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Le Dr. Bùi Trân Phuong. |
Photo : Truong Giang/CVN |
«L’apprentissage du français ne me faisait vraiment pas plaisir. Comme mon père était un ancien résistant, pour moi, la langue française était celle des envahisseurs», partage le Dr. Bùi Trân Phuong. Chez elle, cette ancienne rectrice de l’université Hoa Sen (Lotus) a raconté en français son enfance qui a été très influencée par la tradition de sa famille.
Sous la domination française, comme les Vietnamiens devaient apprendre obligatoirement la langue de Molière à l’école, elle a commencé ses études de français dès l’âge de 5 ans. «On cherchait à saboter les cours. Et la classe devait s’arrêter. Puis, le maître reprenait le cours et il était très en colère, surtout contre moi», sourit elle en se souvenant de son enfance.
Ancienne élève du lycée français Marie Curie, Bùi Trân Phuong ne change son attitude envers le français qu’après le bac. «C’est à partir de cette période qu’a débuté un long amour pour la langue française», avoue-t-elle.
Titulaire d’une licence en histoire de l’Université Paris I en 1972, elle est retournée à l’école Marie Curie pour y être enseignante. Un an plus tard, elle a été embauchée comme professeur à l’université de Cân Tho où elle a enseigné l’histoire de la littérature française en français de 1973 à 1975. Entre 1975 et 1991, elle a été enseignante à l’École normale supérieure de Hô Chi Minh-Ville.
Université Hoa Sen, une preuve d’innovation
À partir de 1991, Mme Bùi Trân Phuong s’est mise à construire, avec d’autres, l’école Hoa Sen, qui forme les bac + 2, +3, et l’université Hoa Sen depuis 2006 dont elle a été rectrice jusqu’en 2016. Après avoir obtenu son doctorat en France en 2008 à l’université Lyon 2, elle a enseigné l’histoire contemporaine à l’école Hoa Sen.
«Pour moi, le français est non seulement un outil de travail, mais aussi une méthodologie en sciences humaines. Je suis contente de l’avoir acquise à l’université française».
Sa carrière d’enseignement en français débute en 1973 à l’université de Cân Tho. Pourtant, c’est à l’université Hoa Sen qu’elle a fait preuve d’innovation dans le secteur éducatif et de son attachement à la Francophonie. L’école Hoa Sen est née avec un soutien très fort de la Francophonie, dont l’Agence universitaire de la Francophonie qui s’appelait, à l’époque, AUPELF-UREF.
«L’école Hoa Sen était une école inspirée des modèles BTS (Brevet technicien supérieur) et IUT (Institut universitaire de technologie). Nous avons combiné les BTS et IUT pour faire un diplôme vietnamien que nous appelons diplôme de technicien supérieur», explique le docteur Phuong.
Le Dr. Bùi Trân Phuong (1er à droite) avec les femmes d’origine vietnamienne participant à la Conférence des femmes de la Francophonie, tenue les 1er et 2 novembre à Bucarest en Roumanie. |
Ensuite, Hoa Sen a établi un partenariat avec la Chambre de Commerce et d’Industrie de Versailles pour former des étudiants suivant les critères d’un diplôme franco-vietnamien sur deux ans d’études après le baccalauréat, puis avec l’université Paris X, Paris-Est, pour le diplôme de licence délocalisé, qui permet aux étudiants vietnamiens d’obtenir une licence française, reconnue comme telle. Un autre partenariat, c’était avec le groupe Vatel de France pour une formation en hôtellerie-restauration.
«Quand j’étais enseignante, je travaillais en français dans deux domaines. J’en ai tiré beaucoup de valeurs», partage le Docteur Phuong. D’ajouter que son deuxième engagement, c’est la professionnalisation : «On a fait des BTS, des IUT. On a revu ce modèle pour l’adapter au Vietnam».
La multiplicité des langues est prioritaire
«On a enseigné aux étudiants que la mondialisation n’était pas une américanisation. Même si l’anglais est obligatoire et prioritaire et quelque chose d’indispensable, on a tenu à la multiplicité des langues, des cultures, pour permettre aux étudiants d’avoir une ouverture d’esprit», affirme Bùi Trân Phuong. Pour elle, la Francophonie n’est pas seulement la langue française, c’est l’ouverture au monde francophone, à la culture, aux valeurs et aux possibilités multiples des pays francophones.
Figurant dans le Top 20 des femmes les plus influentes au Vietnam en 2016 (élues par la revue Forbes), le Dr. Bùi Trân Phuong a été invité à participer à la Conférence des femmes de la Francophonie, tenue les 1er et 2 novembre à Bucarest, en Roumanie. Adressant son message à cet évènement, elle a constaté que ce sera une bonne opportunité pour les femmes et cela affirme fortement le soutien de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) à un développement égalitaire au niveau des gens. Ce sont des valeurs auxquelles elle s’est toujours attachée.
«Ce que j’attends et j’espère chez l’OIF, c’est qu’elle pourra tisser encore des réseaux où les femmes pourront travailler ensemble et montrer leurs capacités dans le monde économique», propose-t-elle, souhaitant aussi que l’OIF préserve ses valeurs que sont la coopération, l’entraide, la responsabilité de chacun à apporter une contribution au développement durable de l’humanité.
Truong Giang/CVN