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Garance Marillier, Vincent Lindon, Julia Ducournau, Agathe Rousselle et Lais Salameh à Cannes le 13 juillet. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Le film Titane a été longuement applaudi après sa projection mardi soir 13 juillet au Grand Théâtre Lumière. Ce long métrage qui remue est signé Julia Ducournau, 37 ans, la benjamine des 24 cinéastes en lice, au sourire aussi doux que son film est violent. Il s'ouvre par un accident de voiture dont est victime le personnage principal, Alexia, dans son enfance. Son père est au volant, elle manque de mourir et ne doit sa survie qu'à une plaque de titane qu'on lui insère dans le cerveau et qui se devine au-dessus de son oreille.
On la retrouve jeune adulte, jouée par une actrice débutante mais bluffante, Agathe Rousselle. La jeune fille fait littéralement l'amour avec des voitures, hommage à Crash de David Cronenberg, et tue des hommes, façon Sharon Stone dans Basic Instinct mais au pic à cheveux. Son corps est comme hanté par une masse de métal qui grandit dans son ventre tandis qu'elle sue et saigne de l'huile de moteur.
En fuite après ces meurtres, Agathe Rousselle, fera la connaissance de Vincent (Vincent Lindon), pompier qui entre deux piqûres de testostérone dans la fesse pleure son fils disparu enfant. Il peut lui offrir un refuge, elle peut réparer sa perte : sur une "terre brûlée", un "amour inconditionnel" va naître, explique la réalisatrice qui joue volontiers avec l'esthétique viriliste des pompiers ou du tuning.
"Un de mes buts a toujours été d'amener le cinéma de genre ou des films +ovniesques+ dans des festivals généralistes pour arrêter d'ostraciser un pan de la production française", ajoute Julia Ducournau. "Le genre permet aussi de parler de l'individu et très profondément de nos peurs et de nos désirs".
Assez sage
La réalisatrice avait déjà laissé un souvenir mémorable à Cannes avec son premier long-métrage, Grave, une histoire brute de décoffrage d'étudiante en médecine vétérinaire qui devient cannibale, qui lui permettait de devenir la cheffe de file d'un renouveau du film de genre tricolore. De l'autre côté de l'Atlantique, la réalisatrice a été adoubée par un maître de l'épouvante, Night Shyamalan, qui lui a confié la réalisation de deux épisodes de sa série Servant et a déclaré ensuite qu'elle avait "tout déchiré".
Lors de l'écriture de Grave, "je ressentais beaucoup de colère. Trump venait d'être élu, le monde n'était pas joyeux. J'étais très pessimiste sur l'avenir et sur la société dans laquelle il n'y pas de place pour la fluidité, pour la transformation, pour l'évolution et l'inclusivité. À l'époque, ça m'a emplie d'une sorte de rage", souligne-t-elle auprès de l'AFP.
Virginie Efira, Paul Verhoeven et Daphne Patakiaà Cannes le 13 juillet. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
En terme de sensations fortes, le film réveille en tout cas une compétition jusqu'à présent assez sage. Certaines oeuvres se sont avérées d'esprit rock, comme la comédie musicale Annette de Leos Carax qui a ouvert la compétition, ou La Fièvre de Petrov, du Russe Kirill Serebrennikov, mais ne jouent pas particulièrement sur le "trash".
Le nouveau film de Paul Verhoeven, Benedetta, histoire d'une nonne lesbienne dans l'Italie du Moyen-Age arrivait bien avec un parfum sulfureux. Mais s'il a été plutôt apprécié de la critique, il n'a pas non plus créé d'électrochoc et le réalisateur de Basic Instinct et Elle est plutôt moins dérangeant que dans ses précédents films.
C'est finalement peut-être à l'aune de son compatriote Gaspard Noé qu'il faut juger Julia Ducournau sur le "trash-o-mètre" cannois. En 2002, celui qui allait devenir l'enfant terrible du cinéma français, était lui aussi un trentenaire présentant son deuxième film, Irréversible en Compétition.
Une projection que le Palais des Festivals n'oubliera jamais : une vingtaine de personnes avaient été victimes d'évanouissements ou de crises de nerfs, certaines évacuées et prises en charge médicalement et plus de 200 spectateurs avaient préféré quitter la salle avant la fin.
Rien de tel pendant la projection du film de Ducournau. Et Gaspard Noé est lui aussi de retour à Cannes, mais en mode assagi, dans la section Cannes Première, avec un film sur la décrépitude d'un couple âgé.
AFP/VNA/CVN