Frontière franco-italienne
Des migrants entre gendarmes français et policiers italiens

Quelque 200 migrants, venus pour la plupart d'Afrique, empêchés depuis le 11 juin par les autorités françaises d'entrer en France à la frontière italienne à Vintimille, ont finalement été dispersés le 13 juin sans ménagement par la police italienne.

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Depuis quarante-huit heures, ils demandaient pacifiquement qu'on les "laisse passer" pour pouvoir gagner le pays européen de leurs rêves, réclamant "la paix", "la liberté", "du travail", face à une dizaine de gendarmes français leur bloquant le passage vers la France, et sous les yeux des touristes en voiture qui continuaient à traverser la frontière sans encombre.

Le 13 juin dans la soirée des policiers italiens ont dispersé les migrants, les repoussant sans ménagement en direction de Vintimille, à 5 km du poste-frontière. Objectif : les emmener en car dans des centres d'accueil de la province d'Imperia, selon un responsable de la police locale. "Où sont les droits de l'homme ?", ont crié certains migrants, après avoir été bousculés par les policiers italiens. La majorité s'est toutefois pliée aux ordres de la police et est partie à pied en direction d'un tunnel sur la route conduisant à Vintimille.

La police italienne disperse les migrants rassemblés au poste-frontière italien de Vintimille, le 13 juin.

Une cinquantaine d'hommes, qui n'entendaient pas renoncer à passer la frontière, ont refusé d'obtempérer et se sont réfugiés sur des rochers, en bord de mer, menaçant de se jeter à l'eau. Le sit-in pacifique avait repris, après une deuxième nuit passée sur place. Parmi les migrants, une vingtaine de femmes et d'enfants. Beaucoup portaient des pancartes ou scandaient des slogans : "We need to pass" ("Nous avons besoin de passer"), "We need freedom" ("Nous avons besoin de liberté") ou encore "Political response from European Union" ("Une réponse politique de l'UE").

"On ne peut pas laisser entrer en France des personnes en situation irrégulière et chacun mesure que l'Europe fait face à des flux migratoires exceptionnels. Cela appelle une réponse européenne forte et le ministre de l'Intérieur travaille sans relâche avec la Commission européenne et ses homologues italiens et allemands", a-t-on indiqué le 13 juin dans l'entourage de Bernard Cazeneuve.

"Des contrôles ont été renforcés au fil des semaines à la frontière italienne. Ils ont deux objectifs : permettre l'interpellation de passeurs et de trafiquants qui ont été nombreuses ces dernières semaines et éviter les troubles à l'ordre public que peut entraîner la constitution de camps en France", a ajouté cette source à l'AFP.

Des gendarmes bloquent l'accès au poste-frontière entre Vintimille en Italie et Menton à des migrants souhaitant passer en France, le 12 juin.
Photo : AFP/VNA/CVN

Présente à Vintimille, la Croix-Rouge italienne, par la voix de son responsable local Walter Muscatello, s'était prononcée, avant l'évacuation, pour l'ouverture d'un "corridor humanitaire" pour laisser passer les migrants pendant 24 heures. Seuls les femmes et les enfants ont profité des distributions de nourriture par l'organisation humanitaire. Les hommes avaient choisi de ne pas s'alimenter pour faire pression sur les autorités françaises et italiennes.

"Nous voulons la paix"

Ces migrants viennent notamment de Somalie, d'Érythrée, de Côte d'Ivoire ou du Soudan, a indiqué à l'AFP un jeune homme disant se prénommer Mohamed et être né au Darfour, au Soudan, en 1992. Lui-même a expliqué être arrivé avec son frère à Catane, en Sicile, et être remonté vers le Nord de l'Italie en car et en train.

Arrivés le 12 juin à Vintimille, ils ont été arrêtés en France, à la gare de Menton puis reconduits en Italie à pied, a poursuivi Mohamed. "Nous voulons la tolérance pour rester en France", a-t-il expliqué. "Au Darfour, il y a beaucoup de guerres et de violence, on massacre les gens, nous voulons la paix". "Moi, je veux aller en France mais d'autres veulent aller en Suisse, en Allemagne ou en Grande-Bretagne", a-t-il poursuivi. "Je ferais n'importe quel travail tout de suite".

Durant les sept derniers jours, un nombre record de 1.439 migrants illégaux ont été interpellés par les forces de l'ordre françaises dans les Alpes-Maritimes, a précisé le préfet Adolphe Colrat, évoquant un pic supérieur aux semaines records de 2014. Parmi eux, 1.097 ont été réadmis en Italie. "J'ai le devoir de faire appliquer la règle du jeu au sein de l'Union. Les personnes en situation irrégulière doivent être réadmises dans le pays d'où elles viennent, en l'occurrence l'Italie", a insisté M. Colrat.

Dans les autres départements frontaliers français, les préfectures n'avaient pas observé d'afflux de migrants et n'avaient pris aucune mesure particulière.


AFP/VNA/CVN

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