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Le Belem sur la Loire, le 4 juin. |
Voiles ferlées et moteur en marche, le Belem a largué les amarres peu avant 13h00, avec à son bord seize membres d'équipage et une quarantaine de stagiaires, participant aux différentes tâches, de la corvée de vaisselle au hissage de voiles.
Dans le sillage de l'ancien navire marchand, construit par les chantiers Dubigeon à Nantes en 1896, et désormais bateau école, une flotte éclectique et impressionnante de plusieurs dizaines d'embarcations, qui chacune à son tour fait retentir sa corne de brume.
Bateaux de patrimoine, de pêche et portuaires, voiliers, avirons ou pneumatiques, remorqueurs de la Loire, "on se retrouve même à partager la navigation avec des vieux gréements, des navires portuaires antérieurs au Belem, qui ont peut-être travaillé ensemble. Ce sont en quelque sorte des retrouvailles", déclare le commandant du navire de prestige, Aymeric Gibet.
Sur la "photo de famille", figurera le plus vieux bateau de plaisance français, également Nantais, le Vezon, construit en 1887, relate Marc Tourneux, coordinateur nautique de cette grande parade. "Chacun des marins professionnels ou de plaisance a accepté de jouer le jeu pour rendre hommage au Belem et à la ville qui l'a vu naître. (...) C'est un grand moment", se réjouit-il.
"Magnifique trajet"
Mis à l'eau le 10 juin 1896, le Belem a effectué 33 campagnes commerciales jusqu'en 1914, transportant dans sa coque d'acier des marchandises du Brésil, de Guyane et des Antilles. Sauvé de l'abandon par le duc de Westminster qui le transforme en élégant yacht de croisière, qui le revend ensuite au brasseur Arthur Ernest Guiness, il passera sous pavillon italien après la Seconde guerre mondiale.
Le trois-mâts long de 58 mètres est racheté en 1979 par la Caisse d'Epargne, qui créera un an plus tard la Fondation Belem, et qui embarque à son bord des stagiaires, huit mois par an.
"Symboliquement", ce navire classé aux monuments historiques depuis 1984 a convoyé en cette "journée très particulière" une douzaine de jeunes de l'École de la deuxième chance, souligne le commandant Gibet, qui a pris la barre du Belem il y a un mois.
Mis à contribution pour servir le repas, Souleymane, 26 ans, se dit "chanceux" de "faire ce magnifique trajet".
"C'est une journée magique, une expérience unique. Plein de gens sur la berge regardent ce monument passer, on ne mesure pas l'importance de cet événement", témoigne Corinne, l'une des formatrices de l'École, qui a elle, malgré les vents contraires, "tiré des cordes pour monter une voile".
Alors que la flotte entourant le Belem arrive à mi-parcours, des coups de canon retentissent au large, bientôt suivis d'un concert de cornes de brume et de biniou, et des applaudissements des curieux présents sur les rives de l'estuaire.
Approchant du Belem, les passagers d'un voilier entonnent un "Joyeux anniversaire", dissimulé par le bruit du moteur propulsant le vieux gréement jusqu'à son port d'attache, Nantes, et le tintement de cloches.
Un peu retardé en raison d'une crue de la Loire et d'une marée plus haute, le fleuron du patrimoine maritime français est accueilli chez lui en fanfare et par un feu d'artifice. Il finit par accoster à son ponton, vers 19h 00, sous les yeux de milliers de personnes, amassées à bâbord et à tribord, dont la maire socialiste de la ville, Johanna Rolland.
Cette parade nautique donne le coup d'envoi d'une semaine de festivités autour du Belem et de son port, intitulée "Débord de Loire", une fête nautique et populaire qui a vocation à se renouveler tous les trois ans. Elle propose jusqu'au 12 juin visites du port de Nantes et de ses anciens chantiers navals, expositions, ainsi qu'un spectacle son et lumière.
AFP/VNA/CVN