Législatives en Thaïlande: le parti au pouvoir en tête

Le parti de la junte au pouvoir en Thaïlande est arrivé dimanche soir 24 mars en tête du vote populaire aux premières législatives organisées depuis le coup d’État de 2014, juste devant l'opposition, donnant de bonnes chances aux généraux de garder la main sur l'exécutif.

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Une Thaïlandaise dépose son bulletin de vote dans une urne à Bangkok le 24 mars.
Photo: AFP/VNA/CVN

Selon des résultats préliminaires, sur la base de 93% des bulletins de vote dépouillés, plus de 7,6 millions d'électeurs thaïlandais (sur un total de quelque 50 millions) ont voté pour le parti de la junte, le Palang Pracharat, selon la commission électorale. Arrive juste derrière lui le plus grand parti d'opposition, le Pheu Thai, avec 7,1 millions de voix.

Le Pheu Thai a dénoncé dimanche soir 24 mars, par la voix de son dirigeant, Viroj Pao-in, "l'utilisation de l'appareil d'État" par le parti de la junte.

Mais le nombre de sièges obtenus par chaque parti ne sera révélé que lundi 25 mars par la Commission électorale, le vote populaire ne donnant qu'une tendance générale: les 500 sièges de députés sont attribués en vertu d'un système électoral complexe, non proportionnel au nombre de voix.

À première vue, cela ressemble cependant à un revers pour le Pheu Thai, le parti de l'ex-Premier ministre Thaksin Shinawatra, habitué à remporter haut la main toutes les élections nationales depuis près de vingt ans.

Mais par le jeu de ce système électoral n'obéissant pas à la proportionnelle et des alliances entre partis, tout peut encore arriver. La surprise de ce scrutin est le bon résultat du nouveau parti d'opposition Future Forward, populaire auprès des jeunes, avec plus de 5,2 millions de suffrages.

Son fondateur, le milliardaire quadragénaire Thanathorn Juangroongruangkit, pourrait se retrouver à jouer un rôle clef. "Nous ne savons pas encore avec quel parti nous allons faire alliance", a-t-il déclaré dimanche soir 24 mars, assurant que ses observateurs n'avaient relevé que "des irrégularités mineures".

Depuis des années, la Thaïlande est profondément divisée entre des factions favorables à la famille influente des Shinawatra (les "rouges") et une élite conservatrice alignée sur l'armée (les "jaunes") qui se présente comme un gage de stabilité et de protection de la monarchie.

Le vieux parti Démocrate (conservateur n'ayant pas prêté allégeance à la junte) n'a réuni qu'un peu plus de trois millions des suffrages - et son chef, l'ex-Premier ministre Abhisit Vejjajiva, a démissionné.

Samedi soir 23 mars, le roi de Thaïlande, Maha Vajiralongkorn, dont les interventions publiques sont rarissimes, a appelé à "soutenir les bonnes personnes" pour "empêcher de semer le chaos". Il reprenait des termes employés en 1969 par son père Bhumibol Adulyadej, adoré des Thaïlandais et décédé en 2016.

Le message cryptique de Rama X, dont l’influence dans le royaume va bien au-delà de son statut de monarque constitutionnel, a été diffusé à plusieurs reprises par les chaînes de télévision jusqu'à l'ouverture des bureaux de vote.

Les électeurs se sont rendus en nombre dans les temples, écoles ou administrations pour voter.

"Depuis cinq ans, nous n'avons pas eu la possibilité de décider par nous-mêmes (...). Ce moment est très important pour notre pays", a relevé Wasa Anupant, un médecin de 28 ans.

Sénat contrôlé par l'armée

De nouvelles règles électorales limitent les chances de voir un seul parti acquérir à lui seul une majorité parlementaire confortable, d'après des observateurs qui craignent "une impasse" politique.

Mais les généraux, qui ont mis en place des politiques de subventions aux agriculteurs et aux plus âgés pour s'attirer leurs voix, entendent bien conserver le pouvoir. Il suffit donc au Phalang Pracharat, le parti pro-junte, d’obtenir 126 sièges sur les 500 que compte la Chambre des représentants pour garder le contrôle du pays.

Les autres mouvements politiques, au premier rang desquels le principal parti d'opposition le Pheu Thai, devront quant à eux gagner 376 sièges pour pouvoir former un gouvernement.

Prayut Chan-O-Cha, chef de la junte, s’est aménagé un avantage confortable avec une Constitution, adoptée en 2016, qui donne aux militaires le pouvoir de nommer les 250 membres du Sénat.

Populaires dans les régions rurales et pauvres peuplées du Nord et du Nord-Est, les partis "rouges" ont remporté toutes les élections depuis 2001, mais ils sont privés sur le terrain de leurs figures emblématiques: Thaksin Shinawatra et sa sœur Yingluck, évincés par des coups d'État en 2006 et 2014, vivent en exil pour échapper à des poursuites qu'ils jugent politiques.

Autre coup dur pour le clan Shinawatra, un parti très proche, le Thai Raksat Chart, a été dissous en février par la Cour constitutionnelle et ses dirigeants bannis de la vie politique pour dix ans. Ils ont été jugés coupables d'actes "hostiles envers la monarchie" pour avoir proposé la sœur du roi, la princesse Ubolratana, comme candidate au poste de Premier ministre.

AFP/VNA/CVN

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