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Jean Castex (centre) dans les vignes touchées par le gel à Estagel, le 17 avril. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
"L'État doit être à la hauteur de cette catastrophe. À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles. Je suis venu annoncer un effort significatif de l'État à hauteur d'un milliard d'euros car la situation le justifie", a déclaré le Premier ministre à l'issue d'une table ronde avec des représentants agricoles et des élus à Montagnac (Hérault).
Ce montant, a précisé une porte-parole du ministère de l'Agriculture, est celui d'une enveloppe globale incluant le nouveau fonds. Celui-ci s'ajoute aux autres aides versées et indemnisera en fonction des "pertes réelles" déclarées dans les mois à venir par les producteurs.
Face à la catastrophe qui a détruit plusieurs centaines de milliers d'hectares de cultures, le Premier ministre a décliné plusieurs mesures d'urgence : report et exonération de charges sociales, dégrèvements de taxes foncières sur le non bâti (TFNB), et mobilisation des dispositifs existants en matière d'activité partielle.
Une enveloppe d'urgence sera par ailleurs allouée "sous dix à quinze jours" aux préfets pour apporter un soutien immédiat aux exploitations les plus en difficulté.
L'indemnisation des arboriculteurs au titre du dispositif des calamités agricoles sera portée jusqu'à 40% - le maximum autorisé par Bruxelles - pour les pertes les plus importantes, contre 35% actuellement.
Pour les autres filières aujourd'hui non couvertes par ce régime de calamités agricoles, comme les viticulteurs ou les producteurs de grandes cultures (betterave, colza...), un soutien exceptionnel similaire sera mis en place.
"Fermeture climatique"
En agissant "avec rapidité", le "gouvernement a pris la mesure de la gravité de la situation", a déclaré à l'AFP Christiane Lambert la présidente du principal syndicat agricole, la FNSEA. "Ce sont de bonnes annonces, avec des mesures pour aider la trésorerie, un fonds exceptionnel pour indemniser notre +fermeture climatique+ similaire à la fermeture sanitaire des restaurants due au COVID-19..."
Des bougies antigel dans un verger à Westhoffen, le 6 avril, dans le Bas-Rhin. |
Photo : AFP/VNA/CVN |
D'autant que le secteur de la viticulture était "à la peine, après le boycott des vins français par Donald Trump depuis 2019 puis la fermeture des bars, restaurants, hôtels, évènements. C'était déjà la cata commerciale", fait-elle valoir.
Dans l'attente de ces aides, qui nécessitent de connaître l'ampleur des pertes agricoles, une aide forfaitaire basée sur la perte de chiffre d'affaires mensuel sera accordée "sur le modèle du fonds de solidarité mis en place pour la crise sanitaire", a précisé le Premier ministre.
Ce fonds sera aussi ouvert aux entreprises en aval de ces filières, qui sont pénalisées par l'absence de récolte à conditionner ou à transformer (fabricants de confitures...).
Le gouvernement veut un fonds qui "indemnisera de façon rapide", a affirmé le ministre de l'Agriculture Julien Denormandie sur France Inter.
Une première réunion se tiendra lundi 19 avril, en présence du ministre de l'Agriculture, à laquelle participeront la FNSEA et ses filières, pour que ces "annonces se traduisent concrètement par des mesures efficaces", a annoncé le syndicat agricole dans un communiqué.
En outre l'enveloppe du plan de relance dédiée à "l'adaptation au changement", passera de 100 à 200 millions d'euros.
"Le diable se cache dans les détails"
Bruno Darnaud, président de l'AOP pêche et abricots de France, s'est dit lui aussi "satisfait que l'État réagisse rapidement", avec un "catalogue d'aides qui parait assez large". "Mais le diable se cache dans les détails : il faudra voir notamment si on trouve des solutions pour les arboriculteurs assurés qui seront moins bien indemnisés que ceux bénéficiant du régime des calamités".
Selon M. Darnaud, la France peut s'attendre à perdre cette année la moitié de sa production de fruits, soit un manque à gagner d'un milliard et demi d'euros. Et au moins un tiers de la production viticole serait perdu, soit deux milliards d'euros de chiffre d'affaires, estime la FNSEA.
"Nous avons besoin d'une agriculture forte, c'est une question de souveraineté, de compétitivité. On va vous aider à vous relever", a promis le Premier ministre, avant de visiter l'exploitation viticole de Patrice Aviles à Montredon-des-Corbières (Aude).
"On réalise en moyenne 3 millions d'euros de chiffre d'affaires : cette année on espère au mieux un million", a déclaré M. Aviles.
AFP/VNA/CVN