Inédit dans l'UE : Varsovie contre le Polonais Tusk

La Pologne a créé une situation inédite dans l'Union européenne en présentant samedi 4 mars un candidat au poste de président du Conseil européen contre le Polonais Donald Tusk, son titulaire sortant qui brigue un deuxième mandat.

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Le président du Conseil européen Donald Tusk, le 2 février 2017 à La Valette.

Le parti conservateur nationaliste au pouvoir dans son pays refuse en effet de soutenir cet ancien Premier ministre libéral.

"Le gouvernement polonais propose la candidature de (l'eurodéputé polonais, ndlr) Jacek Saryusz-Wolski au poste de président du Conseil européen", a annoncé le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué.

M. Tusk était jusqu'à présent le seul candidat déclaré à la présidence du Conseil. Son éventuelle reconduction aux fonctions qu'il occupe depuis deux ans devrait être examinée au prochain sommet européen à Bruxelles, jeudi 9 mars.

Selon des sources diplomatiques françaises, elle pourrait aussi être évoquée dès lundi 6 mars à Versailles au sommet des chefs d'État et de gouvernement de France, d'Allemagne, d'Italie et d'Espagne consacré à l'avenir de l'UE.

La candidature de Donald Tusk à un second mandat est souhaitable aux yeux d'une nette majorité d'États membres de l'UE. Celle de son rival, avancée à cinq jours seulement de la réunion du 9 mars, paraît vouée à l'échec.

"Il ne faudrait pas que M. Tusk soit victime de la volonté de son propre pays de l'écarter. Ce ne serait pas correct", a toutefois commenté une des sources françaises. "Tusk a une position très forte", a confirmé à l'AFP un diplomate européen.

Il a ajouté qu'étant le président en exercice du Conseil européen, M. Tusk n'avait pas besoin d'être nommé par un pays. Il lui suffit de confirmer sa volonté de briguer un deuxième mandat, ce qu'il a fait au récent sommet de Malte.

Jacek Saryusz-Wolski, 68 ans, siège depuis 2004 au Parlement européen, où il était membre du groupe du Parti populaire européen (PPE). Jusqu'à samedi 4 mars, il était aussi membre du principal parti d'opposition polonais, la Plateforme civique (centriste, PO).

En réaction immédiate à l'annonce faite par le gouvernement, la PO a décidé d'exclure M. Saryusz-Wolski de ses rangs, ce qui entraîne, ce qu'a confirmé le chef du PPE, Joseph Daul, son exclusion du Parti populaire européen.

Les conservateurs accusent

Juste avant l'annonce officielle, la direction politique du parti conservateur nationaliste Droit et Justice (PiS), au pouvoir en Pologne, a demandé à son gouvernement de "fermement" refuser son soutien à Donald Tusk.

Le PiS l'accuse d'avoir "violé le principe de neutralité face à un État membre de l'UE, la Pologne en l'occurrence". Selon PiS, M. Tusk a soutenu des projets et des décisions allant à l'encontre des intérêts polonais et apporté son appui à l'opposition.

Le chef du PiS, Jaroslaw Kaczynski, a longtemps été l'ennemi juré de Donald Tusk sur le plan politique national, mais depuis l'arrivée au pouvoir des conservateurs en Pologne en octobre 2015, il a formulé des critiques de plus en plus acerbes contre son compatriote dont le mandat expire en mai.

Sur le plan politique mais aussi personnel, M. Kaczynski accuse Donald Tusk de "responsabilité morale" pour la catastrophe aérienne de 2010 dans laquelle son frère jumeau, le président Lech Kaczynski, est mort en même temps que de nombreux autres hauts responsables polonais.

"Je ne puis imaginer qu'on soutienne un candidat qui lutte contre son propre gouvernement. Je ne puis imaginer non plus que les autres pays de l'Union européenne soutiennent un candidat qui n'a pas l'appui de son propre gouvernement", a déclaré samedi 4 mars le chef de la diplomatie polonaise Witold Waszczykowski.

Il a indiqué que le nouveau candidat polonais s'était rendu dès samedi 4 mars à Bruxelles et que lui-même allait y entamer dès dimanche 5 mars une action de "lobbying" en faveur de M. Saryusz-Wolski.

La Pologne toute seule n'a pas le pouvoir de bloquer la réélection de Donald Tusk à la tête du Conseil européen, celle-ci ne requérant que l'appui de la majorité qualifiée des États membres.

AFP/VNA/CVN

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