La difficile prise en charge de l’autisme au Vietnam

Aucun chiffre officiel n’a été communiqué sur le nombre d’enfants autistes au Vietnam. Mais une chose est sûre : ils sont de plus en plus nombreux à être atteints de ce trouble du développement. Une hausse qui s’explique sans doute aussi par des dépistages plus efficaces grâce au progrès de la médecine.

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Dans un centre de soin des enfants autistes.

«Dans ma famille, nous avons un garçon de 5 ans qui parle très peu, mais il pleure très souvent, et fait toujours pipi dans sa culotte. Il ne joue ni avec ses amis, ni avec ses jouets. Il préfère rester seul dans son coin à jouer avec mon téléphone. Comment faire pour l’aider ?». Ce genre de témoignages devient de plus en fréquent au Vietnam. De nombreux parents se rendent auprès des psychologues pour y chercher des conseils en vue de combattre l’autisme infantile.

160.000 enfants autistes en 2015

Au Vietnam, à l’heure actuelle, aucun recensement officiel sur l’autisme n’a été dévoilé. Il est donc impossible de communiquer le nombre exact d’enfants victimes de ce trouble du développement. Mais l’Association vietnamienne de la santé publique (VPHA) nous permet de nous faire une petite idée sur son évolution au sein du pays. Elle a estimé en 2015 à 160.000 le nombre d’enfants autistes. Et les psychologues pensent que ce chiffre est sans doute bien en deçà de la réalité. De nombreux hôpitaux s’alarment sur l’augmentation du nombre de cas dépistés.

Une autre étude, dévoilée en 2015 par l’hôpital central pédiatrique de Hanoi, montre que le nombre d’enfants autistes a quintuplé par rapport aux années 1990. Les médecins affirment que sur un échantillon de 10.000 enfants il n’y avait que 3 ou 4 cas d’autisme à cette période. Et toujours d’après ce même panel, il serait passé entre 15 et 20 l’an dernier.

D’après Thành Ngoc Minh, directeur du Département des maladies psychologiques à l’hôpital central pédiatrique de Hanoi, chaque année, son service accueille entre 400 et 500 enfants autistes. Un chiffre qui est en constante augmentation. «Nous recensons uniquement les cas dont la gravité de ce trouble du développement oblige les parents à recourir à des traitements hospitaliers. Les cas légers ne sont pas comptabilisés dans cette statistique», explique-t-il. À Hô Chi Minh-Ville, l’Hôpital municipal de l’orthopédie et du rétablissement fonctionnel fait le même constat. «En 2003, nous avons accueilli entre 2 et 3 enfants, et en 2012 ce chiffre a dépassé les 2.500», affirme Dô Trong Anh, directeur de cet hôpital.

Les enfants autistes de moins de deux ans qui bénéficient d’une intervention précoce peuvent s’intégrer normalement dans la société.

D’après les psychologues, alors que les causes de l’autisme ne sont pas encore clairement identifiées, la prévalence observée en bas âge inquiète les familles vietnamiennes. La plupart des parents ayant un enfant autiste manquent d’informations sur ce trouble. «La situation est pire dans les régions rurales, car là-bas très souvent, les parents tardent à détecter les symptômes», observe un psychologue à l’Hôpital central pédiatrique de Hô Chi Minh-Ville. Selon cet expert, la découverte tardive de ces signes et le retard dans le traitement de l’enfant peuvent aggraver le trouble.

Nécessité d’une intervention précoce

À l’hôpital central pédiatrique de Hô Chi Minh-Ville, plusieurs mères interrogées ont accepté de se confier à condition de préserver l’anonymat de leur enfant. «J’ai ressenti une succession de comportements étranges chez mon enfant lorsqu’il était âgé d’un an. Il préférait s’isoler. À ce moment-là, je pensais qu’il agissait de cette manière car il ressentait peut-être un manque d’affection. Quand il a soufflé sa deuxième bougie, j’ai décidé de l’emmener chez le psychologue et j’ai été très surprise d’apprendre sa maladie», explique la femme. «La psychologue m’a conseillé de consacrer plus de temps pour jouer avec lui. Mais malgré mes efforts, je ressens comme un fossé entre lui et moi, que je me force à briser pour pénétrer dans son monde», ajoute-t-elle.

Pour aider ces familles, le Réseau des autistes du Vietnam (Vietnam Autism Network, VAN), soutenu par le ministère vietnamien des Invalides de guerres et des Affaires sociales ainsi que le Réseau des autistes de l’ASEAN, a été fondé en 2013. Composée de plusieurs associations et antennes dans les villes autour de Hanoi, Hai Phong, Quang Ninh (Nord), Dà Nang, Thanh Hoa (Centre), Hô Chi Minh-Ville, ou encore de Bà Ria-Vung Tàu (Sud), l’organisation à but non lucratif a pour mission d’organiser les activités en faveur des enfants autistes, et bien sûr d’aider les parents.

En 2015, le VAN et le Centre d’initiatives du secteur de la santé et de la population ont créé un logiciel de diagnostic de l’autisme, intitulé A365. Ce projet a été rendu possible également grâce au soutien financier du Fonds canadien d’initiatives locales (Grand Challenges). L’A365 aidera les parents comme les cadres sanitaires à déceler de manière précoce les troubles susceptibles d’indiquer une situation d’autisme. Ainsi, des programmes de traitement adéquats pourront être lancés. «Il s’agit d’abord d’identifier les cinq symptômes principaux reconnus par les médecins», souligne le Professeur-Docteur Nguyên Thi Hoàng Yên, du ministère de l’Éducation et de la Formation. Il faut savoir que ce logiciel favorisera également la prise de contact entre les parents et le VAN.

«Selon les recherches, les enfants autistes de moins de deux ans qui bénéficient d’une intervention précoce peuvent s’intégrer normalement dans la société. Ainsi, l’école doit mettre en place le plus tôt possible des aides spécifiques à destination de ces enfants touchés par l’autisme», souligne Nguyên Thi Thanh Thuy (ville de Hai Phong), enseignante et coordinatrice du VAN, et qui a un enfant autiste âgé de 11 ans.


Linh Thao/CVN

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