>>L'accord post-Brexit approuvé par les députés britanniques
>>À la veille de la rupture, ultimes débats et signatures pour l'accord post-Brexit
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, pose avec l'accord post-Brexit signé à Bruxelles, le 30 décembre. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
À 23h00 locales et GMT (minuit à Bruxelles), le Brexit devient réalité pour le pays, sorti officiellement de l'UE le 31 janvier dernier mais ayant bénéficié d'une période de transition pour amortir le choc.
Si un vaste accord de libre-échange évitera une rupture trop abrupte, la libre circulation permettant aux marchandises comme aux personnes de passer sans entrave la frontière prendra fin.
Exportateurs et importateurs devront remplir des déclarations de douanes et risquent de voir leurs marchandises ralenties à la frontière par les contrôles. Les entreprises de la finance, secteur majeur à Londres, perdront leur droit automatique d'offrir leurs services dans l'UE et devront s'y établir pour continuer à exercer. Et les universités britanniques ne seront plus éligibles au programme d'échanges pour étudiants Erasmus.
"Ce n'est pas la fin" mais "le début d'une merveilleuse relation entre le Royaume-Uni et nos amis et partenaires de l'Union européenne", a assuré le Premier ministre Boris Johnson, grand artisan de cette sortie, après avoir paraphé le document, levant les deux pouces en l'air devant les objectifs.
"La destinée de ce grand pays réside à présent fermement entre nos mains", a-t-il ajouté plus tard dans la soirée.
Devant les députés quelques heures plus tôt, il avait vanté un "nouveau chapitre" pour le Royaume-Uni et émis l'espoir que ce cap permettrait de "passer à autre chose".
La tâche s'annonce délicate : les milieux économiques n'ont pas caché leurs craintes quant aux conséquences de ce bouleversement et les Britanniques sortent meurtris d'une période clivante.
Quelques jours pour se préparer
Depuis le référendum du 23 juin 2016, remporté à 51,9% par le "leave", il aura fallu trois Premiers ministres, des heures de houleux débats parlementaires nocturnes à Westminster et trois reports avant que le Royaume-Uni ne largue les amarres pour de bon.
À l'image de ce processus douloureux, ce n'est que la veille de Noël que les laborieuses négociations commerciales ont fini par aboutir à un accord de libre-échange, ne laissant que quelques jours pour mettre en oeuvre ses 1.246 pages.
Le texte a été signé mercredi par les dirigeants de l'UE puis, après un trajet en avion de la Royal Air Force, par Boris Johnson. Les deux chambres du Parlement britannique l'ont adopté par un examen express le même jour mais les eurodéputés ne se prononceront qu'au premier trimestre 2021, nécessitant une application provisoire.
Au grand soulagement de pans entiers d'économies très connectées, l'UE offre au Royaume-Uni un accès sans droits de douane ni quotas à son marché de 450 millions de consommateurs. Mais il prévoit pour éviter toute concurrence déloyale des sanctions et des mesures compensatoires en cas de non respect de ses règles en matière d'aides d’État, d'environnement, de droit du travail et de fiscalité.
Concernant la pêche, sujet difficile jusqu'aux dernières heures, l'accord prévoit une période de transition jusqu'en juin 2026, à l'issue de laquelle les pêcheurs européens auront progressivement renoncé à 25% de leurs prises. Un résultat qui a profondément déçu les pêcheurs britanniques, fers de lance du Brexit qui espéraient plus des promesses d'indépendance et de souveraineté retrouvée martelées par Boris Johnson.
Défi de rassembler
Des camions en l'attente à l'approche du port de Douvres, dans le Sud-Est du Royaume-Uni, le 28 décembre. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Londres et Bruxelles évitent in extremis les conséquences potentiellement dévastatrices d'un "no deal" : longues files de camions sur les routes menant vers les ports transmanches, coûts considérables pour les importateurs et eaux respectives interdites aux pêcheurs.
C'est donc une victoire pour Boris Johnson, triomphant dans les urnes sur la promesse de réaliser le Brexit mais depuis mis en difficulté par la pandémie de COVID-19. Il n'avait pas besoin d'une nouvelle crise : les hôpitaux britanniques se trouvent au bord de la rupture et les contaminations par le nouveau coronavirus continuent de s'envoler. Une grande partie de la population a été reconfinée, assombrissant encore les perspectives pour une économie frappée par sa pire crise en 300 ans.
Au delà de la pandémie, les défis sont considérables pour le gouvernement de Boris Johnson, qui a promis de donner au Royaume-Uni une nouvelle place dans le monde, résumée par le slogan "Global Britain".
Il s'apprête cependant à perdre un allié de poids avec le départ de Donald Trump, fervent partisan du Brexit remplacé à la Maison Blanche par le démocrate Joe Biden, plus europhile.
À l'intérieur, il doit rassembler des Britanniques qui se sont déchirés sur le Brexit, au point de voir l'unité du pays se fissurer, l'Irlande du Nord et l'Ecosse ayant voté en majorité contre la sortie de l'UE.
"Il y a maintenant un siège vide à la table de l'Europe. Il ne le restera pas longtemps", a clamé le député indépendantiste écossais Ian Blackford mercredi 30 décembre, dont le parti, le SNP, réclame un nouveau référendum d'autodétermination.
AFP/VNA/CVN