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Les artistes portent leurs costumes pour le festival de Tlaxcala, à Mexico, le 13 février 2018. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
La ville, à 120 km à l'est de Mexico, est située au cœur d'une région dominée par les gangs criminels et devenue un casse-tête sécuritaire pour les autorités. Mais cela ne l'empêche pas d'accueillir chaque année cette grande fête populaire.
De nombreux commerçants sont venus s'installer pour l'occasion sur la place principale pour vendre nourriture et artisanat en tous genres, à deux pas d'une église et d'une arène.
"Le carnaval a été introduit pas les Espagnols au XVIIe siècle, explique Dario Lemus Tlapale, responsable des affaires culturelles à la mairie. Les autorités avaient toutefois exigé que l'on ne se moque pas des personnages publics".
Les habitants ont trouvé la parade et font défiler d'impressionnants costumes où la raillerie à l'encontre des colonisateurs a été élevée au rang d'art.
Masques coiffés de plumes de plusieurs mètres de hauteur, tissus somptueux brodés à la main et ornés de petit crânes, costumes européens et ombrelles élégantes: le carnaval offre un splendide résumé des cultures venues s'entrechoquer dans la région.
"Les costumes représentent une fusion des cultures européennes et préhispaniques. La partie haute de chaque costume est héritée de la culture préhispanique, celle du bas provient de la culture européenne" explique Tlapale.
Au total, 15 grands types de costumes défilent dans les rues, pour la plupart entièrement refaits chaque année par les habitants qui dansent en couple devant le public.
"Je suis très fier de porter ce costume" commente Arturo, 23 ans, ingénieur civil. Mais "c'est très physique, les costumes peuvent peser 25-30 kilos".
"Chaque année je fabrique le mien, explique Melani Mitchel, danseuse âgée de 15 ans. Je prépare trois modèles différents pour les différentes apparitions".
Traite des femmes, trafic de carburant
Melanie Michel et Alfredo Alvarez portent leurs costumes pour le festival de Tlaxcala, à Mexico, le 13 février 2018. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
À quelques kilomètres de là, une réalité plus sordide échappe aux regards. Des jeunes filles du même âge sont obligées de se prostituer à Tenancingo, considérée comme la capitale mexicaine de la traite des femmes.
"Quelques jeunes filles de la commune s'y trouvent", témoigne anonymement une habitante.
Pour ces adolescentes, le scénario est souvent le même : "Elle rencontre un jeune homme dont elle tombe amoureuse. Ils se marient, elle accouche d'un premier enfant et ensuite il l'oblige à se prostituer sous peine de s'en prendre à l'enfant", explique-elle.
Les proxénètes de Tenancingo, à la tête d'un réseau international, les envoient parfois se prostituer aux États-Unis voire jusqu'en Nouvelle-Zélande, selon la justice.
Au cœur du "triangle rouge", près de Tepeaca, deux groupes criminels liés au narcotrafic misent sur un autre filon: le vol de carburant.
Le secteur est celui des "huachicoleros", ces voleurs d'essence qui percent les canalisations de l'entreprise publique Pemex pour siphonner le carburant.
Une activité risquée mais juteuse : 10.000 dollars mensuels pour ceux qui parviennent à perforer l'épais oléoduc en moins de vingt minutes.
Et jusqu'à 8.000 dollars pour celui qui tiendra le tuyau et prélèvera jusqu'à 4.000 litres par prise.
"Les costumes représentent une fusion des cultures européennes et préhispaniques. La partie haute de chaque costume est héritée de la culture préhispanique, celle du bas provient de la culture européenne". |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Par sécurité, "nous évitons d'aller dans cette zone", explique une habitante de Tlaxcala.
Les "huachicoleros" vendent ensuite l'essence volée en plein jour, parfois même dans des stations services de la ville : en janvier 2017, Pemex en a fait fermer trois.
Malgré les moyens militaires et technologiques déployés, les vols ont pris une ampleur sans précédent au niveau national, avec une perte pour Pemex estimée à environ 2,4 milliards de dollars depuis 2010, selon son directeur de la transformation industrielle, Carlos Murrieta.
Autour des "huachicoleros", une culture populaire locale s'est développée avec des chansons et même un saint, représenté un bidon en plastique et un tuyau à la main.
Mais au carnaval de Tlaxcala, pour l'heure, cette culture-là ne trouve pas sa place.