>>Présidentielle en Équateur : la fin de l'ère Correa
Lenin Moreno, candidat du parti au pouvoir, fait le "V" de la victoire devant ses partisans, le 19 février à Quito. |
L'ancien vice-président Lenin Moreno, candidat d'Alliance Pays (AP, au pouvoir), a recueilli 38,87% des voix face à l'ancien banquier conservateur Guillermo Lasso, du mouvement Créant des opportunités (Creo), crédité de 28,50%, selon ces résultats portant sur 81,90% des suffrages exprimés et communiqués par le Conseil national électoral (CNE).
Mais pour l'emporter à ce premier tour, le candidat d'AP doit totaliser au moins 40% des voix, avec dix points d'avance sur le leader de l'opposition de droite.
"Nous avons déjà les 10 points de différence avec Lasso et cela continue à augmenter", a tweeté le président Correa, qui plus tôt avait appelé à accepter "la volonté du peuple équatorien exprimée dans les urnes".
Le président du CNE, Juan Pablo Pozo, a recommandé d'"attendre le dépouillement de 100%" des bulletins, prévus pour lundi 20 février à la mi-journée, avant de confirmer une victoire ou un second tour, prévu le 2 avril.
À l'issue de trois mandats et dix ans au pouvoir, le charismatique mais controversé chef de l'État sortant va laisser un pays modernisé et aux inégalités sociales réduites, mais polarisé et en proie à la crise économique.
"Cette bataille, nous allons la gagner", a assuré dans la soirée M. Moreno, sous les vivats d'une foule joyeuse, au siège de son parti à Quito.
Après la fermeture des 43.600 bureaux de vote, M. Lasso, qui était à Guayaquil (Sud-Ouest), capitale économique du pays, s'était pour sa part dit certain qu'"il y a un second tour !"
La crise «grand électeur»
Quelque 12,8 millions d'électeurs devaient voter, sous peine d'amende, pour désigner le successeur de M. Correa parmi huit candidats, mais aussi le vice-président, 137 députés et cinq représentants au Parlement andin, en présence de quelque 200 observateurs internationaux.
Les partisans de Lenin Moreno, candidat du parti au pouvoir, le 19 février à Quito |
Le scrutin, qui s'est déroulait dans le calme, s'annonçait serrer dans ce petit pays pétrolier dont l'économie dollarisée est affectée par la chute du brut et la hausse du billet vert.
La crise mécontente les classes moyennes, lasses aussi de la confrontation de M. Correa avec les milieux d'affaires et les médias, entre autres. De récentes révélations de cas de corruption ont encore assombri le panorama.
"Ce qui est en jeu, ce sont deux visions de la société, deux visions du développement, deux visions de l'État", selon le président sortant.
"Le grand électeur a été la crise économique", a déclaré l'analyste Alberto Acosta-Burneo du consultant Spurrier, précisant que lors de ses réélections au premier tour en 2009 et 2013, M. "Correa a obtenu plus de 50% grâce à la manne" pétrolière de l'époque.
En clôturant sa campagne jeudi 26 février, M. Moreno, 64 ans le mois prochain et vu comme plus conciliant que Rafael Correa, estimait que "le peuple équatorien (...) est décidé à poursuivre un processus qui ne sera pas stoppé".
Le président équatorien Rafael Correa vote le 19 février à Quito. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
"Ces dix ans sont une démonstration du progrès du pays (...) Je crois que nous allons continuer", estimait une électrice, Nora Molina, 53 ans, fonctionnaire.
Assange à l'affût des résultats
À l'inverse, Alexandra Orbe, 48 ans, employée, a voté pour "un changement, car la crise ne s'est jamais fait autant sentir".
M. Lasso, 61 ans, appelle à un "changement afin de lutter contre la corruption", affirmant que le gouvernement "ne veut pas que nous sachions qui sont les bénéficiaires des pots-de-vin d'Odebrecht".
Selon la justice américaine, le groupe de construction brésilien a versé 33,5 millions de dollars, entre 2007 et 2016, à des fonctionnaires équatoriens.
Le gouvernement a averti qu'il n'admettrait pas d'accusations "sans preuve", M. Correa dénonçant "une campagne si négative, si sale".
Un ex-ministre est toutefois impliqué dans une affaire visant l'entreprise publique Petroecuador.
S'il est élu, M. Lasso entend retirer l'asile à Julian Assange, réfugié à l'ambassade équatorienne de Londres depuis 2012. Le fondateur de WikiLeaks n'a cessé de tweeter les résultats partiels toute la soirée.
S'il y a un second tour, ce sera une première depuis 2009. Le prochain chef de l'État doit prendre ses fonctions le 24 mai.