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Michel Déon le 10 mai 2005 à Paris. |
Michel Déon le 10 mai 2005 à Paris. Photo : AFP/VNA/CVN |
"C'est une grande perte pour l'Académie. Il en était la mémoire et la conscience", a déclaré, bouleversée, la secrétaire perpétuelle de l'Académie française Hélène Carrère d'Encausse au sujet de l'écrivain.
Présent depuis 1978 à l'Académie, cet homme de droite en était le plus ancien élu après Jean d'Ormesson (élu en 1973).
"Je ressens de la tristesse et du chagrin. C'était un ami", a confié Jean d'Ormesson, tout en rappelant avoir eu des "orientations un peu différentes" : "Il détestait le général de Gaulle, j'étais gaulliste".
Vivant depuis plus d'une trentaine d'années en Irlande, Michel Déon est décédé le 28 décembre d'une embolie pulmonaire dans ce pays qu'il aimait tant.
Il est l'auteur d'une cinquantaine d'ouvrages, surtout des romans, dont Les Poneys sauvages et Le Taxi mauve, adapté au cinéma avec Philippe Noiret et Charlotte Rampling. Des romans écrits d'un style léger et pétillant.
"Michel Déon était avant tout un styliste avec des livres qui nous ont enchantés, avec des marins, des laissés pour compte dans les bistrots parisiens, des jeunes femmes romantiques... Son style était tout sauf ennuyeux, très vif, très amusant, mais très classique aussi. Il s'inscrivait dans une grande et vielle tradition française du style. Ses livres lui survivront", estime Jean d'Ormesson.
L'ancien président du FN Jean-Marie Le Pen a été une des premières personnalités politiques à réagir à son décès. "Affectueuses pensées pour la dernière charge du Hussard Michel Déon", a-t-il écrit sur son compte Twitter.
Homme de gauche, le mécène Pierre Bergé a lui salué un "très bon écrivain". "En politique nous étions plutôt opposés mais je le respectais car il savait lire", a-t-il ajouté.
Michel Déon pose en habit d'académicien à Paris le 4 décembre 2003. |
Michel Déon pose en habit d'académicien à Paris le 4 décembre 2003. Photo : AFP/VNA/CVN |
"Les visions de lande et d'Irlande, le jeune homme vert et ses vingt ans, (ont) notre reconnaissance. À jamais", a souligné le président du MoDem François Bayrou.
Grand voyageur
Ancien secrétaire de rédaction à L'Action française de Charles Maurras, le nom de Michel Déon était rattaché aux Hussards, courant littéraire anti-gaulliste et opposé à Sartre, dont le chef de file était Roger Nimier. Les grandes figures en furent Antoine Blondin ou Jacques Laurent.
"Ils ont apporté la jeunesse (...). Ils ont apporté un souffle d'imagination et de fantaisie à l'Académie", a souligné Mme Carrère d'Encausse.
Michel Déon a reçu de nombreux prix comme l'Interallié pour Les Poneys sauvages (1970), le grand prix du roman de l'Académie française pour Un Taxi mauve (1973), le grand prix européen de littérature pour albums d'enfants pour Thomas et l'infini (1976), le prix des Maisons de la presse pour Je vous écris d'Italie (1984) ou le prix Giono pour l'ensemble de son œuvre (1996).
Né le 4 août 1919 à Paris sous le nom d'Edouard Michel, dans une famille de militaires et de fonctionnaires, il est élève à Paris, Monaco et Nice avant de revenir en 1937 dans la capitale suivre des cours de droit.
Mobilisé jusqu'en novembre 1942, il reste en zone sud, travaille aux côtés de Charles Maurras à l'Action française. Il regagne Paris fin 1944 et travaille dans divers journaux.
Il quitte ensuite Paris pour être correspondant de presse en Suisse et en Italie, part un an aux États-Unis, avant de revenir en France en 1951. Dès 1958, ce grand voyageur repart pour le Portugal, puis le canton suisse du Tessin et enfin la Grèce, à Spetsaï, qui lui inspirera Le balcon de Spetsaï (1961). Toute sa vie sera ensuite rythmée par ces voyages entre l'Irlande, la Grèce et Paris. Il s'installera plus tard en Irlande.
"Michel Déon était un écrivain à l’inspiration romanesque nourrie notamment de cette terre d’Irlande qu’il aimait tant (...). Malgré sa proximité avec les thèses de Charles Maurras, il gardait en littérature une totale liberté dans ses choix, surprenant ses pairs et s’enthousiasmant pour les talents qu’il repérait", a salué dans un communiqué la ministre de la Culture, Audrey Azoulay.