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Un campement de migrants à Calais le 9 février. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
"J'aimerais bien qu'il n'y en ait plus un dehors cette nuit", commente le préfet du Pas-de-Calais Louis Le Franc en visitant mardi 9 février les deux hangars loués temporairement par l'État dans une zone industrielle de Calais, pour permettre à 300 migrants de dormir au chaud.
Des barnums délimitent des espaces comprenant 6 ou 12 lits, garnis de sacs de couchage. Des migrants - des hommes uniquement, d'autres dispositifs étant prévus pour les familles et les mineurs - lavent leurs vêtements dans les sanitaires ou les font sécher devant une source de chaleur. Une table leur propose soupes en sachets et tongs.
En moyenne les nuits précédentes, 200 places sur les 300 ont été occupées, selon Nathalie Chomette, directrice départementale de la cohésion sociale.
Elle indique que 450 personnes sont également hébergées "hors de Calais", jusque dans l'Oise, pour 600 places disponibles. Des hébergements permettant de rester au chaud pendant la journée mais jugés trop éloignés par de nombreux migrants.
Six couches
"Ici c'est bien, les gens sont gentils", sourit un Egyptien, écharpe Arsenal au cou, en montrant les agents de sécurité. "Mais l'après-midi, il fait froid aussi", se plaint un autre, soulevant une à une ses six couches de vêtements.
Des migrants font la queue devant un stand de distribution de nourriture à Calais le 8 février. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
Mercredi 10 février, les températures ne doivent pas dépasser 0°C à Calais. À 09h00, heure à laquelle les migrants doivent quitter les hangars, il fait -5°C.
"On est dans une logique de mise à l'abri, pas d'hébergement jour et nuit. Le danger c'est surtout la nuit, avec des températures aussi basses on peut ne pas se réveiller si on dort sous tente", assume le préfet, conformément à la volonté de l'Etat d'éviter de nouveaux "points de fixation" sur le littoral.
"S'il faut les garder toute la journée, on le fera", ajoute-t-il toutefois, soulignant que le matin, "on leur propose d'être hébergés en dehors du département", dans les centres d'accueil et d'examen de la situation (CAES).
Pendant la journée, des associations mandatées par l'État font le tour des campements pour tenter de convaincre les migrants de se mettre à l'abri. Ce mardi, sous un pont du centre-ville où des tentes sont dangereusement suspendues au ras de l'eau, un membre de l'association "Audasse" s'accroupit pour discuter en arabe avec un homme allongé dans une tente.
"Il y a des enjeux qu'on ne peut pas maîtriser, des tentatives de passage, des passeurs, de la pression, plein de choses qui font que certains refusent la mise à l'abri", constate Julie Piedbois, d'Audasse.
Si les horaires des maraudes ont été étendus jusqu'à 22H00, des associations réclament qu'elles aient lieu aussi la nuit, racontant que des migrants retournent dormir dehors, trempés, après avoir fait naufrage.
"Un enfer"
"On fait du feu, on cuisine. Là-bas il y a trop de monde, des cris, j'ai peur de me faire prendre mon argent", explique un Soudanais.
"On n'a pas confiance et on est là pour tenter (la traversée, ndlr), on ne veut pas perdre de temps", témoigne Babaladé, Somalien de 31 ans.
Pourtant, "on vit un enfer", reconnaît-il, montrant le terrain où il dort avec quelques autres. Le robinet est bouché et il a dû déchirer sa tente, gelée, pour en sortir.
"On nous fait croire à grands coups de communication à des dispositifs que les migrants ne veulent pas prendre car ils sont trop éloignés", s'énerve Yann Manzi, cofondateur de l'association Utopia56. "Les CAES sont faits pour les personnes qui veulent demander l'asile mais pour tous ceux qui sont Dublinés ou veulent aller en Angleterre, ces solutions n'en sont pas".
Il demande "un accueil 24 heures sur 24 sans vérification administrative", près des lieux de vie.
Nathalie Chomette assure, elle, d'un "accueil inconditionnel dans les CAES, le temps que les choses se calment sur le plan météo".
AFP/VNA/CVN