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En France environ 70% des surfaces de blé tendre et près de 80% de celles d'orge d'hiver sont traitées par des fongicides SDHI. |
Le 15 avril, dans une tribune publiée dans Libération, des chercheurs (CNRS, INRA, Inserm) avaient pointé du doigt les pesticides SDHI (inhibiteurs de la succinate déshydrogénase), utilisés "à grande échelle" en agriculture pour détruire les moisissures qui se développent sur les céréales ou les fruits.
Cette substance vise "à bloquer une étape clé de la respiration des champignons, celle assurée par la succinate déshydrogénase (SDH). Or, les cellules de tous les êtres vivants respirent", expliquaient-ils. Selon leurs travaux, le blocage de cette enzyme SDH peut "entraîner à long terme, un changement de la structure de notre ADN: ce sont des phénomènes de modifications épigénétiques", qui peuvent provoquer la survenue de cancers.
Mais ces modifications, contrairement aux mutations génétiques plus généralement associées aux substances cancérogènes, "ne sont pas détectées, ni testées, au cours des tests de toxicité conduits avant la mise sur le marché des pesticides", dénonçaient-ils, appelant à suspendre l'utilisation de ces fongicides SDHI en attendant la réalisation de nouvelles expertises.
Quelques jours plus tard, l'agence sanitaire Anses annonçait la mise en place d'un "groupe d'experts dédiés" pour "examiner sans délai les éléments évoqués par les scientifiques lanceurs d'alerte". Mais pour Générations Futures, qui a salué le "courage" des chercheurs ayant publié la tribune, il ne faut pas attendre les résultats de ce groupe, certains produits de la classe SDHI étant "omniprésents" dans l'environnement et dans les aliments.
L'ONG pointe en particulier du doigt le boscalide, mettant en avant des analyses publiées ces dernières années ayant montré la présence de résidus de cette substance dans l'air, les eaux de surface et les aliments. Ainsi, selon un rapport de l'Agence européenne pour la sécurité alimentaire (EFSA) d'avril 2017, le boscalide est le pesticide le plus fréquemment retrouvé dans les aliments testés en Europe. Les résidus apparaissent notamment dans les échantillons de raisins, de blé, de bananes ou de poivrons.
Générations Futures a également épluché des analyses de produits alimentaires réalisées à son initiative ces dernières années. Résultat: en 2016, sur 15 mueslis non bios testés, 13 contenaient des résidus de boscalide et en 2015, sur 31 échantillons de salades, 22 étaient positives au boscalide.
"Générations Futures demande à l’Anses de suspendre immédiatement les autorisations de mise en marché des produits contenant du boscalide et autres SDHI, à titre conservatoire", a déclaré François Veillerette, porte-parole de l'association, insistant sur la nécessité de modifier les procédures d'homologation des pesticides. "Le radar ne détecte pas certains effets, donc il faut réparer le radar, moderniser le radar", a-t-il plaidé.
L'ONG réclame également à la France de s'opposer au renouvellement au niveau européen de la licence du boscalide qui arrive à échéance fin juillet. Selon la tribune des scientifiques, en France environ 70% des surfaces de blé tendre et près de 80% de celles d'orge d'hiver sont traitées par des fongicides SDHI. Sont également concernés semences, raisins et agrumes, ainsi que des pelouses, notamment celles des terrains de golf.