>>La vaccination pour tous en France s'organise, "pass sanitaire" en vue
>>Coronavirus : le point sur la pandémie
Une femme reçoit la première dose du vaccin Pfizer-BioNTech à Paso de Carrasco, en Uruguay, le 26 mai. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Quinze mois après l'apparition du coronavirus en Amérique du Sud, le variant brésilien P.1, plus contagieux et dominant dans ces trois pays, n'explique qu'en partie ce constat.
En Uruguay, "les gens ne croient pas" à la virulence du virus, estime l'urgentiste Francisco Dominguez. "On le voit dans la rue: quasiment personne ne porte de masque. Tant qu'il ne connaissent pas de proches hospitalisés ici, ils ne réalisent pas".
Après avoir été salué pour sa gestion exemplaire de la pandémie, le pays de 3,6 millions d'habitants est aujourd'hui en tête du nombre de décès pour 100.000 habitants au cours des 14 derniers jours (22,20 décès), selon les données recueillies par l'AFP basées sur des chiffres officiels.
Suivent le Paraguay (19,38) et l'Argentine (14,92) et d'autres pays latino-américains : Colombie, Brésil et Pérou. À titre de comparaison, les États-Unis, pays le plus endeuillé au monde, enregistrent aujourd'hui un taux de 2,45.
La faible perception du risque en Uruguay peut s'expliquer par la grande période exempte de contaminations, alors que le reste du monde multipliait les confinements et voyait ses centres de soins intensifs déborder.
Le pays n'a jamais été confiné malgré les pressions du corps médical. Pour maintenir l'économie fragilisée par un manque de recettes touristiques, le président de centre-droit Luis Lacalle Pou prône la "liberté responsable" de ses citoyens.
Certes, les spectacles ont été suspendus et les écoles comme les frontières fermées depuis mars, mais les salles de sport, restaurants et commerces fonctionnent comme avant la pandémie.
Le gouvernement a fait le pari de la vaccination, commencée tardivement. Mais malgré son rythme intense -28% de la population entièrement vaccinée, 47% ayant reçu une seule dose- elle n'a pas encore eu l'impact tant attendu sur la courbe des infections et des décès, comme au Chili voisin.
"Déni ou rébellion"
Des manifestants protestent contre le confinement imposé par le gouvernement pour lutter contre le COVID-19, à Buenos Aires, le 25 mai. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
L'Argentine a entamé samedi 22 mai son deuxième confinement strict après plusieurs périodes de couvre-feu et de fermetures ou d'ouvertures des commerces. Pendant neuf jours, toutes les activités sont suspendues afin de freiner une moyenne quotidienne sans précédent de nouveaux cas (30.000) et de décès (500).
Des comportements peu responsables, l'adoption tardive de restrictions strictes et un manque de vaccins expliquent la voracité de cette nouvelle vague, avance Elisa Estenssoro, membre du comité d'experts qui conseille le gouvernement de centre-gauche d'Alberto Fernandez.
"Les comportements ne sont pas égaux parmi la population : rencontres sociales, non-port du masque... Une partie se conforme aux règles, une autre est dans le déni ou la rébellion", dit-elle.
L'infrastructure sanitaire est à la limite de l'asphyxie. À Neuquén (Sud-Ouest), l'hôpital Heller, le plus grand de la province, s'est vu obligé de fermer ses portes. À l'hôpital Durand de Buenos Aires, "il manque des lits et le personnel est épuisé", a témoigné mardi 25 mai auprès de l'AFP un infirmier, Héctor Ortiz. "Quand un lit se libère, c'est qu'il y a eu un décès, et il est immédiatement réoccupé".
Mardi 25 mai, des manifestations ont été organisées dans plusieurs villes contre ce nouveau confinement qui divise le pays, qui commençait à peine à montrer des signes de reprise après trois années de récession aggravée par la pandémie.
La vaccination avance lentement, 8,7 millions sur 45 millions d'habitants, soit moins de 20%, ont reçu une première dose, et 2,4 millions sont entièrement vaccinés.
Au Paraguay voisin, plus pauvre, le manque de matériels de soins et de vaccins est critique.
"Aujourd'hui, nous avons une liste de plus de cent Paraguayens qui attendent d'entrer en soins intensifs" et qui reçoivent des soins "insuffisants par rapport à la gravité" de leur état de santé, déplore l'épidémiologiste Tomas Mateo Balmelli.
"Ce sont ceux qui meurent sur des chaises, dans des couloirs d'hôpitaux ou (...) dans leur propre maison", dit-il.
Seuls 3% des 7,3 millions d'habitants sont vaccinés, les services de soins intensifs affichent complet et le gouvernement du conservateur Mario Abdo Benitez a seulement prolongé le couvre-feu nocturne jusqu'au 7 juin.
AFP/VNA/CVN