L'art musical traditionnel fait partie du patrimoine national. Pour qu'il se perpétue, il est nécessaire qu'il se transmette, c'est-à-dire que les jeunes reprennent le flambeau. Selon les musicologues, la meilleure façon de le conserver est de le faire vivre au sein de la communauté où il est né. C'est pour y parvenir qu'a été mis sur pied le projet d'"Initiation aux airs folkloriques au collège". Celui-ci est le fruit d'une réflexion d'un groupe de l'École normale supérieure des arts du Vietnam, dirigé par le Docteur ès sciences Pham Lê Hoa, sur commande du ministère de l'Éducation et de la Formation, et ce dans le cadre du Projet général de développement de l'enseignement dans les collèges. Il a été expérimenté dans 6 collèges de 5 provinces et villes, avec des résultats plus qu'encourageants.
Quatre documents remis aux élèves
L'objectif est d'apprendre aux élèves un certain nombre d'airs folkloriques de diverses régions du pays et de leur faire découvrir en même temps les terroirs concernés. Cela les aidera à mieux comprendre et donc mieux aimer la musique traditionnelle. Concrètement, les élèves se verront remettre 4 documents : un recueil de 75 airs de diverses régions et ethnies, un ensemble de documents intitulé "Représentation des chants folkloriques du Vietnam", un CD de 54 chansons et un DVD d'une trentaine de chansons typiques. Dans les écoles choisies comme "bancs d'essai" - Giang Vo (Hanoi), Dông Tiên (Thai Nguyên), Lê Van Thiêm (Hà Tinh), Dông Khoi (Hô Chi Minh-Ville), Lôc Son et Quang Trung (Lâm Dông)- , le projet a été favorablement accueilli. "Ces chansons intéressent vraiment les élèves qui les ont facilement apprises par coeur", confie un professeur de musique de l'école Lê Van Thiêm.
Selon le compositeur Hoàng Long, conseiller du projet, l'utilisation de ces documents pourra être modulable en fonction des conditions de chaque localité. Par exemple : les CD et DVD pourront être utilisés lors des activités extrascolaires : formation de clubs d'amateurs d'airs folkloriques, concours de chants, festival... Il sera intéressant aussi d'organiser des séances de "Jeux musicaux" sur le thème du folklore ou des échanges avec des chanteurs professionnels, ou encore monter des émissions de radio sur les chansons populaires. "L'important, c'est d'exploiter au mieux cette base documentaire au profit des élèves", souligne-t-il.
Désintérêt des jeunes
Fin octobre 2009, a eu lieu à Hanoi le séminaire "Conservation et valorisation des airs folkloriques dans les écoles d'enseignement général". Actuellement, les connaissances des élèves en matière de musique traditionnelle "demeurent fragmentaires", d'après Nguyên Thi Tô Mai, doyenne de la Faculté de musique, École normale supérieure des arts. Dans les programmes des écoles d'enseignement général, le chant n'occupe que la portion congrue, et le répertoire folklorique est, la plupart du temps, passé sous silence.
C'est un fait, les collégiens sont beaucoup plus friands de rock, de rap ou de pop que de chants traditionnels. On ne peut pas les blâmer, c'est l'évolution de notre monde qui veut ça. Et puis, ce problème n'est pas spécifiquement vietnamien. En France, en Angleterre ou aux États-Unis, rares aussi sont les jeunes qui écoutent de la musique traditionnelle, et plus rares encore sont ceux qui savent en jouer. Des enquêtes réalisées dans certains collèges vietnamiens ont montré qu'environ 21% d'entre eux connaissant 10 chants folkloriques et plus, 74% en connaissent moins, et les 5% restants n'en connaissent aucun.
Les professeurs de musique ont aussi leur part de responsabilité. Formés pour la plupart en 2 ou 3 ans, ils font découvrir la musique au sens large, classique notamment, mais passe le plus souvent sous silence la musique traditionnelle, faute de compétences ou de temps.
La situation va s'améliorer grâce à ce projet, espère le Docteur Trân Dinh Châu, directeur du projet de développement de l'enseignement dans les collèges. Compte tenu des bons résultats lors de la phase expérimentale, il a annoncé que ce projet serait déployé dans tous les collèges du pays.
Nghia Dàn/CVN