Le Portugal se prépare à une ruée sur le lithium, le nouvel "or blanc"

"Plus on creuse, plus on en trouve", se réjouit David Archer au pied d'une grue de forage qui, dans un bruit assourdissant, perfore la roche granitique des monts reculés du Nord du Portugal afin d'en mesurer la teneur en lithium, devenu un "or blanc" depuis que la demande de batteries électriques explose.

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Un ouvrier travaille sur un forage de lithium à la mine de Barroso à Boticas dans le Nord du Portugal, le 3 septembre.

La société minière britannique qu'il dirige, Savannah Resources, espère ouvrir en 2020 "la première mine importante de lithium en Europe", déclare-t-il sur les hauteurs de Boticas, dans la région de Vila Real. Lundi encore, Savannah a annoncé avoir revu l'estimation des gisements de Mina do Barroso en hausse de 44%, à 20,1 millions de tonnes de minerai d'une teneur en lithium de 1,04%.

À 25 kilomètres de là, dans la commune voisine de Montalegre, la société portugaise Lusorecursos prétend elle aussi être assise sur "le plus important gisement de lithium en Europe", soit 30 millions de tonnes de minerai d'une teneur de 1,09% qu'elle compte commencer à extraire en 2020 également, selon son directeur financier Ricardo Pinheiro. "L'explosion de la filière de la batterie a provoqué un véritable engouement pour le lithium" et sa valeur marchande a triplé en trois ans, explique Lucas Bednarski, directeur de l'entreprise d'études de marché spécialisée Lithium Today.

Réduire la dépendance européenne

Ce métal de couleur blanche argentée, qui sert déjà à fabriquer les batteries lithium-ion utilisés dans les téléphones et ordinateurs portables, sera de plus en plus recherché en raison du développement de la voiture électrique, qui a besoin de batteries bien plus puissantes.

David Archer, Pdg de la société minière britannique Savannah Resources, prend une photo de la mine de Barroso à Boticas dans le Nord du Portugal, le 3 septembre.

"Le lithium pourrait valoir de l'or pour le Portugal, puisque nous estimons qu'en 2025 le marché européen des batteries vaudra 250 milliards d'euros par an", fait valoir le vice-président de la Commission européenne chargé de l'Énergie, Maros Sefcovic. Le commissaire slovaque porte depuis près d'un an un projet de filière capable de construire au sein de l'UE une nouvelle génération de batteries électriques "vertes", recyclables et réutilisables. Première étape: réduire la dépendance en composants. Or l'Europe importe 86% du lithium qu'elle consomme, produit pour l'essentiel au Chili et en Australie.

Le Portugal est déjà le principal producteur européen, avec une part de marché de 11%, mais sa production sert entièrement à la céramique et à la verrerie. "Nous savons que le Portugal possède les plus importants gisements en Europe. La question est de savoir si c'est économiquement viable de l'extraire, car il s'agit d'un marché mondial très compétitif", souligne Lucas Bednarski. D'après ses estimations, la production de lithium extrait de la roche granitique portugaise coûte environ 2,5 fois plus chères que celui produit à partir des gisements de saumure chiliens.

Appel d'offres international

"On assiste à une ruée vers l'or blanc dans plusieurs régions du monde. Pour l'Europe et son secteur automobile, l'idée d'une chaîne d'approvisionnement allant du minerai à la voiture électrique est très attrayante", relève Howard Klein, du cabinet de conseil en investissement new-yorkais RK Equity.

Un assistant géologue marque les roches extraites de la mine de Barroso à Boticas dans le nord du Portugal, le 3 septembre.

Au Portugal, la course est déjà lancée avec les projets de Boticas et Montalegre, qui espèrent obtenir dans les prochains mois le feu-vert définitif des investisseurs et des autorités. Et, d'ici la fin de l'année, le gouvernement lancera un appel d'offres international pour attribuer les droits de prospection d'une dizaine d'autres gisements potentiels afin de répondre au "grand appétit des investisseurs" qui ont formulé une quarantaine de demandes depuis 2016, a indiqué le secrétaire d'État à l'Énergie, Jorge Seguro Sanches.

Mais l'État portugais ne veut plus se limiter à recevoir les royalties de l'activité d'extraction. "Nous voulons saisir l'occasion de développer des secteurs industriels liés à la transformation du minerai, à la fabrication de batteries, au secteur automobile ou aux énergies renouvelables", a précisé M. Seguro Sanches. À Mina do Barroso, Savannah Resources compte produire un concentré de minerai riche en lithium pour l'exporter. Le projet de Lusorecursos à Montalegre est plus ambitieux puisqu'elle entend construire une usine capable de transformer ce minerai avant de le vendre à la filière de la batterie.

AFP/VNA/CVN

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