La Chine, un colosse inamical

"La Chine est plutôt un colosse inamical qu'un voisin amical", telle est l'observation de David Koh, conseiller indépendant et ancien membre de haut rang de l'Institut d'étude de l'Asie du Sud-Est (ISEAS), lequel étudie le Vietnam depuis plus de deux décennies.

David Koh a raison, car la réalité montre que début mai 2014, la Chine a implanté avec arrogance la plate-forme de forage Haiyang Shiyou - 981 en pleine zone économique exclusive du Vietnam. Pour la protéger, la Chine a envoyé une centaine de navires de toutes catégories, dont des navires de guerre et des avions de combat.

Le Docteur David Koh, conseiller indépendant et ancien membre de haut rang de l'Institut d'étude de l'Asie du Sud-Est (ISEAS).

Ces agissements peuvent être un pas pour conforter les déclarations de Pékin sur sa prétendue souveraineté en Mer Orientale, mais ils vont à l'encontre de son ambition de renforcer et d'instaurer la confiance dans la région et dans le monde. La Chine semble prête à régler les différends en Mer Orientale à sa manière. Ses agissements posent également une sérieuse interrogation sur ses objectifs plus généraux dans sa politique à l'égard de ses voisins. Mais c'est surtout une démonstration du gouffre entre ses paroles et ses actes, qui diminue sérieusement la confiance à son égard de ses voisins, et conduit à un recul des perspectives de la coopération. Cela remet aussi en cause les efforts de ce pays pour construire l'image d'une Chine positive et responsable. En d'autres termes, ces récents agissements de Pékin vont à l'encontre des derniers efforts de porter une "branche d'olivier" vers les pays aséaniens.

En octobre 2013, le Premier ministre chinois Li Keqiang a participé au Sommet ASEAN-Chine au Brunei et à la cérémonie de célébration du 10e anniversaire des relations de partenariat stratégique ASEAN-Chine. Sur le Code de conduite en Mer Orientale (COC), Li Keqiang déclarait alors que "la Chine travaillera avec les pays aséaniens pour accélérer le processus d'élaboration du COC de manière positive et prudente, sur la base du principe du consensus. En attendant un mécanisme pour régler de manière satisfaisante les différends, les parties concernées se doivent de coopérer positivement, c'est-à-dire dans le sens d'une co-exploitation".

En outre, Li Keqiang avait alors avancé un projet de coopération en sept points, notamment : "Primo, les deux parties examinent la possibilité de signer un traité de bon voisinage, d'amitié et de coopération. S'il y a un consensus pour parvenir à sa signature, ce traité donnera un statut juridique à la coopération stratégique bilatérale". D'autre part, il avait aussi appelé "à la paix et à l'amitié" en Mer Orientale, ajoutant que "nous devons travailler d'un seul cœur pour faire de la Mer Orientale une zone de paix, d'amitié et de coopération".

Ces déclarations du Premier ministre chinois, qui semblent répondre à la devise "Bons amis, bons voisins et bons partenaires", auraient pu être discutées et promues par les dirigeants de l'ASEAN lors du 24e Sommet de l'ASEAN qui vient de se tenir au Myanmar, mais les actes perpétrés par la Chine au mépris du droit international contredisent une telle démarche puisqu'ils ont entraîné un regain des tensions dans la région et porté atteinte à la confiance envers Pékin. En outre, l'examen par l'ASEAN de l'initiative avancée en octobre 2013 par le président chinois Xi Jinping, celle d'établir la "Route de la soie sur la mer au 21e siècle", pourrait bien être remis en cause.

Pourquoi la Chine trouble-t-elle la stabilité en Mer Orientale ?

Un navire chinois cherche à empêcher le navire des Garde-côtes du Vietnam.
Un navire chinois cherche à empêcher le navire des Garde-côtes du Vietnam.

Autre conséquence de ces agissements insupportables de la Chine, c'est de rappeler à nouveau aux pays ayant un différend de souveraineté avec la Chine la difficulté qu'il y a de répondre aux méthodes d'accès qu'elle emploie.

Des membres de l'ASEAN ont cherché, sinon à régler, tout au moins à diminuer les tensions en Mer Orientale avec la Chine de leur propre manière, pour finalement tous constater que Pékin, de jour en jour, se révèle de moins en moins coopératif et de plus en plus provocateur. Les Philippines ont ainsi proposé un arbitrage international pour statuer sur la revendication chinoise si particulière de "ligne des neuf tronçons". Le Vietnam a recouru à des discussions de niveau bilatéral, avec, entre autres, l'établissement d'une ligne rouge entre les dirigeants de haut rang des deux pays et la signature d'un accord en principe avec Pékin.

La Chine s'inscrit désormais en contrecourant des principes de ses relations avec le Vietnam. Le vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères du Vietnam, Pham Binh Minh, a eu une conversation téléphonique avec le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi et le conseiller des affaires d'État Yang Jiechi pour protester contre ces derniers évènements, indiquant à cette occasion que le Vietnam prendra "toutes mesures nécessaires et appropriées pour protéger ses droits et ses intérêts légitimes" en Mer Orientale.

Pourquoi la Chine trouble-t-elle la stabilité en Mer Orientale ? Selon le spécialiste Grigory Lokshin de l'Institut des études d'Extrême-Orient (Russie), elle cherche par tous moyens d'assoir ses revendications de souveraineté absurdes sur la Mer Orientale en vue d'atteindre son objectif militaire stratégique d'évincer les États-Unis de cette zone maritime, sans considération de l'aggravation des tensions comme des risque de dégénérescence en un conflit armé dans la région. C'est une attitude que très peu de pays du monde peuvent se permettre d'adopter...  

Rédactrice en chef : Nguyễn Hồng Nga

Adresse : 79, rue Ly Thuong Kiêt, Hanoï, Vietnam

Permis de publication : 25/GP-BTTTT

Tél : (+84) 24 38 25 20 96

E-mail : courrier@vnanet.vn, courrier.cvn@gmail.com

back to top