La Turquie s'apprête pour la première fois depuis deux ans à hausser les taux

La Turquie s'apprête à abandonner jeudi 22 juin des années de politiques économiques non conventionnelles promues par le président turc Recep Tayyip Erdogan et de drastiquement augmenter les taux d'intérêt pour endiguer l'inflation et stabiliser la livre turque.

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La livre turque a chuté de plus de 7% et atteint de nouveaux records à la baisse par rapport au dollar et à l'euro.
Photo : AFP/VNA/CVN

Le chef de l'État turc a affirmé que sa conviction sur la nécessité de baisser les taux "reste inchangée". Il a néanmoins laissé entendre qu'il a donné son accord pour une hausse des taux.

À rebours des théories économiques classiques, M. Erdogan, réélu fin mai pour un troisième mandat, estime que les taux d'intérêt élevés favorisent l'inflation.

Lors de deux dernières années, il a contraint la Banque centrale turque à baisser les taux dans le cadre d'un "nouveau modèle économique" privilégiant la croissance et la création d'emplois.

Mais ce choix a contribué à la flambée de l'inflation qui atteint près de 40% sur un an selon les chiffres officiels, ainsi qu'à la chute de la livre turque, qui a perdu plus de 80% de sa valeur par rapport au dollar en cinq ans.

Les économistes indépendants contestent le taux officiel de l'inflation et l'estiment à plus de 100%.

Ils critiquent aussi la Banque centrale turque pour avoir dépensé près de 30 milliards d'USD pour soutenir la monnaie nationale entre le 1er janvier et le scrutin présidentiel, envoyant ses réserves de change en terrain négatif pour la première fois depuis 2002.

"Mesures rationnelles"

Le chef de l'État a donné des signes d'un possible retour à des politiques plus conventionnelles depuis sa réélection, en nommant notamment un ancien économiste de la banque américaine Merrill Lynch, Mehmet Simsek, au ministère de l'Économie, et une ancienne cadre de Wall Street, Hafize Gaye Erkan, à la tête de la banque centrale.

Lors de sa prise de fonctions, M. Simsek, déjà ministre de l'Économie (2009-2015) puis vice-Premier ministre chargé de l'Économie (jusqu'en 2018), a prévenu qu'il faudrait revenir à des "mesures rationnelles" pour redresser l'économie turque.

M. Erdogan a plusieurs fois invoqué dans le passé les préceptes de l'islam, qui interdit l'usure, et affirme que les taux d'intérêt élevés sont promus par un "lobby" étranger.

Il a cependant affirmé mercredi dernier avoir "accepté" que sa nouvelle équipe puisse prendre des mesures qui contredisent ses convictions.

Les analystes estiment qu'une forte hausse du taux directeur, actuellement stable à 8,5% depuis fin février, pourrait aider à redresser l'économie turque.

Début juin, la livre turque a chuté de plus de 7% et atteint de nouveaux records à la baisse par rapport au dollar et à l'euro.

La monnaie turque s'échangeait mercredi autour d'un dollar pour 23,6 livres à la veille de la décision attendue de la Banque centrale.

Champ d'action restreint

Les analystes sont divisés sur la forme que la hausse des taux pourrait prendre.

Selon l'économiste Clemens Grafe, de Goldman Sachs, "un responsable conventionnel hausserait les taux à 40%, le niveau des taux réels en vigueur".

JPMorgan et Bank of America prévoient de leur côté une hausse à 25%.

La nouvelle équipe en charge de l'économie donne des signes d'une approche plus lente, estime cependant Capital Economics.

"La chute de la livre turque semble déjà être arrêtée", indique le cabinet basé à Londres.

La nomination de M. Simsek et de Mme Erkan avait été applaudie par les marchés.

Mais des observateurs craignent que le champ d'action de la nouvelle équipe soit à court terme restreint par le président turc qui a fait valser dans le passé plusieurs ministres et gouverneurs de la banque centrale lorsque ceux-ci contredisaient ses décisions.

L'un des programmes les plus coûteux en Turquie implique un système de protection des dépôts bancaires que M. Erdogan a déployé fin 2021. Il engage le gouvernement à couvrir toute perte subie par les dépôts en livres turques du fait de la dépréciation de la monnaie.

Cela signifie qu'un retour rapide à un taux de change flottant pourrait peser encore plus lourdement sur le budget tendu.

Beaucoup s'attendent à ce que M. Simsek supprime progressivement le programme.

Le président turc a affirmé mercredi 21 juin qu'il faisait confiance à ses nouvelles nominations. "Nous avons mis en place une équipe solide, harmonieuse et compétente", a-t-il déclaré.

AFP/VNA/CVN

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