Judo
Invaincu depuis près d'une décennie, Riner tombe à Bercy

Stupeur à moins de six mois des JO-2020 : Teddy Riner, qui brigue un troisième sacre olympique historique à Tokyo, a été battu pour la première fois depuis plus de neuf ans, dès le troisième tour du prestigieux tournoi de Paris dimanche 9 février. Mais il ne s'affole pas.

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Le Français Teddy Riner face au Japonais Kokoro Kageura, le 9 février au tournoi de Paris.

C'est le No2 japonais Kokoro Kageura, par ippon en prolongation, qui a mis un terme à la vertigineuse série de 154 combats remportés consécutivement par le double champion olympique en titre des poids lourds et décuple champion du monde (huit fois en +100 kg, deux fois en toutes catégories). Et à neuf ans et demi de domination sans partage sur la catégorie reine.

Riner (30 ans) ne s'était plus incliné depuis le 13 septembre 2010. C'est un autre Japonais, Daiki Kamikawa, qui était jusque-là le dernier à l'avoir fait plier, en finale des Mondiaux toutes catégories à Tokyo, sur décision des arbitres après prolongation. Cette défaite, qui plus est face à un adversaire nippon et par ippon, interpelle à six mois à peine de son défi olympique historique au pays du judo. Seul le Japonais Tadahiro Nomura, en poids légers, a pour l'instant réalisé l'exploit de devenirs triples champions olympiques (1996, 2000 et 2004).

"Comme un uppercut"

"Quand je l'ai vu tomber, ça m'a fait très bizarre, reconnaît son entraîneur à l'Insep Franck Chambily. J'étais choqué, comme si j'avais pris un uppercut." "Arrête, tu vas me faire de la peine", rigole à quelques pas Riner, souriant et "positive attitude" devant les journalistes.

"Si ça m'arrive aux Jeux, là, je serai vexé. Il vaut mieux que ça m'arrive maintenant. On a encore le temps, il reste encore cinq mois de préparation", dédramatise-t-il. "Et j'ai envie de vous dire autre chose : je suis déchargé d'une pression, parce que compter les combats pour aller chercher (le record) de Yamashita (203 victoires consécutives), c'est +relou+."

L'interrogation désormais, c'est de savoir si ce coup d'arrêt se cantonnera à un accident de parcours, ou s'il s'avérera plus sérieux. Ni Riner ni Chambily, qui envisagent deux à trois autres sorties avant la grand-messe tokyoïte, la première au Grand Prix de Rabat début mars, ne se voulaient alarmistes dimanche.

Fiche sur la carrière de Teddy Riner .

"J'ai envie de dire que c'est Teddy qui perd, pas le Japonais qui gagne", résume l'entraîneur en référence à la contre-attaque payante de Kageura. "C'est vrai que (le début de journée) était poussif. Il manque un peu de vélocité, de vivacité sur les jambes, il est un peu planté dans le tapis. Mais je pense qu'il aurait pris son envol. Il s'est fait piéger, c'est tout", complète-t-il. "Il faut comprendre pourquoi c'est arrivé, ce qui a manqué", se projette déjà Riner, en répétant sa détermination à "repartir au boulot", "de plus belle".

Lourd

Dès son entrée en lice dimanche matin 9 février, le double champion olympique est apparu statique et sur la réserve. Il est malgré tout venu à bout du modeste Hongrois Richard Sipocz, après plus de deux minutes de golden score, la prolongation après les quatre minutes réglementaires de combat, aux pénalités (3-2). Puis il a fait chuter l'Autrichien Stephan Hegyi (ippon). Mais, même devenu plus mobile et plus entreprenant, il a buté sur son premier adversaire de la journée d'un calibre supérieur.

Il faut dire que Riner, "encore un peu lourd" sur la balance selon Chambily, s'est fait très (trop ?) rare sur les tatamis depuis son deuxième sacre olympique, à Rio en 2016. Il a fait son grand retour - victorieux - après vingt mois sans compétition l'été dernier, au Grand Prix de Montréal début juillet. Puis il s'est imposé trois mois plus tard au Grand Slam de Brasilia.

Mais son automne a ensuite été perturbé par une côte cassée à l'entraînement après le tournoi brésilien. Ce qui l'a privé de judo environ un mois et l'a contraint à renoncer à deux autres compétitions prévues dans les semaines suivantes. Cette déconvenue, en tout cas, ne le dévie pas de son ambition ultime. "L'objectif, je l'ai toujours dit, c'est d'aller chercher la médaille d'or à Tokyo et de rentrer un peu plus dans l'histoire de mon sport", répète Riner, déjà le judoka le plus couronné de l'histoire au niveau mondial, hommes et femmes confondus.

"C'est peut-être un mal pour un bien, estime Chambily. Teddy, je le connais bien, il est revanchard." Si Riner a manqué ses retrouvailles avec le public parisien après sept ans d'absence, Romane Dicko (+78 kg) et Madeleine Malonga, championne du monde en titre en -78 kg, ont elles été couronnées reines de Bercy, comme Clarisse Agbegnenou (-63 kg) la veille.


AFP/VNA/CVN

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