De l’amitié à l’amour

Encore une légende qui dessine l’amitié, l’amour et la fidélité malgré les épreuves de la vie. À chacun de laisser parler ses sentiments en l’écoutant ou en la lisant.

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Doué comme il était, Nguyên Ky fit des progrès prodigieux dans ses études.
Photo : CTV/CVN

C’était au temps des lettrés, il y a longtemps déjà. Il y avait un homme du nom de Nguyên Ky. Quand il était enfant, il se faisait déjà remarquer par son intelligence. Malheureusement, il perdit sa mère très tôt. Son père se remaria et la deuxième femme se montra extrêmement dure envers son beau-fils. Elle l’obligea, dès l’âge de 15 ans, à cesser ses études pour garder les buffles, puis à travailler dans les champs comme un homme : transport du fumier, hersage, labourage…

Il endura les peines sans compter les insultes et les coups. Son père était faible devant la jeune femme et n’osait pas le défendre si bien qu’à la fin, las d’être mal nourri, mal vêtu et maltraité, Nguyên Ky abandonna la maison familiale.

Doué mais pauvre !

Il lui arriva d’être obligé de mendier pour vivre. Un jour, le vieux licencié du village chez qui il se présenta, fut frappé par ses traits fins et ouverts, et lui demanda s’il savait écrire. Nguyên Ky se fit apporter un papier et un pinceau et improvisa un poème en vers classiques. Au premier coup d’œil, le licencié apprécia l’écriture élégante, où la grâce s’alliait à la fermeté. Mais, il goûta surtout les allusions discrètes à la situation du jeune homme et à leur rencontre. Enchanté de ces huit verts qui prouvaient, non seulement des connaissances solides, mais encore un esprit mûr et délicat, il offrit séance tenante à Nguyên Ky de le loger dans une dépendance de sa maison et de lui donner des leçons.

Doué comme il était, Nguyên Ky fit des progrès prodigieux. En quelques années, non seulement il rattrapa le temps perdu mais il devint célèbre. Un jour de printemps, il se laissa entraîner par un camarade à une fête en l’honneur du génie du village. Notre jeune et pauvre lettré portait une robe de coton usée et rapiécée. Quand il se vit au milieu de jeunes gens richement habillés, il ne put se défendre d’une certaine honte. Il chercha un coin à l’écart pour s’y tenir, presque caché entre le mur et une des colonnes du temple. Cependant, la foule n’avait d’yeux que pour l’éblouissante beauté d’une chanteuse. Elle n’était pas seulement belle, elle chantait admirablement.

Quand elle entrouvrait ses lèvres, elle jetait des pierres précieuses et semait de l’or. Tous les hommes étaient comme fous et rivalisaient de générosité pour son talent : sur la table, rouleaux de soie et argent s’amoncelaient en guise de récompense. Soudain, au milieu de la danse des lanternes, la jeune chanteuse qui tournait légère, comme en voltigeant, passa près du coin du temple où était blotti Nguyên Ky. Quand elle le vit, elle en fut si saisie qu’elle se tut et s’arrêta, le regard fixe, sans pouvoir reprendre son chant, ni sa danse.

Amitié ou amour ?

Le lendemain, Nguyên Ky était en train de lire quand il la vit paraître. Elle lui toucha amicalement l’épaule et dit : "Se peut-il qu’un homme de talent comme toi soit si malmené par la fortune ?" Elle le pria d’accepter dix ligatures et des pièces d’étoffe. Il refusa par politesse mais elle sut si bien insister en se retirant rapidement qu’il ne put que la remercier ?

Après son départ, il eut un peu honte, mais il dut s’avouer qu’il avait bien besoin de ce secours inespéré. Quelque temps après, elle revint, puis de loin en loin, elle lui rendit visite, s’occupant chaque fois de son ménage, raccommodant son linge, lui préparant ses repas, l’encourageant à travailler, tout comme si elle était sa femme. Là s’arrêta leur intimité.

Nguyên Ky la respecta comme une amie chère et dans ses paroles et des gestes ne manqua jamais aux règles et aux convenances. Cependant à mesure qu’il la connaissait davantage, il devenait plus familier en même temps que plus sensible à sa beauté. Un jour, il ne put résister à un mouvement irréfléchi. Il le regretta aussitôt ! Elle changea de visage et lui fit de sévères reproches.

Des voix qui sèment l’or ou des pierres précieuses ?
Photo : VNA/CVN

"Ah ! Si j’étais ce que vous croyez, dit-elle, je n’aurais eu que l’embarras du choix parmi tant de riches et joyeux habitués des bords de rivières et des champs de mûriers. Ignorez-vous donc pourquoi je vous ai cherché ? J’ai pensé à mon avenir. D’ordinaire mes pareilles ne savent pas prévoir et en rencontrent quand vient l’âge que des gens d’une condition peu élevée. C’est pourquoi, j’ai voulu, pendant ces années de peine, connaître un homme supérieur, pour me réfugier plus tard auprès de lui, jusqu’à la mort. Et voilà que vous me traitez comme la fleur sur le mur et le saule du sentier. Dois-je m’éloigner de vous à jamais ?"

Nguyên Ky comprit, s’excusa et de ce jour respecta encore davantage la jeune fille. Plus d’un an après, à l’approche des examens, il décida de rentrer chez son père pour lui demander de quoi subvenir à tous les frais d’un candidat. Au moment des adieux, il prit la main de son amie et lui dit : "Sur mon chemin de misère, j’ai eu la chance de vous rencontrer. Ma dette envers vous est lourde, je m’en souviendrai… Avant de nous séparer, dites-moi comment je pourrai vous atteindre un jour". Elle répondit : "Plus tard, si vous ne m’oubliez pas ce sera moi qui vous chercherai. Et si nous ne devons plus nous retrouver à quoi bon savoir mon nom et mon village ? Pour ma part je n’ose exiger de vous aucune promesse : le monde sera seul juge".

Quand Nguyên Ky arriva à la maison natale, grande fut la joie de son père qui n’espérait plus le revoir. La belle-mère, elle-même, se montra pleine de prévenances pour le jeune lettré, qui remporta bientôt les plus brillants succès : reçu à l’examen préliminaire de la province, il fut ensuite premier au concours triennal de la région.

Quel avenir est réservé à Nguyên Ky et à son amie ? À suivre la semaine prochaine…

Ông Ngoai/CVN

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