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Des panneaux solaires dans un champ de tournesol à Moutiers (Savoie), le 29 novembre 2022. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
C'est le cas en Normandie de l'usine de Demgy, dotée depuis juin de panneaux photovoltaïques au sol qui lui fournissent désormais 15% de son électricité.
À l'origine, il y avait la volonté de décarboner cette production de plastiques légers pour l'aéronautique, explique la directrice marketing Corinne Demange. "Puis la hausse du coût de l'énergie a accéléré" le projet, ajoute-t-elle, relevant sa "rentabilité plus élevée que prévu".
Boom inédit
Depuis la crise de l'énergie de 2022, entreprises, particuliers, tertiaire et collectivités montrent de l'appétit pour "l'autoconsommation", le fait de consommer l'électricité qu'on produit soi-même, et dont on peut revendre le surplus à l'État via EDF.
Sur 842.000 producteurs d'énergies renouvelables en France, 437.000 sont aujourd'hui des particuliers et petits professionnels "auto-consommateurs" équipés de panneaux de moins de 36 kilovoltampères (kVA), selon Enedis, qui gère le réseau de distribution électrique.
C'est près de deux fois plus qu'à la fin 2022, quatre fois plus qu'à la fin 2020, ajoute cette filiale d'EDF, qui couvre 95% du territoire.
L'autoconsommation résidentielle a représenté l'an dernier un tiers des nouvelles installations photovoltaïques en 2023 en France, souligne Daniel Bour, président du syndicat professionnel du secteur de l'énergie solaire Enerplan. Pour lui, "l'autoconsommation c'est parti, et ce mouvement n'a aucune raison de s'arrêter!".
Résurrection
Jean Chappert montre des panneaux solaires installés sur le toit de sa maison, le 19 octobre 2022 à Saint-Priest-La-Plaine (Creuse). |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Mais la France a des marges de progrès : 440.000 auto-consommateurs, c'est tout juste 1% des 37,5 millions de clients abonnés chez Enedis.
M. Bour constate le retard par rapport aux Pays-Bas, à l'Italie, l'Espagne ou même l'Allemagne.
Car longtemps "les prix de l'électricité ont été plus faibles ici" qu'ailleurs, explique-t-il.
Dans les années 2010, le photovoltaïque a aussi dû encaisser le recul du soutien de l'État français. "Le gouvernement a estimé que le solaire coûtait trop cher", décrit le représentant du secteur. La bulle attire aussi des acteurs peu scrupuleux, les déboires techniques sont nombreux...
In fine, souligne Daniel Bour, "le marché a été totalement cassé, pour ne reprendre que dans les années 2020", avec le Covid, les préoccupations climatiques et énergétiques, qui nourrissent un besoin d'"autonomie".
Qui et où ?
"Il y a encore un an, on se demandait comment on allait passer l'hiver" avec plusieurs réacteurs nucléaires à l'arrêt, rappelle David Gréau, délégué général d'Enerplan. "La situation géopolitique a aussi joué dans l'appréhension de l'avenir. Avec l'autoconsommation, on achète de la production sur une longue durée, avec une garantie de 25 ans, un rachat du surplus pendant 20 ans, peu de frais de maintenance"
Le phénomène n'est pas régional : plus de 80.000 auto-consommateurs en Occitanie, 44.000 en Paca, mais Grand Est et Hauts-de-France réunis en comptent près de 50.000.
Enedis constate aussi "un fort intérêt pour l'autoconsommation collective", qui consiste à partager l'électricité produite entre plusieurs personnes : en 2018, la France comptabilisait six opérations de ce type, elles sont 305 fin 2023 (+220% par rapport à 2022), dont 181 portées par des collectivités, 43 par des bailleurs HLM.
La société Effy, qui vend aux particuliers, met en avant une "solution anti-inflation", alors que le gouvernement annonce une nouvelle hausse des tarifs de l'électricité au 1er février (+40% en deux ans).
Quid de l'amortissement ?
Des panneaux solaires dans l'usine de ciment Hoffmann Green Cement Technologies, à Bournezeau (Vendée), le 10 mai. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
C'est "un investissement qui permet de neutraliser la hausse des prix et apporte une valeur supplémentaire au patrimoine", plaide Audrey Zermati, directrice stratégie d'Effy, qui revendique de nombreux clients jeunes et aux revenus modérés.
Selon elle, le temps d'amortissement a depuis la crise gagné trois ans, passant à 6-9 ans mais l'UFC-Que choisir parlait en mars de rentabilité sur 20 ans, au moment où l'Etat relevait ses tarifs de rachat (auxquels s'ajoutent une prime d'investissement).
La surproduction de modules chinois, privés notamment du marché américain, a ces derniers temps réduit les coûts de projets.
Pour la rentabilité, le syndicat Enerplan ne donne pas de chiffre global. Il cite en revanche l'importance des habitudes nouvelles prises par l'usager, attentif à sa production et consommant aux heures propices.
AFP/VNA/CVN