierté
«C’est un métier ancestral. Je suis cocher depuis l’âge de dix ans. J’aime ce métier et j’en suis fier. Pour moi, il s’agit non seulement d’un gagne-pain, mais il représente également un élement de l’identité de ma région natale», confie Chau Min, 56 ans, du village de Vinh Tây, district de Tinh Biên. Et de rappeler l’âge d’or de la profession, il y a bien 30 ans de cela, où cet unique moyen de transport dans la région permettait de «gagner gros».
Mais, à l’heure actuelle, les véhicules motorisés ont majoritairement remplacé les moyens de transports rudimentaires. La vie de cochers s’avère depuis bien plus difficile que dans le passé. «De toute façon, jamais je ne délaisserai le métier familial ni n’abandonnerai mon cheval que je considère comme un ami», avoue Chau Min.
À présent, le nombre de cochers à Bay Nui se compte sur les doigts d’une main. Leur point de rendez-vous est un terrain vague situé au bord du chemin intercommunal, relevant de la commune de Vinh Trung. Tous les matins, ils s’y rendent de bonne heure, attachent leurs chevaux à un arbre, se réunissent autour d’une tasse de thé dans une petite auberge, et papotent en attendant leurs clients. Chacun a ses habitués. «Je transporte des marchandises au service d’un commerçant, vers le marché communal ou vers des villages environnants. On me paie entre 50.000 et 150.000 dôngs la course, selon la longueur du parcours», partage Chau Da, 53 ans.
Dans les régions reculées et moins développées comme Bay Nui, la voiture à cheval s’avère en réalité plus pratique qu’ailleurs, servant non seulement aux passagers mais également au transport des marchandises diverses comme bois, matériaux de construction, instruments agricoles ou encore articles d’usage courant… Ce véhicule rudimentaire peut transporter jusqu’à 700 kg de marchandises. En moyenne, un cocher gagne entre 150.000 et 200.000 dôngs par jour.
«Parfois nous avons l’honneur de conduire pour une cérémonie de mariage. Quelle joie de voir un tel cortège allant chercher la mariée pour la conduire chez le marié ! La calèche est alors évidemment décorée pour la circonstance», s’enthousiasme Chau Da. De temps en temps il y a aussi un groupe de touristes désireux d’emprunter une voiture à cheval découvrir la vie de la région. «C’est pour nous l’occasion d’effectuer de longues courses, avec une rémunération pouvant s’élever à un million de dôngs le voyage», ajoute Chau Chanh avec un sourire.
Un métier difficile
Des touristes découvrent la région en voiture à cheval. |
Chau Chanh compte parmi les cochers les plus expérimentés. Il s’est taillé une bonne réputation à la qualité de ses techniques d’élevage et de soins des équidés. Pour lui, le cheval utilisé dans le métier doit être grand et bien portant. La plupart des animaux sont originaires du Cambodge. «La commune de Vinh Trung ne compte à présent qu’une trentaine de chevaux de trait. Le mien, je l’ai acheté à un marché cambodgien alors qu’il n’était encore qu’un poulain. Ça représente vraiment une petite fortune, de l’ordre 25 millions de dôngs», raconte-t-il.
Ce n’est pas tout, après l’achat, il faut encore dépenser une certaine somme pour d’autres affaires nécessaires à l’entretien de l’animal, comme ferrer ses sabots, l’équiper de rênes et d’une sonnaille… Sans oublier naturellement de se procurer une calèche à deux roues ! Il reste à l’heure actuelle une trentaine de chevaux de trait à Vinh Trung.
«Cette espèce d’herbivore se nourrit de manière assez impressionnante, avec une alimentation quatre fois supérieure à celle du bœuf. Sans oublier une chose importante : elle est exigeante et ne consomme que des espèces d’herbes bien paticulières», révèle Chau Chanh. Selon lui, l’alimentation de l’animal est assez coûteuse. Outre une ration de deux grands sacs d’herbe par jour, avant qu’il parte au travail, il faut également lui donner à manger 2 kg de paddy.
«L’espèce d’herbe dont se nourrit le cheval est très rare dans la région, pour ne pas dire quasi inexistante pendant la saison sèche. Pour subvenir suffisamment à son alimentation, je dois aller en couper dans des champs lointains», confie la femme de Chau Chanh.
Le métier de cocher fait partie de la vie des habitants de Bay Nui. Un métier qui se transmet de père en fils mais qui est actuellement en péril, face à la présence de plus en plus nombreuse des véhicules motorisés. «Je suis un cocher de quatrième génération. À présent, les passagers se font de plus en plus rares, notre travail consiste désormais principalement à transporter des marchandises. Il y a même des jours où je n’effectue aucune course. D’ailleurs, un certain nombre de cochers du village ont dû quitter le métier pour partir gagner leur vie ailleurs», s’attriste Chau Min.
«Quoi qu’il arrive, je me sens profondément attaché au métier familial. Et dans une certaine mesure, la voiture à cheval symbolise notre région natale. Il s’agit vraiment d’une belle image que je souhaite préserver. Je pense que je demeurerai sans doute le dernier cocher de Bay Nui», conclut-il.
Nghia Dàn /CVN