>>La criminalité en zone rurale change de visage
Les rues de Hô Chi Minh-Ville sont de moins en moins sûres. |
Après la Libération du Sud et la Réunification nationale (30 avril 1975), Hô Chi Minh-Ville est rapidement tombée dans une période trouble avec une criminalité omniprésente.
En mars 1978, la police locale décide de prendre le taureau par les cornes. Elle crée une force spéciale : le SBC (San Bat Cuop en vietnamien), des escouades de choc constituées de jeunes policiers pour chasser les malfrats. Une dizaine d’années après, la sécurité étant revenue dans les rues, cette organisation est dissoute. Mais son nom reste pour la postérité.
Le SBC renaît de ses cendres
Aujourd’hui hélas, l’insécurité a largement refait surface dans la ville, d’où l’idée de faire renaître le SBC, le cauchemar des hors-la-loi. Cette brigade s’attachera les services de plusieurs organisations qui se chargent déjà, sans cadre légal, de remettre de l’ordre dans les rues. Des actions chevaleresques et risquées qui valent à ses membres la dénomination de «chevaliers de la rue». Exemple avec le Club de chasse des voleurs. Ce dernier existe depuis 2013. Avec seulement six membres, il a déjà réglé plus de 200 affaires de vol.
Aujourd’hui, la ville a donc décidé d’officialiser son statut. L’équipe serait placée sous l’égide de la police. Une vraie marque de reconnaissance pour les six membres du groupe, qui ont déjà réglé plus de 200 vols dans la rue. Outre ce club, cette formation sera ouverte aux autres organisations qui se consacrent à cette mission.
«Chaque fois que nous recevons des informations d’un citoyen sur un vol, que ce soit par téléphone ou via notre page Facebook, nous nous mettons immédiatement à la poursuite de leur(s) auteur(s), de jour comme de nuit. Il arrive parfois que l’on reçoive jusqu’à 20 coups de fil par jour pour nous informer d’un vol ou demander de l’aide ! C’est pourquoi cette formation est plus que la bienvenue», informe Lâm Hiêu Long, 26 ans, le chef du club.
«La reformation officielle du SBC convient bien à la situation troublée de Hô Chi Minh-Ville et répond exactement aux besoins de ses citoyens, et surtout de ceux qui luttent, comme nous, contre les criminels. Même si nous avons chacun un travail, nous faisons toujours de notre mieux pour consacrer un maximum de temps à notre mission», confie Nguyên Viêt Sin, 23 ans, membre d’une autre équipe nommée les Chevaliers de Hô Chi Minh-Ville.
Si les activités spontanées des «chevaliers» saïgonnais ont démontré à maintes reprises leur efficacité, juridiquement, l’affaire est toute autre, puisqu’ils n’ont pour l’instant aucune assermentation de la part des autorités et donc aucune légitimité sur le plan légal. «Pour chasser les voleurs, nous devons les pister. Mais quand nous faisons cela, nous devenons du coup très suspects. Il n’est pas rare que l’on subisse des contrôle de police», raconte Lâm Hiêu Long.
Un «travail» risqué à plus d’un titre
Lâm Hiêu Long (1er plan, à gauche), un chevalier très connu à Hô Chi Minh-Ville. |
Autre problème lié à leur statut de simples citoyens aux yeux de la Justice : le danger encouru au moment d’affronter les voleurs. Ils ne peuvent en effet ni utiliser ni emporter d’arme pour les réprimer ou tout simplement se défendre. En cas de «bavure», elle servirait immédiatement de pièce à conviction et serait un élément à charge contre eux dans le cadre d’un procès.
Un risque supplémentaire pour ces chevaliers des temps modernes, les criminels étant à présent très agressifs et dans l’immense majorité des cas armés. Ainsi avant chaque affrontement doivent-ils observer dans les moindres détails la zone qui les entoure pour chercher des outils susceptibles de pouvoir être utilisés, en plus d’appeler les habitants des alentours à la rescousse pour encercler le ou les criminels.
Pour pouvoir arrêter un voleur, ce dernier doit être pris en flagrant délit. Il faut aussi des preuves irréfutables et des témoins. Et pour être sûr qu’une procédure de justice soit lancée, l’idéal est de filmer le crime ou délit. Certains voleurs sont en effet très malins. Au moment d’être interpellés, ils se débarrassent immédiatement les preuves et nient les accusations. Les chevaliers doivent donc les rechercher, la situation pouvant, le cas échéant, se retourner contre eux au risque de se retrouver dans la peau de l’accusé, certains tristes individus n’hésitant pas à porter plainte.
En d’autres termes, la reformation du SBC leur permettra dorénavant d’agir sans risquer des démêlés judiciaires, tout au moins pour ceux ayant suivi la formation officielle. Grâce à leur expérience acquise au fil des ans, qui leur vaut d’être organisés, exercés et méthodiques, nul doute qu’ils deviendront des alliés redoutables des autorités pour lutter contre la criminalité à Hô Chi Minh-Ville. Un joli tour de force de la part de Dinh La Thang.