Le Vietnam, une des priorités de la France en Asie

À l'occasion de la Journée internationale de la Francophonie (20 mars), l'ambassadeur de France au Vietnam, Jean-François Girault, a accordé au Courrier du Vietnam une interview à propos de la Francophonie et de la coopération entre la France et le Vietnam.

La Francophonie fête cette année son 40e anniversaire. Où en est-on maintenant ? Que pensez-vous de la communauté francophone ?

Portée par le rêve de Léopold Sedar Senghor, la Francophonie a depuis 40 ans su tirer de sa propre diversité une dynamique originale, qui continue de la caractériser. Les enjeux liés à la langue sont multiples : politiques, de dialogue interculturel quand le français est le moyen de communiquer, de présence et d'influence sur les affaires du monde aussi, comme le montre l'intérêt que suscite tous les 2 ans le Sommet de la Francophonie, ou le succès des initiatives francophones comme l'adoption par l'UNESCO de la convention sur la diversité culturelle. Les institutions francophones jouent, au plus fort de la mondialisation, un rôle essentiel dans le maintien d'une alternative culturelle. Aujourd'hui, je crois que la Francophonie est avant tout l'un des meilleurs garants du maintien dans le monde d'une grande diversité culturelle.

En matière linguistique, particulièrement, la Francophonie défend le multilinguisme tout autant que la langue française elle-même parce que chaque fois qu'une langue disparaît (et il en disparaît plusieurs centaines chaque année), c'est un peu du capital culturel d'un pays, d'une nation, qui s'amenuise. Dans cette dimension, le Vietnam devrait se retrouver pleinement. En ce qui concerne la communauté francophone, j'ai le sentiment qu'elle a bien compris cette dimension de la Francophonie aujourd'hui. Le Festival des films francophones, qui se déroule actuellement n'est ainsi pas seulement un festival de films en français. C'est avant tout l'occasion de montrer la diversité des créations cinématographiques roumaine, canadienne, marocaine, suisse, wallone, tunisienne, ivoirienne, congolaise, française et bien sûr vietnamienne. Le français n'est qu'un outil pour les créateurs, dans quelque domaine que ce soit, pour montrer à un large public leur culture et sa singularité. Il n'y a pas 2 films qui se ressemblent dans ce festival sauf, peut-être, qu'ils sont tous éloignés du modèle hollywoodien.

Le Vietnam a adhéré à la communauté francophone en 1970, dès les premiers jours de sa création. Comment la France aide-t-elle le Vietnam à développer la francophonie dans le pays ?

La France aide la Francophonie au Vietnam par tous les moyens dont elle dispose, et que l'on peut classer en 2 catégories : il y a tout d'abord le soutien aux organisations internationales dédiées à la Francophonie, notamment l'Organisation internationale de la Francophonie et l'Agence universitaire de la Francophonie dont la France est, de loin, le plus important bailleur de fonds.

Par ailleurs, une part du budget du ministère des Affaires étrangères et européennes est réservée à l'action linguistique et culturelle. Nous mettons en place dans ce domaine des actions qui, toutes, sont en lien avec la francophonie. Permettre aux spectateurs de Hanoi de voir des films en français ou mettre à disposition du public une médiathèque en français sont en lien direct avec le soutien que nous apportons au sein du système éducatif national pour maintenir l'enseignement du français. Par ailleurs la France fait une place importante à la mobilité étudiante en permettant à de jeunes Vietnamiens, pourvu qu'ils aient le niveau linguistique nécessaire, d'aller étudier en France dans les mêmes conditions que les étudiants français, c'est-à-dire à un coût très bas, de l'ordre de 300 euros par an, qui comprend l'inscription à l'université et la couverture sociale étudiante.

Enfin, dans les dernières années, de nombreuses filières d'études francophones se sont développées au Vietnam, pour offrir des débouchés à ceux qui souhaitent continuer à utiliser leurs connaissances en français pour aborder d'autres disciplines, scientifiques ou économiques par exemple.

Les relations franco-vietnamiennes sont marquées depuis une quinzaine d'années par un échange régulier de visites à haut niveau, témoignage de leur vigueur. En novembre dernier, le Premier ministre François Fillon a effectué la première visite officielle d'un chef du gouvernement français au Vietnam. Qu'envisagez-vous dans les prochaines années ?

Vous avez raison de rappeler la visite du Premier ministre François Fillon, en novembre 2009. Première visite d'un chef du gouvernement français au Vietnam, elle marque une nouvelle étape dans le renforcement de nos relations bilatérales, après la visite en France du Premier ministre Nguyên Tân Dung, en 2007. Cette visite a été extrêmement fructueuse, d'abord en termes de qualité des entretiens qu'a eus, au plus haut niveau, le Premier ministre, qui ont permis d'affirmer le partenariat franco-vietnamien, dans un certain nombre de domaines importants. Ceux-ci ont fait l'objet d'accords que nous nous attachons maintenant à mettre en œuvre : pour le développement des utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire, pour la création et le développement de l'Université des sciences et technologies de Hanoi (USTH), pour la coopération dans le domaine de la défense ou en matière de sécurité intérieure, ainsi que pour la coopération culturelle, puisque nous avons conclu à cette occasion un accord intergouvernemental sur les centres culturels, vietnamien en France et français au Vietnam.

