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Cliché publié le 10 février montrant l'alpiniste Léo Billon en train d'escalader les Grandes Jorasses, dans les Alpes. |
Photo : AFP/VNA /CVN |
Le trio a réalisé ces ascensions par les voies les plus directes et les plus rudes entre le 12 janvier et le 9 février, bravant le froid, la fatigue, le vent et le stress pour atteindre ces sommets mythiques.
Védrines (29 ans), Billon (29 ans) et Ratel (35 ans) ont d'abord conquis l'Eiger par la voie Harlin (1650 m/Suisse) du 12 au 16 janvier puis enchaîné avec les Grandes Jorasses par la Directe de l'Amitié (1200 m/France) du 24 au 26 janvier, pour terminer avec le Cervin mercredi par la voie Cerruti-Gogna (1000 m/Suisse), avalée en une seule journée.
Trois semaines après Charles Dubouloz, devenu le premier à gravir en solo en hiver la face nord des Grandes Jorasses, un nouveau record a donc été accompli dans le massif des Alpes.
La fameuse trilogie des Alpes avait déjà été réussie en 2011 par le duo Patrice Glairon-Rappaz et Cédric Périllat Merceroz, mais sur une période plus longue de deux mois (entre le 14 janvier et le 11 mars).
Arrivé au sommet de la voie Cerruti-Gogna, au soleil couchant (18h20), debout sur une arête enneigée et étroite surplombant le massif montagneux, le trio a crié: "On l'a fait!", en brandissant le poing tout en gardant l'équilibre, d'après leur vidéo.
"Souffrance" et "combat"
"On ne saute pas énormément de joie parce qu'on doit rester concentrés sur la descente mais on a laissé exprimer notre soulagement et notre surprise de l'avoir fait en si peu de temps", s'est réjoui Védrines, dans un entretien téléphonique avec l'AFP tout en gérant sa descente vers Zermatt (Suisse).
Le guide de haute montagne, déjà auteur d'un exploit en octobre avec l'ouverture d'une nouvelle voie en duo avec Dubouloz sur la face nord du Chamlang (7319 m) au Népal, est à l'origine du projet qui lui a été inspiré par Glairon-Rappaz/Périllat Merceroz.
"La différence c'est qu'eux n'ont pas fait la voie en intégralité sur l'Eiger, ils se sont échappés sur la fin. Nous, on a fait la première ascension en style alpin, comme nous l'a validée un historien de la montagne", raconte Védrines.
Le trio a gravi la voie Harlin en quatre jours (trois bivouacs), la Directe de l'Amitié en trois (deux bivouacs) et la Cerruti-Gogna en une seule journée.
La Cerruti-Gogna, "si on la réussit en été sur deux jours, c'est (déjà) bien, il n'y a pas beaucoup de passages l'hiver", souligne l'alpiniste Stéphane Benoist, spécialiste des Grandes Jorasses.
"Il n'y a pas beaucoup de prétendants. Les conditions sont dures, c'est de la souffrance, il faut s'en remettre physiquement et mentalement. Il faut avoir le goût d'y retourner, il y a quand même une notion de combat, dans des parois qui sont énormes", poursuit-il.
"Imprégnés de beauté"
Les trois alpinistes rentraient chez eux après chaque ascension, s'entretenaient avec vélo, ski ou encore course à pied avant de rechausser les crampons.
La Directe de l'Amitié restera à jamais leur "grand coup de cœur".
"On en est sorti imprégnés de beauté (...) On a vu plusieurs couchers et levers de soleil, on a pu s’immerger dans l'intimité d’une face nord. C'est rare", confie Védrines, qui ne souffre d'aucune blessure malgré quelques frayeurs.
Le natif de la Drôme explique être tombé une fois et Ratel a fait deux chutes en tête. "Ầ trois comme ça, en un mois en hiver, c'est vite arrivé que quelqu'un se blesse. C'est dément".
Le trio était pressé de redescendre jeudi : Ratel a promis à sa femme de la retrouver au restaurant à Valence dans la soirée !
AFP/VNA /CVN