>>Municipales : la France se prépare à voter, malgré le coronavirus
>>Municipales à Paris : un premier débat pour tenter de convaincre
Matériel électoral et désinfectant dans un bureau de vote de Quimper, le 14 mars 2020. |
Les appels se sont multipliés pour un report du 1er tour, que venait pourtant de confirmer le Premier ministre Edouard Philippe. Pas moins de six présidents de région - Valérie Pécresse (Ile de France), Xavier Bertrand (Hauts de France), Gilles Simeoni (Corse), Carole Delga (Occitanie), Renaud Muselier (PACA), et Hervé Morin (Normandie) -, parmi d'autres élus, ont réclamé le report du scrutin, s'attirant une réponse agacée de l'exécutif.
"Ce sont les mêmes qui ont réclamé le maintien à tout prix jeudi, sur un ton parfois menaçant, qui demandent à présent l'annulation à la veille... Il faut être sérieux, à défaut d'être cohérent", a riposté auprès de l'AFP un proche du président Emmanuel Macron.
Quelques heures auparavant, le chef du gouvernement annonçait la fermeture dès minuit et "jusqu'à nouvel ordre" de tous les "lieux recevant du public non indispensables à la vie du pays". Edouard Philippe a confirmé qu'en revanche, le premier tour des municipales, qu'Emmanuel Macron avait sérieusement envisagé d'annuler jeudi, se déroulerait dimanche "comme prévu", au prix d'un respect scrupuleux des "consignes de distanciation et de priorisation des personnes âgées et fragiles".
Record d'abstention ?
Le Premier ministre a demandé "calme" et "civisme" aux Français, alors même que de nombreux maires faisaient part samedi soir de démissions en masse des assesseurs prévus pour le scrutin, faisant craindre une multiplication des cafouillages dans les bureaux de vote -même si, en théorie, les édiles ont la faculté de réquisitionner des conseillers municipaux pour assurer la régularité des opérations électorales.
Au-delà, certains observateurs redoutent que le scrutin pâtisse d'une abstention record. Le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, a admis publiquement samedi craindre une participation en baisse. Dans les bureaux de vote, on se prépare pourtant à accueillir les électeurs dans les meilleures conditions possibles: poignées de porte, tables, isoloirs... tout doit être nettoyé avant le vote et des mesures sont prises pour éviter les files d'attente et faire respecter les distances de sécurité.
Le gouvernement diffuse de son côté des messages préconisant de voter de préférence avec un bulletin reçu par courrier, d'émarger avec son propre stylo - bleu ou noir -, et de privilégier les horaires de moindre affluence, entre 9h et 11h et de 13h à 16h. Cela suffira-t-il à inciter à voter les près de 47,7 millions d'électeurs - dont 330.000 ressortissants d'autres pays de l'UE- ? Notamment les plus âgés que le chef de l'État a justement encouragés jeudi à rester chez eux ?
Tandis que le bilan de l'épidémie s'aggrave -91 morts samedi-, nombre d'experts mettent également en doute la capacité de tenir le second tour dimanche 22 mars. "Mon analyse", tweetait ainsi samedi le constitutionnaliste Jean-Philippe Derosier, "est qu’un tel report annulerait le 1er tour. Il n’est pas possible de déconnecter les 2 tours d’un même scrutin sans altérer sa sincérité".
Campagne achevée dans l'indifférence
Ce contexte inédit, après une campagne électorale achevée dans l'indifférence, occulte les enjeux politiques de ce scrutin : Les Républicains et le PS parviendront-ils à se refaire sur le terrain municipal, après avoir vu leurs positions nationales s'effondrer depuis 2017 ? Le RN confirmera-t-il sa percée en gagnant de nouvelles mairies dans le Sud et les Hauts de France ? Les écologistes d'EELV pourront-ils maintenir leur élan des Européennes ? LREM, en position difficile, réussira-t-il un début d'implantation locale ?
À Paris, l'ex-ministre de la Santé Agnès Buzyn (LREM) paraît à la traîne derrière la sortante Anne Hidalgo (PS) et sa rivale LR Rachida Dati, qui font la course en tête. A Marseille, le macroniste Yvon Berland stagne à moins de 10%. Résultat très attendu également au Havre, où Edouard Philippe joue son avenir à Matignon.
Selon les dernières projections, les Républicains pourraient conserver nombre de leurs villes prises à la gauche en 2014. LR part toutefois divisé à Marseille, où le Rassemblement national espère sortir en tête au premier tour.
À gauche, les Verts espèrent profiter de la prise de conscience de l'urgence écologique et ambitionnent de s'imposer à Besançon, Tours, Rouen ou Grenoble. Le PS tentera surtout de conserver ses bastions de Paris, Lille, Rennes et Nantes. Le RN semble quant à lui en passe de conserver ses mairies conquises en 2014 et tentera de renforcer son implantation avant les régionales de 2021.
La barre relativement basse (10% des suffrages exprimés au premier tour) au-dessus de laquelle une liste peut se maintenir devrait se traduire par une multiplication des triangulaires, voire des quadrangulaires, au second tour. Avec l'effacement du clivage droite/gauche et la multiplication des listes "sans étiquette", les résultats du scrutin s'annoncent particulièrement difficiles à décrypter, et les discussions d'entre-deux-tours cruciales.
À l'issue du vote dimanche, les candidats autorisés à se maintenir auront jusqu'à mardi 17 mars 18h00 pour trouver des alliés ou fusionner leurs listes en vue du second tour.
AFP/VNA/CVN