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La candidate démocrate à la Maison Blanche pour 2016 s'est assise mardi 5 mai à la même table que des lycéens en situation irrégulière dans un établissement du Nevada. Parfaitement intégrés, ils ne connaissent que les États-Unis.
Certains ont obtenu un statut provisoire créé par Barack Obama, qui empêche leur expulsion. Mais une chose leur manque: des papiers permanents. Hillary Clinton ne les a pas déçus. En quelques minutes, elle a dissipé toute ambiguïté et épousé leurs revendications, appelé à l'adoption par le Congrès d'une grande réforme pour régulariser et naturaliser des millions de personnes dans leurs cas.
Hillary Clinton lors d'un discours à l'Université de Columbia le 29 avril 2015. |
Et elle a promis d'aller "plus loin" que Barack Obama en protégeant non seulement les jeunes sans-papiers d'expulsions, mais aussi leurs parents et d'autres adultes, en n'excluant pas d'agir par décrets comme le président actuel l'a fait.
Les républicains ont immédiatement bondi sur cette dernière promesse. "Elle se place encore plus à gauche que Barack Obama", analyse le sondeur républicain Whit Ayres, qui conseille le candidat aux primaires Marco Rubio. "Tous les candidats républicains disent qu'une action exécutive unilatérale est la mauvaise façon de réparer notre système d'immigration".
En affichant ses couleurs si longtemps avant la présidentielle de novembre 2016, elle ne place pas encore ses adversaires républicains sur la défensive, veut croire Glen Bolger, cofondateur du grand cabinet de sondages républicain Public Opinion Strategies, car ceux-ci sont concentrés sur la base républicaine des primaires.
Les républicains disposent cependant d'une ligne d'attaque efficace: Hillary Clinton promet une présidence ultra-partisane et conflictuelle. "C'est un problème de plus pour elle à l'élection", affirme-t-il. "Si les républicains se mettaient à légiférer par décrets, les démocrates hurleraient pour réclamer un impeachment", une procédure utilisée par le Congrès pour démettre le président.
Rhétorique et arithmétique
Reste que les républicains, pour remporter la présidentielle, auront besoin des hispaniques, passés de 2 à 10% de l'électorat aux présidentielles entre 1976 et 2012 (les Noirs sont entre temps sont passés de 10 à 13%). À fortiori dans les Etats-clés comme la Floride, où ils excèdent la moyenne nationale. En 2012, Barack Obama a remporté 82% du vote des minorités (noire, hispanique, asiatique), et seulement 39% du vote blanc, selon les sondages de sortie des urnes.
L'électorat blanc vote surtout républicain mais, comme le relève Whit Ayres, il est en déclin. Le sondeur prédit que les républicains devront remporter bien plus de 40% du vote latino en 2016 pour espérer entrer à la Maison Blanche, alors que Mitt Romney, en 2012, était tombé à 27%. Or pour les citoyens hispaniques, la question des régularisations est centrale, car dans une même famille cohabitent souvent des "légaux" et des clandestins, au hasard des arrivées et des naissances.
Les candidats républicains à la Maison Blanche insistent sur une précondition à toute réforme: sceller l'immense frontière partiellement désertique avec le Mexique. Ted Cruz, sénateur du Texas, a proposé de tripler le nombre de policiers la surveillant.
Marco Rubio, Floridien d'origine cubaine, était le Monsieur réforme des républicains du Sénat en 2013; il a depuis changé d'avis. Il reconnaît qu'on ne peut pas expulser 11 millions de personnes, mais repousse toute régularisation à une époque où la frontière sera hermétique.
Jeb Bush, dont la femme est d'origine mexicaine, reste flou sur un plan de régularisations, et encore plus sur d'éventuelles naturalisations. Il préfère parler de l'immigration régulière, et propose de réduire le regroupement familial (suppression des catégories de frères et soeurs) au profit des immigrés hautement qualifiés. Seul son ton tranche: il parle avec compassion des familles de clandestins qui prennent des risques pour venir aux États-Unis. "Nous transformerons les gens en républicains si notre message offre de l'espoir", a-t-il dit en avril.
Cet espoir, pour l'instant, semble être placé chez les démocrates. À la question : "quel parti se préoccupe le plus des hispaniques?", seuls 10% des électeurs latinos répondaient le parti républicain dans un sondage Pew de 2014, contre 50% pour le parti démocrate. Un tiers ne voyaient pas de différences.