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Un entrepôt Amazon à Romeoville, en août 2017 dans l'Illinois. |
Un entrepôt Amazon à Romeoville, en août 2017 dans l'Illinois. |
"C'est une bataille folle pour trouver un emplacement adapté pour les clients", explique Michael Schipper, du courtier Blau & Berg, spécialiste de l'immobilier commercial dans le New Jersey et à New York, "pour dénicher un bien à vendre".
Le taux d'espace libre ne cesse de chuter depuis un an et demi, et atteint désormais 3,4%, bien qu'aient été livrés plus de huit millions de mètres carrés de nouveaux entrepôts au premier trimestre 2022, selon la société immobilière Jones Lang LaSalle.
La demande est telle qu'en six ans seulement, les prix à l'achat ont été multipliés par 3 ou 4 dans la région que couvre Michael Schipper, au nord du New Jersey. À la location, le tarif moyen a augmenté de 22% aux États-Unis en deux ans, selon le cabinet Beroe.
"La logistique et la distribution pour le commerce électronique sont les catalyseurs de ce besoin d'espace sur le marché américain", indique Beroe, qui précise que la demande dépasse l'offre depuis 18 mois.
"Last mile"
En outre, à la différence des sites de stockage traditionnels, la préparation des commandes passées sur internet nécessite des entrepôts avancés technologiquement, souligne Mark Manduca, responsable de l'investissement chez GXO, qui propose des solutions logistiques aux entreprises.
Ces équipements, qui requièrent des investissements massifs, permettent "d'améliorer l'efficacité d'un site et d'accélérer les activités de l'entrepôt pour répondre à la demande de livraison le jour même", explique Beroe.
Inventée par Amazon, la nouvelle norme de la livraison immédiate s'est imposée aux grands concurrents du géant de Seattle, qui ont dû s'aligner.
Derrière le géant de Seattle, "beaucoup d'entreprises ont accéléré le développement de leur offre en ligne", souligne Mark Manduca. "Ce sont elles qui tirent la demande d'entrepôts pour le dernier kilomètre", le "last mile", c'est-à-dire qui permettent de desservir directement la destination finale.
La tyrannie de la livraison instantanée a ainsi obligé de nombreuses marques à multiplier les lieux de stockage pour se rapprocher des clients, en particulier dans des zones urbaines où l'immobilier était déjà cher.
La pandémie a stimulé un mouvement qui était déjà à l’œuvre, en faisant bondir de 56% le chiffre d'affaires du commerce électronique entre début 2020 et début 2022.
Bientôt une correction ?
Autre effet COVID, la grande pagaille logistique provoquée par les confinements et restrictions sanitaires. "On a eu des containers aux mauvais endroits, des problèmes d'approvisionnement et, plus récemment, des stocks trop importants", rappelle Mark Manduca.
Pour limiter ces risques, dit-il, beaucoup d'entreprises "cherchent des lieux de production plus proches" de leurs marchés, "ce qui augmente la demande d'entrepôts".
"Nous observons un bond des sociétés qui augmentent leurs stocks pour atténuer les problèmes d'approvisionnement" et cherchent donc des espaces supplémentaires pour les entreposer, a déclaré, en avril, Jon Gray, le numéro deux de la société d'investissement Blackstone.
Blackstone a investi massivement dans le secteur, et possède actuellement pour 170 milliards d'USD d'entrepôts. Il rivalise désormais avec Prologis, le numéro un mondial.
D'autres géants du capital-investissement, tels KKR, Carlyle, Apollo ou le Suédois EQT ont tous racheté des sites pour surfer sur la vague du "warehousing" (stockage en entrepôt).
"Les perspectives du marché des entrepôts sont positives à long terme, mais il va falloir faire une pause", prévient Michael Schipper, selon qui le resserrement des conditions de crédit, en cours actuellement, pourrait jouer. "Vous ne pouvez pas continuer sur cette trajectoire indéfiniment".
Parmi les signes d'une possible correction, la décision d'Amazon de sous-louer ou renégocier le loyer de plus de 2,7 millions de m² d'entrepôts.
"Vous allez voir la demande baisser et les loyers stopper leur hausse à ce rythme", a prévenu, dans le Wall Street Journal, Ward Fitzgerald, directeur général d'EQT Exeter, filiale d'EQT.
"La question", selon Michael Schipper, "c'est combien, et pendant quelle durée. Personne n'a la réponse".