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Steve Meadows, architecte, acteur, inventeur et passionné d'art, à Venice, en Californie, le 14 février. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Suivi par les réalisateurs d'un documentaire et assisté par un ami, cet homme de 66 ans a chargé dans sa voiture deux peintures qui pourraient s'avérer très précieuses et qui intriguent le monde de l'art international, et s'est dirigé vers un centre d'expédition près du centre-ville.
Les deux œuvres, des natures mortes sur papier et sur toile, sont destinées au Musée Van Gogh à Amsterdam, où des examens très attendus doivent déterminer si le maître hollandais en est bien l'auteur.
Leur authentification surprendrait le monde de l'art et générerait probablement des estimations astronomiques: la toile de 52 centimètres par 68 serait seulement le second Van Gogh de ce genre identifié depuis 1928.
Le record de vente d'une toile du peintre néerlandais (1853-1890), mort dans la misère, revient au Portrait du Dr Gachet (1890), cédé à plus de 82 millions de dollars en 1990.
"Je suis soulagé de pouvoir les envoyer au musée", a déclaré M. Meadows. "Je veux juste la vérité".
Les peintures sont en cours d'évaluation. L'une d'elles pourrait être une étude préliminaire par Van Gogh de son propre Vase japonais avec des roses et des anémones, actuellement présenté au Musée d'Orsay à Paris. Dans l'autre cas, il pourrait s'agir d'une nature morte originale de l'artiste, un Eventail japonais.
Leur examen par les experts d'Amsterdam marque en tout cas un nouveau tournant dans l'histoire spectaculaire d'une collection d'oeuvres d'art contestée depuis des décennies.
Compatibles avec Van Gogh
Les deux peintures appartenaient autrefois au controversé Néerlandais Jelle De Boer, qui a amassé des centaines de pièces jamais authentifiées au milieu du XXe siècle, qu'il prétendait être de Van Gogh.
Les autorités suisses ont confisqué bon nombre d'entre elles en 1967, les soupçonnant d'être des faux. Il s'en est ensuivi des décennies de bataille juridique.
De Boer est mort en 1970. Après avoir été dispersée, sa collection a été réunie au début des années 2000.
Une valise sur mesure, à Venice en Californie le 14 février, pour transporter les œuvres qui doivent être acheminées au musée Van Gogh d'Amsterdam. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Steve Meadows a acquis ses deux peintures en 2004, selon son avocat, et a rapidement commencé sa pointilleuse tâche d'authentification. Il a dépensé des centaines de milliers de dollars dans diverses analyses des palettes et des fils de toile, recourant notamment à l'imagerie infrarouge et aux rayons X à haute résolution.
Les résultats ont été positifs : les deux palettes sont compatibles avec Van Gogh.
L'un des tableaux correspond, par sa taille et sa composition, à un autre Van Gogh peint autour de 1890.
Le second, l'Eventail japonais, partage des caractéristiques communes avec des œuvres de l'artiste datant de sa période parisienne à la fin des années 1880 et avec des œuvres d'Edouard Manet. En outre, au scanner apparaîtrait sous le tableau une autre image florale, et selon des historiens de l'art, Van Gogh procédait souvent ainsi, en peignant par-dessus un autre motif.
En juillet 2015, M. Meadows et son avocat spécialisé dans l'art Donald Burris ont envoyé tous leurs documents de travail au Musée Van Gogh, et celui-ci a accepté d'évaluer les peintures.
"Tous les rapports indiquent qu'ils sont l'œuvre de Van Gogh", a souligné M. Burris. "Nous sommes heureux que le musée ait accepté de les examiner. Nous sommes conscients qu'ils n'ont pris aucun engagement quant au résultat, mais nous avons de l'espoir".
Mésaventure coûteuse
L'évaluation par le musée, qui fait autorité en la matière, pourrait prendre des mois, voire des années, avant que les chercheurs ne rendent leur verdict.
Au bout du compte, ils pourraient soit estimer que les peintures ne sont pas de Van Gogh, soit les déclarer authentiques, soit considérer que leurs évaluations ne sont pas concluantes.
"Pendant les analyses, le musée ne peut pas faire de commentaires sur les progrès qu'il réalise" dans le travail d'évaluation, a dit Esmee Köhler, la porte-parole du Musée Van Gogh.
David Brooks, spécialiste de l'œuvre de Vincent Van Gogh basé à Toronto, a affirmé qu'il serait stupéfait si les deux peintures s'avéraient être authentiques, étant donnée la réputation sulfureuse de la collection Jelle De Boer. "Mais ça reste possible", a-t-il ajouté. "Le fait qu'ils ont franchi la porte du département de recherche du Musée Van Gogh est encourageant".
Steve Meadows reste optimiste en se souvenant d'Andrew Brainerd, un avocat de Chicago collectionneur d'art, qui a acheté quatre peintures de De Boer en 1966. Après des décennies d'efforts, M. Brainerd a convaincu certains experts qu'une des peintures était une étude authentique de Manet datant de 1859.
En attendant, l'artiste californien attend dans sa maison de Venice, achetée au musicien Eric Clapton, en se demandant s'il est en possession de deux peintures inestimables, ou s'il s'est juste fourvoyé dans une mésaventure coûteuse.