Des coulisses à la scène, l’art minutieux des perruquiers d’opéra

Cheveux implantés un à un, mis en plis, crêpés, frisés... sous les doigts agiles des “petites mains” de l’atelier du Capitole à Toulouse (France), naissent les coiffes des spectacles de cet opéra national,l’un des rares à fabriquer ses propres perruques.

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Noemie Lavigne dans l’atelier de perruques du Théâtre du Capitole, à Toulouse. 
Photo : AFP/VNA/CVN

“Tout se prépare un an à l’avance. Le costumier choisit style, couleurs, coiffage, nous transmet les maquettes (...) Il faut quatre à cinq jours, voire dix pour fabriquer une perruque”, précise Thierry Le Gall, 59 ans, l’un des assistants de l’atelier.

Un opéra, selon le nombre de solistes et de chanteurs composant le chœur, “ça peut être 80 perruques”, toutes aux mesures de chaque artiste, souligne-t-il.

Posées sur des têtes en polystyrène et alignées sur une étagère, les perruques bouclées des Pêcheurs de perles de Bizet, et certaines à longues tresses du “Boris Godounov” de Moussorgski, sont fin prêtes pour la prochaine saison qui démarre à l’automne.

Assises à une grande table, une dizaine de perruquières s’activent, éclairées par des lampes loupes et penchées sur des têtes en bois, recouvertes de bonnets en tulle fin.

Des heures de travail

“Je passe un crochet dans le tulle, attrape le cheveu, le noue avec le crochet, puis tire. Toute l’implantation de la perruque se fait comme ça”, explique l’une d’elles, Tania Kuczowicz, 36 ans.

Les cheveux, naturels car présentant un meilleur rendu que les fibres synthétiques, ont été préparés à l’avance dans des cardes en métal, d’où elle peut ainsi les extraire “sans risquer de tout emmêler”.

Une flèche indique le sens. “Il faut implanter par la racine, pas par la pointe, sinon la perruque sera impossible à coiffer, bonne à jeter”, dit Vanessa Marchione, 52 ans, cheffe de cet atelier de neuf permanents, dont une majorité de femmes, auxquels s’ajoutent apprentis et intermittents.

C’est elle qui gère les commandes. Importés surtout d’Asie et d’Europe de l’Est, les cheveux, du brun profond au blond le plus clair, arrivent lavés, coupés, voire teintés en bleu, violet, rouge flamboyant, etc.

Thierry Le Gall, chef adjoint perruquier, dévoile une mèche de cheveux à l’atelier de perruques du Théâtre du Capitole, à Toulouse. 
Photo : AFP/VNA/CVN

“Selon les longueurs, le prix oscille entre 2.300 et 3.000 euros le kilo (...) Il faut à peu près 100 grammes pour une perruque”, ajoute Vanessa Marchione, “3e génération de perruquiers”, dans les pas de ses parents qui dirigeaient l’atelier avant elle, et de son grand-père italien, immigré de Naples à Marseille.

Avec Paris et Strasbourg, l’opéra de Toulouse est l’un des seuls à fabriquer encore ses perruques, les autres théâtres faisant appel à des artisans extérieurs.

“Une fois le spectacle terminé, tout est gardé. Le cheveu est imputrescible, ne s’altère pas avec le temps. On a un stock d’environ 5.000 perruques qu’on peut réutiliser pour de nouvelles représentations, ou adapter pour d’autres opéras ou ballets”, informe Thierry Le Gall.

Du poil de yack, plus épais et qui permet donc du volume, sera préféré pour les grandes perruques de style XVIIIe.

Perruques et maquillage

Dans l’atelier, niché au 4e étage du Capitole, sont aussi conçus barbes, moustaches, masques ou bijoux ornant les chevelures, mais aussi le maquillage des chanteurs et danseurs.

S’ils n’apparaissent jamais sous les feux de la rampe, les artistes de l’atelier sont présents à chaque représentation : en coulisses, ils rectifient une mèche, ajustent un ruban, rattrapent un rouge à lèvre.

Leur travail est présenté jusqu’au 24 septembre dans l’exposition “La fabrique de l’opéra” au Couvent des Jacobins, en plein cœur de Toulouse, ainsi que de magnifiques costumes, décors et maquettes conçus dans les autres ateliers du Capitole, tel l’escalier monumental de “La Chevauchée des Walkyries” de Wagner.

Parmi les 150 pièces, sorties de la caverne d’Ali Baba que sont les réserves du théâtre, figurent les diadèmes scintillants des ballets Casse-Noisette et Giselle, ou les extravagantes perruques d’Un ballo in maschera (Un bal masqué) de Verdi, imaginées par le couturier Christian Lacroix.

La conservatrice des Jacobins, Marie Bonnabel, a eu à cœur de “mettre à l’honneur tout le travail des petites mains qui est derrière cette fabrication très minutieuse”. “Cette perfection, ce sont des heures et des heures de travail pour quelques minutes sur scène, souligne-t-elle. C’est très représentatif de l’opéra : quelque chose de fugace, mais qui fait toute la magie du spectacle !”

AFP/VNA/CVN

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