France
"Gilets jaunes": le préfet limogé, des manifestations interdites

Limogeage du préfet de police de Paris, interdictions de manifester et augmentation des amendes: Édouard Philippe s'est voulu ferme, lundi 18 mars, en annonçant plusieurs mesures après les violences et pillages survenus à l'occasion du 18e samedi de manifestations des "gilets jaunes".

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Edouard Philippe et Christophe Castaner lors d'une conférence de presse à Matignon, le 18 mars

Édouard Philippe a admis que "la stratégie que nous avions élaborée après le 1er décembre, de façon à répondre à ce déchaînement et à ce déferlement de violence, n'a pas été mise en œuvre dans des conditions satisfaisantes", lors du journal de 20h00 de France 2, après une première allocution en fin d'après-midi depuis Matignon. Le préfet de police de Paris, Michel Delpuech, régulièrement donné partant entre affaire Benalla et polémiques à répétition sur la gestion de l'ordre public dans la capitale, en a fait les frais.

Il est remplacé par Didier Lallement, jusqu'alors préfet de la région Nouvelle-Aquitaine, dont le chef-lieu Bordeaux est l'un des épicentres de la crise des "gilets jaunes" et de ses débordements hebdomadaires. M. Lallement, 62 ans, réputé pour avoir un caractère bien trempé, est une figure connue de l'exécutif, bien que n'ayant jamais exercé à la préfecture de police de Paris: influent secrétaire général du ministère de l'Intérieur de 2012 à 2014, il avait ensuite été nommé à la Cour des comptes.

Édouard Philippe a par ailleurs annoncé l'interdiction de manifester "chaque fois qu'il le faudra", dans les quartiers "les plus touchés", "dès lors que nous aurons connaissance d'éléments +ultras+ et de leur volonté de casser", en citant les Champs-Élysées à Paris, les places du capitole à Toulouse et Pey-Berland à Bordeaux - des mesures qui vont "dans le bon sens", selon le nouveau maire de Bordeaux, Nicolas Florian (LR). Le Premier ministre a encore indiqué avoir demandé à la Garde des Sceaux, Nicole Belloubet, de porter l'amende encourue en cas de participation à une manifestation interdite de 38 à 135 euros.

En déplorant que "des consignes inappropriées (aient) été passées pour réduire l'usage" des lanceurs de balle de défense (LBD) - selon lui non pas de la part du gouvernement, en visant implicitement la préfecture de police -, il a dit sa volonté de "renforcer la fermeté de notre doctrine de maintien de l'ordre". Interrogé lundi soir 18 mars sur les conséquences de nouvelles consignes d'aller davantage au contact, le Premier ministre a reconnu que "si nous avons une stratégie qui permet aux forces de l'ordre d'être plus mobiles, d'être plus dynamiques, d'être plus fermes, il y a plus de risques" de blessés.

"Jusqu'à présent, nous avons voulu faire très attention et nous voulons toujours faire très attention aux débordements, aux accidents, à la sécurité des personnes, mais nous constatons que le déchaînement de violence justifie une réponse ferme. Je l'assume, je l'explique", a-t-il souligné. Matignon avait reconnu dès dimanche 17 mars des "dysfonctionnements" du dispositif de sécurité face à une flambée de violence qui renvoie à un niveau de tension connu en décembre, avec le saccage de l'Arc de Triomphe.

"Trop simple"

Mais, pour l'une des porte-parole de LR, Lydia Guirous, "c'est trop simple et méprisant de s'en prendre aux policiers et au préfet Michel Delpuech qui sont sur le pont depuis 4 mois", a-t-elle estimé sur Twitter, en reprochant à Christophe Castaner d'avoir été "incapable de donner une ligne claire aux autorités de police".

Emmanuel Macron, son chef de cabinet Patrick Strzoda, le secrétaire général de l'Élysee Alexis Kohler font face à Edouard Philippe et Christophe Castaner, à l'Élysee le 18 mars.

Emmanuel Macron "a donné un permis de casser aux casseurs", a encore dénoncé le chef de file des sénateurs LR Bruno Retailleau, évoquant un "Notre-Dame-des-Landes sur les Champs-Élysées". "Ce ne sont plus les ministres qui assument la responsabilité d'un fiasco mais la hiérarchie administrative. Pourtant, Castaner est seul coupable du fiasco: démission!", a pour sa part fustigé le leader des Insoumis, Jean-Luc Mélenchon. Christophe Castaner et Mme Belloubet devront s'expliquer la semaine prochaine devant la commission des Lois à l'Assemblée nationale sur ces violences.

M. Castaner est également attendu devant le Sénat mardi, ainsi que Bruno Le Maire, son homologue pour l'Économie, lequel devra à nouveau répondre le lendemain devant les députés des conséquences économiques. M. Le Maire recevait en outre lundi après-midi 18 mars à Bercy des représentants des secteurs d'activités touchés, alors que le Premier ministre s'entretiendra mardi 19 mars avec la maire de Paris, Anne Hidalgo. 27 commerces ont été pillés et 124 dégradés samedi à Paris, selon Édouard Philippe.

Les dégâts liés aux manifestations des "gilets jaunes" en France ont été estimés à 170 millions d'euros depuis le début du mouvement mi-novembre par la fédération française de l'assurance, lundi, compte non tenu des nouvelles dégradations commises samedi sur les Champs-Élysées. Les violences font leur retour au premier plan alors que le gouvernement espérait sortir de la crise avec le grand débat national pour lequel le président n'a pas hésité à mouiller la chemise, enchaînant débats-marathons avec élus et citoyens. L'exécutif s'est donné jusqu'à la mi-avril, avec une prise de parole prévue du président Macron à ce moment-là, pour décider ce qu'il compte faire des très nombreuses propositions qui ont émergé.


AFP/VNA/CVN

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