>>Au Maroc, "l'eau solaire" pour faire aider les paysans
>>Au Maroc, les oasis toujours plus menacées par l'avancée du désert
Une vue d’une rue dans la ville marocaine de Tanger. |
Peintures murales, façades colorées, ruelles fleuries... «L’idée est venue des habitants, sans l’intervention des partis politiques ou des associations», explique Rafih al-Kanfaoui, 33 ans, du quartier Ibn Battouta.
Progressivement, «le quartier a pris une allure que personne n’aurait imaginée», dit-il fièrement.
Dressés sur les hauteurs de la ville, les vieux arrondissements de Tanger manquent cruellement d’espaces verts. C’est ce qui a notamment poussé les habitants de treize quartiers à se mobiliser, répondant à l’appel de plusieurs initiatives citoyennes avant le lancement en novembre 2016 de la COP22 à Marrakech.
Sur des dizaines de mètres, les façades des maisons affichent désormais différentes couleurs et des pots de fleurs ont été posés devant les portes et aux fenêtres.
Initiative locale
Les ruelles du quartier de Ibn Battouta - du nom d’un célèbre explorateur originaire de Tanger - ont par exemple été repeintes en vert et violet et un passage pour chaise roulante a été aménagé.
«Nous nous sommes entraidés, hommes et femmes, enfants jeunes et vieillards, pour décorer» la ville, raconte Soufyane Abdel-Mottalib, 30 ans.
Ici, l’initiative a été financée par les habitants eux-mêmes. Quatre quartiers ont remporté en février des prix décernés par l’Observatoire de la protection de l’environnement et des monuments historiques de Tanger pour leurs projets respectifs.
«Ces projets ont changé la donne dans plusieurs quartiers marginalisés et montré qu’il était possible (pour les habitants) de se distinguer à l’échelle locale et nationale», se félicite un militant de la société civile à Tanger, Mohammed Salmoun.
Il affirme toutefois que les dirigeants locaux devraient prendre en main les véritables «problèmes environnementaux».
Les Vieux quartiers de Tanger, un «trésor» du Maroc. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Des usines se trouvent au sein même de quartiers résidentiels, le béton empiète de plus en plus sur les forêts environnantes et des décharges laissent s’échapper des gaz toxiques.
Pour le secrétaire général de l’Observatoire, Abdel Aziz al-Janati, le problème des déchets est une «marque de honte sur le front des responsables politiques».
Porte du Maroc vers l’Europe, l’Atlantique et la Méditerranée, Tanger est située sur le détroit de Gibraltar - l’une des trois principales voies maritimes au monde - et fut le théâtre d’une lutte d’influence entre les grandes puissances du XIXe siècle.
Une situation exceptionnelle qui attira, avec sa zone internationale (entre 1923 et 1956), une cohorte de personnalités étrangères en tout genre: artistes, espions, mondains, aventuriers ou exilés excentriques... qui ont fait la légende de la ville.
Tanger fut ensuite longtemps délaissée sous Hassan II, qui n’aimait pas ce Nord marocain, rebelle. La ville périclita lentement, livrée à l’économie de la contrebande et du haschich, à la lente dérive du chômage et à la lancinante question de la migration vers l’Europe.
«Tanger métropole»
Depuis l’accession au trône de Mohammed VI en 1999, la ville a retrouvé toute sa superbe grâce à une politique dynamique de développement économique de la région.
Le front de mer s’est hérissé de buildings, lui donnant des faux airs de Dubaï. Le centre-ville s’est métamorphosé, avec ses larges avenues aux trottoirs repeints de blancs et balayés par une armée de petites mains.
En septembre 2013, le roi, très attaché à la ville, a lancé «Tanger Métropole», un programme de développement urbain sur quatre ans pour un montant d’un milliard de dollars. Ce plan a pour principal objectif d’assurer une qualité environnementale, en délocalisant les usines dans des zones industrielles et en réglant le problème des odeurs des eaux usées notamment.
En attendant, les habitants de Tanger sont fiers de leur propre initiative qui a contribué à «sensibiliser l’opinion publique aux questions environnementales».
Ainsi, avec la diffusion de photos sur Facebook, des habitants d’autres villes marocaines à l’instar de Casablanca, capitale économique du Maroc, ont mis en place des initiatives similaires. Et une délégation de la ville minière de Khouribga (sud de Casablanca) s’est rendue à Ibn Battouta pour s’inspirer de son expérience, assurent ses habitants.
AFP/VNA/CVN