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La Pr. associée - Dr. Vuong Thi Ngoc Lan, experte en fécondation in vitro (FIV). |
Photo : IVFMD/CVN |
La Pr. associée - Dr. Vuong Thi Ngoc Lan, experte en fécondation in vitro (FIV), est l’un des cinq scientifiques vietnamiens figurant dans la liste des 100 meilleurs scientifiques d’Asie de 2021, sélectionnée par l’Asian Scientist Magazine, revue scientifique prestigieuse du continent. Les figures de cette liste sont à l’origine de nouvelles découvertes scientifiques, d’avancées dans la recherche sur les problèmes urgents du changement climatique, ou sur la pandémie de COVID-19.
Mme Lan, doyenne par intérim de la Faculté de médecine, et cheffe de la discipline de gynécologie-obstétrique de l’Université de médecine et de pharmacie de Hô Chi Minh-Ville, a été honorée dans les sciences biomédicales grâce à ses travaux de recherche dénommés "Transfert d’embryons frais ou congelés chez les femmes sans ovaires polykystiques dans la FIV" (IVF Transfer of fresh or frozen embryos in women without Polycystic Ovaries).
Pour rappel, cette étude a été l’une des trois récompensées en 2020 par le prix Ta Quang Buu, du nom du célèbre scientifique vietnamien (1910-1986). Mme Lan était alors devenue la deuxième femme scientifique du pays et la deuxième représentante de la filière biomédicale à recevoir ce prix prestigieux récompensant les contributions importantes dans les sciences et technologies du Vietnam.
La "porteuse de bonheur" aux couples stériles
Née en 1971 dans une famille de médecins (sa mère étant la célèbre Pr.-Dr. Nguyên Thi Ngoc Phuong, ancienne directrice de l’hôpital Tu Du, qui a grandement contribué à l’amélioration de la santé reproductive des femmes vietnamiennes), Vuong Thi Ngoc Lan a nourri dès son plus jeune âge le rêve de porter une blouse blanche. En 1997, après avoir obtenu son diplôme de major de promotion de l’Université de médecine Pham Ngoc Thach, elle s’est portée volontaire pour travailler en tant que stagiaire à l’hôpital Tu Du, spécialisé dans l’obstétrique et la gynécologie.
À ce moment-là, une délégation d’experts français était au Vietnam pour soutenir la mise en œuvre des premiers cas de FIV. Forte de ses compétences, la jeune femme a été choisie pour rejoindre l’équipe de médecins vietnamiens en charge de ce projet. Mme Lan raconte que l’un des trois premiers bébés nés de ce projet franco-vietnamien a été baptisé Pham Tuong Lan Thy. En signe de gratitude, les parents choisirent les prénoms de Mme Lan et de Hô Manh Tuong, l’un des membres de l’équipe, qui devint ultérieurement son mari.
Un expert venu des États-Unis est formé à la technique de prélèvement des ovocytes sous le guide de Mme Lan (centre). |
Photo : KHCN/CVN |
"En voyant le bonheur des couples stériles embrassant leur enfant tant attendu, mes collègues et moi sommes toujours très émus. C’est ma la motivation première de poursuivre ce travail", partage-t-elle. Les premiers temps de la mise en œuvre de la FIV au Vietnam, elle et son équipe durent affronter à de nombreuses difficultés, dont le faible taux de réussites. "Chaque fois qu’une FIV échoue, mon cœur se serre en voyant les couples dépités. À nos débuts, les médecins du Département d’infertilité de l’hôpital et moi redoublions d’efforts. Au fur et à mesure, nous avons porté le taux de succès à 20%, 30%, puis 40%...".
En une vingtaine d’années, Vuong Thi Ngoc Lan a traité directement plus de 20.000 couples. Raison pour laquelle elle est affectueusement surnommée "la jeune mère aux mille enfants". Grâce aux réalisations dans la FIV du Vietnam reconnues internationalement, Mme Lan a été invitée à de nombreuses conférences à l’étranger pour partager ses expériences. En 1998, Mme Lan a reçu le prix Kovalevskaya. En 2017, elle a été élue par le magazine Forbes comme l’une des 50 femmes les plus influentes du Vietnam.
Une étude innovante
Avec l’ambition de faire acquérir à la FIV du pays une réputation égale à celle de pays comme les États-Unis et la France, Vuong Thi Ngoc Lan a décidé de se lancer en 2014 dans une recherche visant à comparer les transferts d’embryons frais et congelés dans des techniques de la FIV. Elle dirige une équipe de neuf médecins venus de l’hôpital My Duc à Hô Chi Minh-Ville, de la polyclinique de Cân Tho et de l’Université d’Adélaïde (Australie). Ces chercheurs vietnamiens ont joué un rôle clé dans l’élaboration de programmes de recherche, avec les conseils de deux experts de l’Université d’Adélaïde.
En 2018, le 11 janvier, l’étude "Transfert d’embryons frais ou congelés chez les femmes sans ovaires polykystiques dans la FIV" a été publiée dans le prestigieux New England Journal of Medicine (NEJM). C’était la première fois qu’une recherche menée par des Vietnamiens y était publiée. Son équipe a randomisé 782 femmes infertiles (sans syndrome d’ovaires polykystiques) pour réaliser une FIV par deux techniques de transfert d’embryons congelés et frais.
Mme Lan et un bébé né de la FIV et sa mère. |
Photo : TCSK/CVN |
"Notre étude était la première au monde à prouver que le transfert d’embryons congelés est aussi efficace que celui réalisé avec les embryons frais chez les femmes infertiles ne souffrant pas du syndrome des ovaires polykystiques", affirme-t-elle.
Cette recherche a contribué à changer les pratiques de la FIV dans le monde. "Nous pouvons congeler les embryons, et réduire à un seul le nombre d’embryons transférés. Cette méthode permet de réduire les risques de stimulation ovarienne, de grossesses multiples", précise la scientifique.
Parlant de la signification de son étude, elle déclaré que chaque année dans le monde, il y a environ 3 millions de cas de transferts d’embryons. Au Vietnam, on en compte chaque année 40.000. Cette étude permet d’atteindre une efficacité élevée. Une autre contribution de cette étude est la mise en œuvre réussie de la technique de vitrification en congélation d’embryons. Il s’agit d’un procédé technique assez nouveau permettant d’améliorer jusqu’à 99% le taux de survie des embryons après décongélation.
Actuellement, Vuong Thi Ngoc Lan continue d’effectuer des analyses secondaires pour répondre davantage aux questions spécifiques telles que le choix du type de transfert d’embryon (congelés ou frais) pour chaque patient, la comparaison du coût et de l’efficacité des deux méthodes de transfert, la surveillance du développement physique et mental des bébés nés de transferts d’embryons congelés et frais.
Linh Thao - Huynh Dung/CVN