Cette visite visait aussi à donner un nouvel élan à notre coopération économique : en effet, nos relations commerciales n'étaient pas au niveau de l'ensemble de notre relation. Au moment où je prends mes fonctions au Vietnam et où j'en rencontre les principaux dirigeants, je m'attache à évoquer les priorités de l'action de l'ambassade, dans les domaines du développement durable, des formations pour la croissance et de l'expansion des échanges commerciaux bilatéraux.

Pour l'avenir, ces échanges réguliers de visites se poursuivront, pour renforcer encore notre partenariat. Des responsables vietnamiens se rendront en France et des responsables français viendront au Vietnam en 2010.

Vous avez souligné lors de la présentation de vos lettres de créance au président de la République, Nguyên Minh Triêt, en février dernier, qu'une des priorités de la France, c'est de développer les échanges commerciaux avec le Vietnam. Qu'est-ce que vous comptez faire pour porter les échanges commerciaux bilatéraux à une nouvelle hauteur ?

La France entretient de longue date avec le Vietnam d'excellentes relations de confiance et de partenariat dans de nombreux domaines, notamment scientifiques et culturels. À ce titre, le Vietnam constitue l'une des priorités du gouvernement français en Asie, ce qui se traduit par exemple par le fait que la France est le premier bailleur de fonds européen (avec des engagements pour 2010 de 250 M€), le second bilatéral derrière le Japon. Plusieurs accords importants ont été signés à l'occasion de la visite de François Fillon, donnant une impulsion supplémentaire à notre partenariat, dont la revitalisation doit forcément passer par une intensification de nos relations économiques. Sur le plan commercial, la France était en 2009 le 14e fournisseur et le 19e client du Vietnam (selon les données statistiques vietnamiennes), avec un courant d'échanges de près de 1,7 md$. Nous pouvons faire mieux. Je pense qu'il existe un certain nombre de secteurs dans lesquels les entreprises françaises peuvent se développer dans les mois et années à venir, secteurs où ces entreprises sont particulièrement compétitives en matière de technologies et de savoir faire. On peut citer bien sûr le nucléaire civil (plus des trois quarts de l'électricité française est d'origine nucléaire). Je pense aussi à des secteurs où les besoins vietnamiens sont gigantesques tels que l'environnement, l'énergie et les transports. Je pense enfin à des secteurs d'avenir tels que l'aéronautique et le spatial, ou encore les industries agroalimentaires, 2 domaines dans lesquels l'expertise mondiale des entreprises françaises est reconnue. Je compte m'attacher à faire en sorte que nous progressions dans tous ces domaines.

Vous venez d'entamer votre mission diplomatique au Vietnam. Quelles sont vos premières impressions sur la vie à Hanoi et votre travail en particulier ?

Je ne suis en effet à Hanoi que depuis quelques semaines et ai donc tout à découvrir. Pour faciliter cette découverte, j'ai, dès le lendemain de mon arrivée, acheté une bicyclette, ce qui m'a permis de passer la semaine du Têt dans les rues de Hanoi. Ma première approche a donc été celle d'une capitale dans des circonstances particulières, celles de la fête, et de la fête familiale. Je m'efforce de sortir de l'ambassade tous les jours pour découvrir la ville, et naturellement, l'activité ayant repris depuis le Têt, j'en découvre de nouveaux aspects.

Je sais aussi que l'année 2010 est un moment important dans la vie de Hanoi et me réjouis que la France participe, par le biais des coopérations ou événements que nous mettrons en place à cette occasion, aux célébrations du Millénaire. La vie d'un ambassadeur ne se limitant pas à la capitale d'un pays, j'ai poursuivi ma découverte du Vietnam, ces derniers jours, par une visite à Hô Chi Minh-Ville ; j'irai aussi, avant l'été, dans plusieurs autres provinces, pour rencontrer les responsables locaux et me rendre compte des actions que mène la France dans les différentes parties du Vietnam. Voilà pour mes premières impressions : je pense que nous nous croiserons souvent pour évoquer, dans les colonnes de votre journal, notre partenariat commun.

Cao Hoàng Hoa/CVN

Rédactrice en chef : Nguyễn Hồng Nga

Adresse : 79, rue Ly Thuong Kiêt, Hanoï, Vietnam

Permis de publication : 25/GP-BTTTT

Tél : (+84) 24 38 25 20 96

E-mail : courrier@vnanet.vn, courrier.cvn@gmail.com

back to top