En France, les antibiotiques redeviennent un peu trop automatiques

"Les antibiotiques, ce n'est pas automatique"... Le slogan a fait florès et pourtant, la consommation en France, qui avait chuté au début du COVID, est remontée en 2022 pour la deuxième année et plus fortement, notamment chez les enfants.

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En France, les antibiotiques redeviennent un peu trop automatiques.
Photo : AFP/VNA/CVN

"Si la consommation d’antibiotiques reste globalement orientée à la baisse depuis 2012, elle a augmenté en 2022 à un rythme plus soutenu qu'en 2021", selon une étude annuelle de Santé publique France (SPF) à partir des remboursements de prescriptions par l'assurance maladie, publiée à l'approche de la semaine mondiale pour un bon usage des antibiotiques (le 18 novembre).

La hausse est manifeste, en prescriptions comme en doses consommées en ville (hors hôpital) : +16,6% sur un an dans le premier cas (avec plus de 800 prescriptions d’antibiotiques pour 1.000 habitants dans l’année), et +14% dans le second cas (avec 21,6 doses pour 1.000 habitants et par jour).

Alors que "la pandémie de COVID avait montré une cassure de la courbe", Laëtitia Gambotti, responsable de l'unité infections associées aux soins et résistance aux antibiotiques de Santé publique France, a noté auprès de l'AFP "une remontée depuis deux ans de la consommation, revenue aux niveaux de 2019".

"On avait un petit espoir que la décroissance observée en 2020 puisse se pérenniser, ou du moins qu'on garde un acquis, mais, comme dans les autres pays européens, cela n'a pas été le cas", a commenté le Dr Anne Berger-Carbonne, autre spécialiste de l'agence sanitaire.

L'année 2020 reste singulière : les strictes mesures anti-COVID (confinements, gestes barrières) avaient réduit la fréquence des infections bactériennes mais aussi l'accès aux soins.

"2021 et 2022 se sont accompagnées d’une reprise des infections hivernales courantes, des consultations médicales et des prescriptions d’antibiotiques, particulièrement au cours de leurs derniers trimestres", a pointé SPF.

Cette remontée "reste cependant à un niveau légèrement inférieur à celui observé en 2019", avant la pandémie de COVID, a nuancé l'agence.

"Importante" chez les enfants, la consommation d'antibiotiques chez ces jeunes patients a, elle, retrouvé en 2022, voire dépassé, le niveau d'avant-pandémie.

"L'augmentation est plus importante chez les 0-14 ans, populations plus sujettes aux épidémies hivernales", a relevé Laëtitia Gambotti.

Or la saison 2022-2023 a été marquée par une triple épidémie de grippe-bronchiolite-COVID, mais aussi d'autres pathologies -pourtant en partie virales- qui ont influé sur la consommation d'antibiotiques, surtout en fin d'année.

La grippe a alimenté une épidémie "exceptionnellement longue et précoce", la bronchiolite a atteint une amplitude "très nettement supérieure à celle des années précédentes", les gastro-entérites aiguës sont revenues à des niveaux comparables à ceux d'avant la pandémie, a observé SPF.

Un des cinq plus mauvais élèves européens

Une dose vaccin anti-COVID préparée à Los Angeles en septembre 2022.
Photo : AFP/VNA/CVN

Outre les tranches d'âges, la consommation d'antibiotiques varie selon les régions, où les disparités sont globalement stables depuis une dizaine d'années. La Corse et Provence-Alpes-Côte d'Azur apparaissent comme les plus utilisatrices, Pays de la Loire et les départements d’outre-mer comme les moins consommatrices.

Mais, globalement, "la France reste l'un des cinq premiers pays européens les plus consommateurs d'antibiotiques", a noté Laëtitia Gambotti.

Une spécificité liée à des pratiques et à une histoire de l'approche médicamenteuse différentes d'autres pays, mais aussi à une dimension culturelle de la prescription d'antibiotiques.

Or l'antibiorésistance, qui inquiète depuis des années les autorités sanitaires mondiales pour ses conséquences meurtrières, est exacerbée par une consommation excessive ou inappropriée de ces traitements.

Le recul de la consommation d’antibiotiques est un objectif des autorités sanitaires, en France et dans d'autres pays, pour freiner l'apparition de bactéries résistantes. "Sinon le risque, à terme, est que nous n'ayons plus l'arsenal thérapeutique pour certaines maladies bactériennes, ce qui peut causer une mortalité notamment chez les plus fragiles", a rappelé Laëtitia Gambotti.

Pour sensibiliser à nouveau, SPF rediffusera, à partir de décembre, une campagne sur le bon usage des antibiotiques ("bien se soigner, c'est d'abord bien les utiliser"), efficaces uniquement face à des infections bactériennes, sans intérêt contre des infections virales comme la bronchiolite ou la grippe.

Pour Anne Berger-Carbonne, "il faut attendre 2023 pour bien voir où on en sont les efforts de réduction de la consommation d'antibiotiques".

AFP/VNA/CVN

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