>>Et si elle passait... que ferait la France anti-FN ?
>>Nord-Pas-de-Calais : enquête préliminaire pour soupçons d'emplois fictifs au FN
>>Marine Le Pen lance son année présidentielle en Haute-Marne
La présidente du Front national, Marine Le Pen, et le secrétaire général du parti, Nicolas Bay, tous deux eurodéputés, au Parlement européen, le 5 avril 2017 |
En janvier 2014, avant même le triomphe frontiste aux européennes, le gendarme antifraude de l'Union européenne, l'Olaf, ouvre une procédure après une lettre anonyme sur des soupçons d'emploi fictif d'assistants parlementaires par l'eurodéputée Marine Le Pen depuis 2009. L'affaire change d'ampleur en mars 2015, lorsque le président du Parlement européen de l'époque, le socialiste allemand Martin Schulz, saisit l'Olaf et la justice française concernant une vingtaine d'assistants apparaissant sur l'organigramme du parti d'extrême droite.
Le Parlement a lancé des procédures de recouvrement pour un total de 1,1 million d'euros concernant six eurodéputés FN, dont Marine Le Pen (340.000 euros). En décembre, les juges d'instruction ont pris le relais de l'enquête préliminaire du parquet de Paris.
Avant 2014, les "vases communicants" ?
Les enquêteurs ont mis la main sur un courriel du 13 septembre 2012 adressé au trésorier du parti, Wallerand de Saint Just, et à une salariée du cabinet d'experts-comptables qui sert de tiers-payant pour les salaires d'assistants parlementaires, a appris l'AFP de source proche du dossier. L'auteur, Charles Van Houtte, personnage central dans l'organisation du FN à Bruxelles, écrit: "Voici les modifications à apporter aux différents contrats, suite à la réunion qui a eu lieu à Strasbourg (...) Wallerand, Marine demande que vous informiez les salariés".
Le mail détaille des "vases communicants pour ne pas dépasser le budget de 21.209 euros de dotation" mensuelle par eurodéputé : "CDI de Yann" Maréchal Le Pen, chargée des grands événements au FN, "sur BG (Bruno Gollnisch, NDLR) à partir du 1er mai 2012. Pas possible de la mettre sur autre contrat". Suit le descriptif de ce qui ressemble à un jeu de chaises musicales entre assistants et eurodéputés avec, en pièce jointe, un tableau où apparaissent ces projections.
"Il est normal que les budgets alloués aux parlementaires soient utilisés. Tout ça n'apporte en aucun cas la moindre preuve que ces gens n'ont pas travaillé comme assistants parlementaires", a réagi M. de Saint Just, interrogé par l'AFP. Pour lui, ce courriel recense des préconisations, pas forcément suivies de modifications contractuelles. Contacté, M. Van Houtte n'a pas répondu.
Le siège du FN à Nanterre en banlieue parisienne, lors d'une perquisition par la police, le 20 février 2017. |
Après 2014, un nouveau tableau ?
Mai 2014, après les élections, le FN passe de trois à 24 eurodéputés. Les enquêteurs ont saisi une lettre potentiellement cruciale. "Dans les années à venir et dans tous les cas de figure, nous ne nous en sortirons que si nous faisons des économies importantes grâce au Parlement européen et si nous obtenons des reversements supplémentaires", écrit le 16 juin 2014 Wallerand de Saint Just à Marine Le Pen.
L'argentier du FN assure aujourd'hui que les économies attendues portaient sur les salariés du parti devenant eurodéputés, dont les contrats de travail s'interrompraient. Plusieurs autres documents saisis font état d'"économies avec européennes" ou "dues aux députés européens".
Aymeric Chauprade, élu à Strasbourg en 2014 mais qui a depuis rompu avec Marine Le Pen, affirme que la présidente du FN a demandé aux eurodéputés lors d'une réunion le 4 juin 2014 qu'ils embauchent chacun au moins un assistant parlementaire pour le parti. "Un affabulateur", a répondu la candidate à la présidentielle.
AFP/VNA/CVN