>>La première Fashion week post-Karl Lagerfeld démarre à Paris
>>Slimane, le roi du slim et du noir, ouvre une nouvelle ère chez Celine
>>Sophistication de Céline, graphisme d'Hermès
Défilé de la maison Celine à Paris, le 1er mars. |
Photo: AFP/VNA/CVN |
Jupe culotte mi-longue à carreaux vichy avec des bottes hautes, tailleur pantalon gris porté sur un pull col roulé, chemise lavallière ou foulard noué de la même manière: l'allure de working girl des années 70 est complètement différente de la première collection du styliste destinée à la jeune fêtarde en mini-robe.
Des jeans slim se portent avec des cuissardes sous des manteaux longs. Pour une touche disco, un cardigan doré par ci, une veste noire à paillettes par là. La robe noire devient longue et fluide. Pas un morceau de peau n'est dévoilé. Les yeux sont cachés par des lunettes noires.
La maison a envoyé en guise d'invitation pour ce défilé aux Invalides un livre contenant des posters de couleur. Gris argenté, miel, mauve, lie de vin, doré, tabac: une palette dans laquelle on reconnaît les codes Celine, mais pas ceux de Slimane.
Roi du noir, de la ligne acérée et de l'esthétique rock qu'il avait cultivés chez Dior et Saint Laurent, le styliste de 50 ans qui vient d'être désigné par le magazine Vanity Fair "le Français le plus influent du monde" avait pourtant déclaré en prenant les rennes de Celine qu'il poursuivait "obsessionnellement une allure, une silhouette" et n'était pas là pour "imiter" ses prédécesseurs.
Le noir avec ses effets "laqués, satinés, lustrés, cuivrés" a dominé sa première collection en septembre, qui mettait en scène une jeune femme très mince en mini-robe du soir évoluant dans une boîte de nuit.
Cette esthétique a suscité la colère d'une grande partie des fans de la maison fondée en 1945 et connue par son élégance décontractée et son chic minimaliste. Même les supporteurs de Slimane ont admis qu'il avait passé au rouleau compresseur l'héritage de Phoebe Philo, sa prédécesseur britannique qui en dix ans chez Celine a largement contribué au succès de la marque.
"Exagérations de puritanisme"
Défilé Celine par Hedi Slimane à Paris, le 1er mars. |
Photo: AFP/VNA/CVN |
Karl Lagerfeld, qui avait perdu 42 kg pour porter les costumes d'Hedi Slimane, et Lady Gaga, amie du styliste, étaient présents à ce défilé.
La presse française a salué les créations "couture", mais les critiques de mode anglo-saxons ont été impitoyables, allant jusqu'à qualifier ces vêtements de "dégradants" et Slimane de "Donald Trump de la mode" pas en phase avec l'époque post-#Metoo.
Ils ont accusé Slimane d'avoir jeté aux orties l'héritage de Phoebe Philo, auteure d'un vestiaire confortable.
Très avare en interviews, Hedi Slimane a répondu à ces attaques par écrit au journaliste Loïc Prigent dans son format baptisé "5 minutes de mode" diffusé sur le compte Instagram de ce dernier.
"L’esprit du défilé était léger et joyeux, mais la légèreté et l'insouciance en mode sont aujourd’hui remises en question. J’ai déjà vécu cela chez Saint Laurent. Il y a la politique, les conflits d’intérêts et les coteries, une posture prévisible, mais aussi des exagérations stupéfiantes de conservatisme et de puritanisme", a-t-il lancé.
Cette collection est une réponse aux détracteurs d'Hedi Slimane qui lui reprochaient de ne pas se renouveler. D'autres estimaient cependant que le style très reconnaissable de Slimane était la clé du succès du styliste, l'un des plus influents de sa génération et la raison pour laquelle le groupe LVMH l'a embauché en espérant faire grimper les ventes.
"Les gens qui critiquent Slimane ne comprennent pas qu'il existe une catégorie de clients qui le suivent de marque en marque. Alors il peut faire ce qu'il veut", estime Mikelle Street, chroniqueur de mode américain.