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Après une sixième journée d'action en un mois, pour demander le retrait de ce projet, plusieurs milliers de personnes ont entamé une "Nuit debout", mouvement né il y a dix jours à Paris et dépassant la seule opposition à la loi travail. "Quelque chose est en train de se lever", a lancé à Paris face à la foule l'économiste Frédéric Lordon.
Les participants à la "Nuit debout" se rassemblent place de la République à Paris, au terme d'une journée de manifestation émaillée de violences, le 9 avril 2016. |
En fin de soirée, plusieurs centaines de personnes ont décidé d'aller "prendre l'apéro chez Valls", convergeant vers le domicile parisien du Premier ministre, actuellement en visite officielle en Algérie, avant d'être bloquées par les forces de l'ordre qui ont utilisé des gaz lacrymogènes. "Paris, debout, soulève-toi", scandaient les manifestants.
De bon enfant au départ, la situation s'est tendue, quelques dizaines de personnes jetant des projectiles sur le commissariat du 11e arrondissement, action visiblement désaprouvée par la plupart des manifestants, a constaté un journaliste de l'AFP. Plus tard, après la dispersion, une dizaine de vitrines de banques ou d'assureurs ont été brisées à coups de pied ou de barre de fer par des casseurs visage masqué.
Place de la République, l'un des membres de Nuit debout soufflait "ces gars-là, ils n'ont rien à voir avec nous".
Aucune interpellation n'était signalée vers 0h30. En revanche, dix personnes ont été interpellées après des heurts en marge du cortège de l'après-midi, ou trois policiers ont été légèrement blessés.
Des heurts ont eu lieu à Nantes et Rennes. Au total, 27 interpellations ont été recensées en France.
Après avoir manifesté dans la journée, Gérard, 62 ans, intéressé par "ces types de mouvements citoyens", "en dehors des partis", a rejoint la cinquième "Nuit debout" à Nantes et ses quelque 300 participants, ses barnums, ses banderoles, ses prises de parole.
Une centaine de personnes à Tulle
"Occuper la place de nuit, c'est aller contre le couvre-feu intellectuel. C'est aussi le seul temps restant dans nos vie modernes pour parler des problèmes de notre société. Et rester debout, c'est ne pas demeurer assis, courbé, prostré", fait observer à Reims Antoine Farcette, 23 ans, étudiant en droit.
Affrontements entre manifestants et policiers à l'issue du défilé contre la loi travail le 9 avril à Paris. |
À Tulle, en Corrèze, fief du chef de l'État, une centaine de personnes se sont rassemblées. "J'étais là le 6 mai 2012, ce n'est pas pour la politique qu'il mène qu'on a élu François Hollande", explique Stéphanie, une quadragénaire venue participer aux débats.
À Toulouse, les "Nuit debout" se sont retrouvées sur la place du Capitole, tandis qu'à Marseille, le mot d'ordre était de ne pas rentrer chez soi et de "faire tourner le micro" au sein de ce mouvement qui s'assume sans leader.
Dans la journée, les autorités ont recensé 120.000 manifestants dans toute la France, dont 18.000 à 20.000 à Paris (110.000 selon les organisateurs dans la capitale). Loin des 390.000 à 1,2 million de personnes, selon les sources, du 31 mars. La mobilisation avait lieu pour la première fois un week-end, en période de vacances scolaires.
Une nouvelle mobilisation est prévue le 28 avril.
"Le peuple se réveille"
Partout la baisse de participation était patente (sauf à Paris selon les syndicats), y compris dans les zones où les vacances n'ont pas commencé, comme à Toulouse où les manifestants étaient entre 8.000 selon la police et 20.000 d'après la Confédération générale du travail (CGT), contre 20.000 à 100.000 le 31 mars.
Les cortèges ont réuni également quelques milliers de manifestants à Lyon (4.000), Marseille (3.800), Nantes et Grenoble (environ 2.500), Lille et Rennes (1.700), selon les chiffres des autorités.
"Ce qu'a réveillé la loi, c'est le refus de la précarisation et du bizutage social", a déclaré le président de l'Unef, William Martinet, qui sera reçu lundi 4 avril avec les autres organisations étudiantes et lycéennes par Manuel Valls.
À Paris, parmi les slogans on pouvait lire "Game over - le peuple se réveille". "Les jeunes dans la galère, les vieux dans la misère. De cette société, on n'en veut pas!" criait une jeune femme au haut-parleur dans la manifestation lyonnaise.
À Lille, Gérard, un retraité de l'enseignement, lâchait: "Il y en a marre de l'exploitation capitaliste qui ne fait que s'aggraver".
AFP/VNA/CVN