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Il faut condamner fermement par le biais des médias tous les viols et agressions sexuelles. |
Les Nations unies apprécient hautement les actions entreprises par le gouvernement vietnamien dans les enquêtes sur les récentes affaires d’agressions sexuelles à l’encontre d’enfants, a-t-on appris dans un communiqué publié le 17 mars par le Bureau de l’Organisation des Nations unies (ONU) au Vietnam. Selon son coordinateur résident au Vietnam, l’ONU est toujours prête à coopérer avec le gouvernement vietnamien dans l’amélioration de la législation sur la prévention et le traitement des affaires de pédophilie et dans le perfectionnement du niveau professionnel du personnel chargé de protéger les enfants. L’ONU aidera également le pays à établir des services spécifiques de protection des enfants, notamment des services de soutien psychologique.
Malgré l’évaluation positive de l’ONU, les affaires pédophiles reçoivent toujours des critiques dans le pays à cause de son lenteur dans l’exécution des procédures judiciaires pour les coupables.
Des procédures judiciaires trop lentes
Récemment, la police de Hanoï a décidé de lancer une action en justice dans une affaire d’abus sexuel sur une fillette de 8 ans domiciliée dans le quartier de Thinh Liêt, arrondissement de Hoàng Mai, suite à une intense pression de l’opinion publique.
L’agression s’est produite le 8 janvier 2017. Vers 19h30, un voisin de 34 ans a invité la fillette en question à jouer à «cache-cache». Il aurait attiré l’enfant dans une ruelle et aurait profité de la pénombre pour abuser d’elle. La famille a déposé plainte le 10 janvier à la police du quartier. Le lendemain, le suspect a été interrogé. Bien que l’examen médical ait clairement établi l’existence d’un rapport sexuel, l’homme a été relâché, et aucune action en justice n’a été entreprise contre lui. Ce n’est que récemment, deux mois après les faits donc, que la police a décidé, sous la pression de l’opinion publique, de placer en détention le principal suspect, en attente de son jugement.
L’affaire dans l’arrondissement de Hoàng Mai n’est pas le seul cas de viol de mineur où l’opinion publique a été révoltée par le temps qu’ont pris les enquêtes policières. À Hô Chi Minh-Ville et dans la ville de Vung Tàu, province de Bà Ria-Vung Tàu (Sud), deux autres cas ont été médiatisés. Le 14 février dernier, une femme dans l’arrondissement de Thu Duc, à Hô Chi Minh-Ville, a déposé plainte après avoir remarqué plusieurs traces rougeâtres dans la zone génitale de sa fille de 7 ans. L’enfant a confié avoir été abusée par un homme dans son école. Cependant, l’école et le Bureau de l’éducation et de la formation de Thu Duc ont nié l’agression sexuelle, et ce malgré les confidences de l’enfant et le fait que l’une des caméras de vidéosurveillance de l’école avait été coupée pendant environ une heure le jour de l’incident… L’enquête se poursuit et l’accusé est assigné à résidence.
Auparavant, fin juin 2016, Mme T.T, domiciliée dans la ville de Vung Tàu, province de Bà Ria-Vung Tàu, a déposé plainte contre un homme de 76 ans dans le quartier de Nguyên An Ninh, l’accusant d’avoir abusé sexuellement de sa fille de 8 ans pendant les vacances d’été.
Après des enquêtes approfondies, il est apparu que l’homme aurait agressé au moins six autres enfants entre 2012 et 2016. Le Parquet populaire suprême de Vung Tàu a engagé des poursuites pénales. Cependant, pour des raisons de santé, l’accusé n’a pas été placé en détention, mais est assigné à résidence.
Un cadre juridique à revoir
Les parents ou enseignants doivent inculquer aux enfants les règles de base pour se protéger. |
Selon des données du ministère de la Police, de 1.600 à 1.800 cas d’agressions sexuelles sont recensées en moyenne chaque année dans le pays. Un chiffre loin de la réalité. Environ 65% des victimes sont des fillettes de 12 à 15 ans, et 13,2 % d’entre elles ont moins de 6 ans. Un enfant est sexuellement agressé toutes les huit heures au Vietnam. Dans 73% des cas, l’agresseur est un proche de la famille.
Les enfants sans-abri sont très vulnérables aux agressions. Les délinquants sexuels profitent en effet de leur dénuement et rémunèrent leurs «faveurs». D’après Khuât Thu Hông, de l’Institut de recherche sur le développement social, «le sexe est un tabou profondément ancré dans la culture vietnamienne. Les gens hésitent à parler de viol, de rapports sexuels forcés. De nombreux enfants n’osent pas témoigner».
«Les crimes liés à la pédophilie sont souvent traités lentement», estime l’avocat Lê Van Luân. D’après lui, pour que la police lance une enquête, il doit y avoir des signes tangibles sur le corps de la victime. Une règle jugée «ridicule» par Lê Van Luân, qui estime que la «loi pose problème». En effet, la législation requiert obligatoirement un examen médico-légal. Celui-ci doit être réalisé au plus tôt afin que certaines preuves ne disparaissent pas. Cet examen n’est actuellement pratiqué que dans un nombre restreint d’hôpitaux désignés.
Pour Dang Hoa Nam, chef du Département de protection et de soins des enfants (ministère du Travail, des Invalides de guerre et des Affaires sociales), afin de prévenir et lutter contre les agressions sexuelles sur les mineurs, la participation active de la police des arrondissements et districts est très importante.
Il faut aussi condamner fermement par le biais des médias tous les viols et agressions sexuelles. Notamment, les parents ou enseignants doivent inculquer aux enfants les règles de base pour se protéger. Il faut dire aux enfants qu’ils ont le droit de refuser une proposition d’un adulte même s’ils le connaissent ; que ce n’est pas impoli d’ignorer un adulte qui lui demande de l’accompagner quelque part ; qu’ils doivent se rapprocher d’un groupe de personnes ou entrer dans le magasin le plus proche s’ils se sentent en danger dans la rue ou qu’ils doivent chercher de l’aide jusqu’à ce qu’ils trouvent quelqu’un qui les croie et qui agisse.
Huong Linh/CVN