La Catalogne dans l'impasse après une offensive judiciaire contre les indépendantistes

La Catalogne a replongé dans l'impasse politique samedi 24 mars après l'échec de l'investiture à la présidence régionale de Jordi Turull, incarcéré la veille lors d'une offensive judiciaire contre le noyau dur des dirigeants indépendantistes.

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Manifestation indépendantiste à Barcelone, le 23 mars 2018. 

"Le candidat à la présidence de la Generalitat (exécutif catalan) est en prison avec d'autres députés de cette chambre", a constaté le président du parlement catalan, Roger Torrent, à l'ouverture des débats qui auraient dû aboutir à la désignation du nouveau chef de l'exécutif régional. "Il est évident que dans ces conditions la session ne peut pas avoir lieu".

C'est la troisième fois que les indépendantistes, qui disposent de la majorité absolue au parlement, échouent à faire investir un nouveau chef en raison de décisions de justice, après Carles Puigdemont, exilé en Belgique, et l'activiste Jordi Sanchez, incarcéré.

S'ils n'y arrivent pas avant le 22 mai, de nouvelles élections seront automatiquement convoquées. Et tant qu'un président régional ne sera pas désigné, la Catalogne restera sous la tutelle de Madrid, qui a pris cette mesure après la déclaration d'indépendance mort-née du 27 octobre.

Dans le cas de M. Turull, un premier vote d'investiture avait eu lieu jeudi 22 mars, mais il n'avait pas réussi à l'emporter faute de l'appui du parti séparatiste le plus radical. Il devait se soumettre ce samedi à un deuxième vote.

"Attaque" contre la démocratie Mais vendredi 23 mars, le juge de la Cour suprême chargé de l'enquête sur la tentative de sécession d'octobre a inculpé 25 responsables séparatistes, dont 13 pour "rébellion", une infraction passible d'un maximum de trente ans de prison.

Ce chef d'inculpation est très controversé car il suppose l'existence d'un "soulèvement violent" qui, selon de nombreux juristes, ne s'est jamais produit.

Le magistrat a envoyé en détention préventive cinq indépendantistes, dont Jordi Turull, élevant à neuf le nombre total de responsables politiques indépendantistes incarcérés.

"Ce qui s'est passé hier est une attaque au coeur de la démocratie", a estimé le président du parlement catalan Roger Torrent, dénonçant "une situation d'injustice, de régression et de répression".

Vendredi soir 23 mars, 37 personnes ont été légèrement blessées dans les rues de Barcelone lors de manifestations contre la décision du magistrat.

Le juge a aussi lancé des mandats d'arrêt internationaux contre six dirigeants indépendantistes partis à l'étranger, dont l'ancien président régional Carles Puigdemont.

L'ancien président régional Carles Puigdemont.

"Échec collectif" 

Le sort de celui-ci, qui se trouvait en Finlande depuis jeudi 22 mars pour y rencontrer des parlementaires et participer à un séminaire, a connu samedi 24 mars un énième rebondissement. Dans la matinée, la police finlandaise s'était dite prête à l'arrêter, mais l'un des députés finlandais qui l'avait accueilli a annoncé dans l'après-midi sur Twitter que M. Puigdemont avait "quitté la Finlande vendredi soir 23 mars par des moyens inconnus pour Bruxelles".

"Le président Puigdemont m'a aussi confirmé aujourd'hui qu'il coopérera totalement avec les autorités en Belgique", a ajouté Mikko Karna. Le Bureau national finlandais des enquêtes criminelles n'était pas en mesure de confirmer si M. Puigdemont avait quitté ou non le pays.

"Je confirme que le président Puigdemont n'est plus en Finlande", a twitté dans la soirée son avocat Jaume Alonso Cuevillas, sans préciser où se trouvait l'indépendantiste.

Dans l'hémicycle du parlement catalan, la chef de file du parti anti-indépendantistes Ciudadanos a appelé samedi 24 mars ses rivaux à abandonner le processus d'indépendance et leur a reproché d'avoir bafoué les lois en organisant le référendum d'autodétermination interdit du 1er octobre.

"Ce processus a été un échec collectif de toute la Catalogne (...) Il faut réellement que vous vous posiez la question: à quoi a servi le processus?", a-t-elle lancé, rappelant la division sociale et l'incertitude économique provoqués dans cette dynamique région de 7,5 millions d'habitants, qui fournit environ 20% du PIB espagnol."Il faudra recoudre la société, sans excès de reproches ou de critiques", écrit Marius Carol le directeur du quotidien catalan La Vanguardia, estimant que la décision judiciaire de vendredi 23 mars"ne contribue pas à trouver une sortie, c'est tout le contraire".

AFP/VNA/CVN

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